Tir de grenade. Un policier devant la justice, "avec l'impact, je ne devrais pas être là" témoigne Guillaume, sa victime

Le 23 mars 2019, Guillaume, un vidéaste, a pris une grenade dans la tête pendant une manifestation des Gilets Jaunes. Le policier, un major, a effectué un tir horizontal, ce qui est interdit. Guillaume s'en est sorti avec des séquelles à vie, et espère être reconnu victime lors du procès de l'auteur du tir prévu à Montauban le 23 mai. Il témoigne.

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Quatre ans plus tard, une victime d'un tir de grenade durant une manifestation des Gilets Jaunes va peut-être obtenir justice de l'agression qu'il a subie. Les faits se sont déroulés le 23 mars 2019 à Toulouse (Haute-Garonne), lors de l'acte 19 des Gilets Jaunes. Guillaume est vidéaste et tourne des images en 360 degrés : un tir de grenade Cougar l'atteint alors en pleine tête.

Retour sur les faits, leurs conséquences et le volet judiciaire avec lui et son avocate, avant le procès du policier major prévu le 23 mai prochain. 

Les faits : une grenade tirée horizontalement l'atteint en pleine tête sans exploser

La vidéo fait froid dans le dos : équipé de son matériel vidéo, Guillaume s'applique à tourner la manifestation "pour filmer le côté pacifiste", assure-t-il. À une vingtaine de mètres des policiers, il s'effondre d'un coup. Il vient d'être touché par un tir en pleine figure.

Sur cette vidéo, à la 32ème seconde, on distingue le tir horizontal du major (caché par un de ses collègues) qui touche Guillaume (une seconde plus tôt, un autre policier tir de façon réglementaire, en cloche). Il est matérialisé à l'image par un trait rouge furtif. Image par image, on peut d'ailleurs apercevoir la grenade. La grenade n'explose pas et Guillaume est vite pris en charge par les street médics, très présents lors des manifestations. Le procès devra démontrer ou non que le major est bien l'auteur de ce tir.

"J'ai eu beaucoup de chance", formule Guillaume, joint par téléphone quelques jours avant son procès. "Vu l'impact de la grenade, je ne devrais pas être là dans l'état dans lequel je suis". Pour son avocate, Maître Claire Dujardin, Guillaume est "un rescapé, mais il aurait pu mourir". 

La scène n'est pas sans rappeler celle analysée par les quotidiens Le Monde et Libération où le manifestant antibassine Serge Duteuil-Graziani a été gravement blessé à Sainte-Soline, le 25 mars 2023, par un tir non-réglementaire au lance-grenade Cougar.

Depuis, des séquelles à vie

Les jours qui ont suivi ont été terribles pour Guillaume. "Je suis resté en urgence neurologique pendant 48 heures au CHU de Purpan. Une semaine après, c'était encore le black-out, sans contact avec l'extérieur. C'était encore très compliqué trois semaines après comme j'étais très fatigué. C'est six ou sept mois plus tard que j'ai pu comprendre qu'il se passait encore quelque chose dans la vie", raconte-t-il. 

Un parcours du combattant avec de nombreuses séquelles encore très lourdes aujourd'hui : "Je fais des bilans cérébraux, j'ai des troubles de l'organisation, des problèmes de fatigue. Je ne peux pas travailler comme avant, et j'ai des soucis d'audition définitifs qui nécessitent un appareillage".

Même s'il va "bien aujourd'hui", Guillaume reste soucieux de l'hémorragie qu'il a subie car elle pourrait dégrader son état de santé. 

Le procès, alors qu'il est "rare qu'un policier soit poursuivi en correctionnel"

Le procès va donc se tenir, plus de quatre ans après les faits. "Il est important car c'est très rare qu'un policier soit poursuivi devant le tribunal correctionnel", indique Maître Claire Dujardin. Souvent, l'IGPN, en charge des enquêtes impliquant des forces de l'ordre, ne parvient pas à identifier les auteurs ou considère que le tir est légitime.

Là, les faits sont clairs. "On a beaucoup de questions à poser au major, sur sa formation, son maintien de l'ordre et son acte. On veut aussi parler du lanceur-Cougar : j'ai moi-même découvert qu'en l'utilisant en tir tendu, ça peut tuer", poursuit la robe noire.

Guillaume n'a pas porté plainte mais s'est constitué partie civile dans ce dossier, sous les conseils de Maître Claire Dujardin. Il "attend d'être reconnu victime" durant le procès, exprime-t-il. Lui aussi souhaite évoquer l'utilisation du lanceur-Cougar, "qui n'a rien à faire en manifestation" et qui "blesse des gens qui ne manifestent pas la plupart du temps". Selon lui, l'utilisation de ces armes est "un problème de société et de maintien de l'ordre".

Le procès va se tenir au tribunal de Montauban (Tarn-et-Garonne) et non à Toulouse car l'auteur du tir est un major de police. "Il travaille en étroite liaison avec les magistrats. La vice-procureure de Toulouse a donc préféré que ça soit dépaysé", conclut Maître Claire Dujardin. L'audience est prévue ce mardi 23 mai, à partir de 14 heures. 

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