Quelle est la température de l'eau au Sud du Sri Lanka, la hauteur des vagues au Cap de Bonne-Espérance ou la salinité de la mer Méditerranée ? Pour y répondre, Mercator Océan, une petite entreprise toulousaine, traite et analyse des milliers de données des océans.
C'est la vigie des océans. Depuis Toulouse, la PME Mercator Océan, 70 employés et de 25 millions de chiffre d'affaires, traite et analyse des milliers de données des océans.
, explique son PDG Pierre Bahurel.L'océan est en danger de notre ignorance. Il est sous-estimé et pas assez considéré
"On a comme objectif de faire des prévisions sur les océans", poursuit-il, le but est "d'analyser le plus finement la situation et de l'expliquer". "On ne dit pas aux clients +ce que vous faites c'est bien ou mal+, ou aux sous-marins +montez ou descendez+, (...) mais: voilà l'état de l'océan".
Un bulletin de santé de l'océan
Ce service s'appelle "Copernicus Marine Service" (CNEMS). C'est le volet maritime du projet baptisé "Copernicus", un programme d'observation de la Terre, mené conjointement par l'Union européenne et l'Agence européenne de l'espace (ESA), et doté d'un budget de 4,29 milliards d'euros.Mercator, filiale de grands organismes scientifiques publics français (CNRS, Ifremer...) qui a vu en décembre l'arrivée d'investisseurs étrangers, avait remporté en 2015 l'appel d'offres pour ce projet.
souligne Pierre-Yves Le Traon, directeur scientifique. Selon lui, le prochain rapport sur l'état des océans, présenté fin mars devant le parlement européen, insistera comme l'an dernier sur le réchauffement climatique.L'océan est un très bon indicateur des changements climatologiques,
Dans les couloirs de Mercator, des cartes des océans sont affichées un peu partout.
Près du bureau de Pierre-Yves Le Traon, une carte de l'Amérique du Sud. L'eau y est colorée en fonction de sa température, un élément qui préoccupe beaucoup ce scientifique car les mers "sont directement impactées par le réchauffement climatique".
"Il faut lutter contre le réchauffement. Si on ne le fait pas aujourd'hui, dans les dizaines d'années qui viennent, on sera impactés", plaide Pierre-Yves Le Traon.
Inquiétude sur la fonte de la banquise
Mercator, qui compte 12.000 abonnés, travaille pour une clientèle variée allant d'entreprises privées aux Etats. L'entreprise obtient ses résultats à partir de satellites et d'instruments de mesure installés sur ses 3.000 bouées flottant sur les océans ou sur des bateaux de commerce.Les prévisions se font sur quinze jours maximum et sont divisées en quatre domaines principaux : les opérations en mer (plateformes pétrolières, navires de recherche), l'activité côtière (accès au port), le climat et le milieu vivant (biologie, coraux, algues et poissons).
"On augmente nos durées d'analyse, on a de nouveaux produits, on a pris beaucoup plus de sources chiffrées pour avoir des synthèses plus fiables", fait valoir Pierre-Yves Le Traon, rappelant que la température des océans "a augmenté de 0,7 degré depuis le début du siècle" et qu'elle progresse même dans les abimes, à plus de 1.000 mètres de profondeur.
, renchérit Gilles Garric, scientifique spécialisé dans les pôles. "On bat des records de minimum d'extension de la glace presque tous les ans. Les dix dernières années représentent les dix années jamais enregistrées depuis 1970".La glace fond de façon alarmante
Sur les 25 dernières années, Mercator Océan observe un perte de 7% par décade de la banquise. Et le pire, "c'est qu'on ne voit pas ce qui se passe dessous".
Mais "l'océan est toujours considéré comme un sous-produit de quelques chose", déplore son PDG, "au gouvernement, on met l'océan avec l'agriculture". Un comble pour une masse qui recouvre les deux tiers du globe et représente une réserve énorme de biomasse et d'énergie.