Réchauffement climatique. Un simulateur développé à Toulouse mesure l'impact du dégel du permafrost sur l'environnement

Le permafrost, ce sol gelé en permanence, commence à dégeler et menace de relâcher énormément de CO2 dans l'atmosphère. Des chercheurs de l'université Paul Sabatier ont développé un simulateur ultra précis pour anticiper les conséquences de ce phénomène dû au réchauffement climatique.

Du fait de l'augmentation des températures particulièrement notable en Arctique, le pergélisol (ou permafrost en anglais), ce sol gelé tout au long de l'année, est en plein dégel. Ce changement rapide va avoir un impact au plan local mais aussi global avec l'émission de gaz à effet de serre.

Pour anticiper et comprendre ce qui devrait se passer, des chercheurs de l'université Paul Sabatier ont mis au point un nouveau simulateur. Il permet de modéliser en détail les effets multiples de la fonte progressive du permafrost.

"On s'est servi de supercalculateurs parmi les plus puissants, explique Laurent Orgogozo, maître de conférence et coordinateur scientifique du projet ANR-HiPerBoréa. Ils nous ont permis de modéliser les transferts d'eau et de chaleur dans les sols avec des périodes de gel et de dégel. Ce sont des phénomènes complexes et qui varient d'un versant à l'autre".

"La présence de permafrost modifie considérablement les flux d’eau, la stabilité des sols et les conditions environnementales de multiples manières, ce qui n’est pas sans conséquences pour les écosystèmes et les activités humaines dans les régions froides". 

L'équipe du laboratoire Géosciences environnement Toulouse* s'intéresse à ce phénomène car les enjeux sont considérables au plan local mais aussi global. On trouve le permafrost aux pôles mais aussi en haute montagne. Il est présent quand la température annuelle est au-dessous de zéro comme dans certains secteurs des Alpes, dans les Andes, l'Himalaya ou en Scandinavie. 

Emission de CO2 et de méthane

"Le dégel du permafrost a des conséquences sur les activités humaines et change profondément la dynamique des conditions environnementales, poursuit Laurent Orgogozo. Il affecte les ressources en eau et la stabilité des sols, ce qui conduit d'ores et déjà à la destruction d'infrastructures. Le permafrost contient, en outre, beaucoup de matières organiques que les bactéries dégradent quand il se réchauffe. Ce phénomène produit des gaz à effet de serre, CO2 et méthane, en quantité importante".

Grâce aux supercalculateurs de dernière génération, pouvant utiliser des centaines de milliers de processeurs simultanément, les scientifiques ont réussi à simuler sur plusieurs sols spécifiques cette évolution du permafrost. Ces données sont précieuses concernant l'évolution des activités humaines dans les zones arctiques. 

Enjeux économiques

"On sait qu'avec le retrait de la banquise, la route du Nord s'ouvre, explique Laurent Orgogozo. Elle est plus courte (d'un quart) que celle qui relie la Chine à l'Europe par le canal de Suez. Les projets dans cette zone représentent des intérêts colossaux. Ils reposent sur des infrastructures. Connaître l'évolution du permafrost permet de savoir à quoi s'attendre et de sécuriser les investissements éventuels''.

Sur la question du milieu naturel, la modélisation permet d'anticiper la progression des lignes d'arbres vers le Nord, mais aussi celle des déserts, explique encore le chercheur. Dans les zones de taïga où il pleut très peu, par exemple, le permafrost maintient la végétation. Le mélèze, un arbre de la famille des pins, ne peut se développer que grâce à la présence du permafrost. Etablir des modèles par rapport au réchauffement est utile pour savoir à quelle pression vont être soumis les éco-systèmes.

ANR-HiperBorea est utilisé pour quantifier la fonte du permafrost sur une centaine d'années dans quatre sites de suivi en Eurasie boréale : en Scandinavie, en Sibérie occidentale, Sibérie centrale et orientale. Il teste divers scénarii de changement climatique pour chaque site. La vrsion définitive de la publication est disponible sur le site web du projet HiperBorea notamment et sur sciencedirect.com.

* Géosciences environnement Toulouse (GET), unité mixte de recherche de l’Université Toulouse III - Paul Sabatier, du CNRS, de l’IRD et du CNES, est un laboratoire de recherche pluri et interdisciplinaire en sciences de la terre et de l’environnement rattaché à l'Observatoire Midi-Pyrénées (OSU OMP).

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