Deux jours après les annonces de Jean-Michel Blanquer sur un retour progressif à l'école après le 11 mai, revirement d'Emmanuel Macron. Il a décidé que la reprise des élèves se ferait sur la base du volontariat des parents. Syndicats d'enseignants et parents d'élèves n'apprécient pas du tout.
La rentrée scolaire après déconfinement avait été annoncée par le ministre de l'Education nationale comme progressive, par petits groupes et par niveaux, échelonnée sur trois semaines. Elle n'aura finalement peut-être tout simplement pas lieu pour certains élèves. Sans attendre le plan de déconfinement promis dans deux semaines, Emmanuel Macron a finalement acté ce jeudi une rentrée scolaire sur la base du volontariat des parents, "sans obligation de retour à l'école".
Cette rentrée "progressive, concertée avec les élus locaux et adaptée aux réalités locales" donnera sans doute la priorité aux "plus jeunes, ceux qui ne sont pas autonomes", ainsi qu'aux enfants "les plus en difficulté" a encore précisé l'Elysée.
La FCPE "hallucine"
"Ils annoncent quelque chose et après finalement, ils affinent. C'est complètement hallucinant !" Jointe par téléphone, Muriel Paletou, la présidente de la FCPE 31 n'en revient pas. "Il y a deux jours, on nous parlait de retour en classe par niveaux et là, tout d'un coup, se serait sur la base du volontariat. On ne gouverne pas par la communication. Il y a une communauté éducative, des enseignants, des personnels, des parents. Consultons-la, travaillons, affinons et ensuite on aura une feuille de route qu'on pourra appliquer."
Ce n'est plus possible, ces allers-retours quotidiens entre Edouard Philippe, Emmanuel Macron et Jean-Michel Blanquer. Il faut un peu de sérieux. Ils doivent présenter un plan définitif au moment où ils ont dit qu'ils l'annonceraient et arrêter ces annonces quotidiennes. Tous les jours, on a de nouvelles annonces, floues, sans cadre... Les parents sont très inquiets, encore plus les parents de touts petits. La navigation à vue, ça suffit ! Muriel Paletou
Sans compter les moyens mis en oeuvre pour cette reprise : "on va faire travailler les collectivités territoriales sur les transports sans aucune visibilité sur le nombre d'élèves à transporter ? Pareil pour les cantines. C'est hallucinant."
Une réelle crainte que ce volontariat renforce encore les inégalités
Elle craint aussi que ce volontariat ne creuse encore les inégalités entre les élèves. Tout comme Jean-Philippe Gadier, professeur des écoles à l'école Victor Hugo, dans le quartier Bellefontaine à Toulouse. Il est syndicaliste au SNUIPP-FSU et très "remonté" contre toutes ces annonces.
Pour lui, cette priorité donnée aux plus jeunes est "une aberration". "Comment faire respecter des gestes barrières à des élèves de grande section ?" s'interroge-t-il. Mais il souligne surtout les inégalités "inévitables" que ce volontariat induit. "L'école est obligatoire pour tous, de 3 à 16 ans" dit-il "et cette obligation doit garantir l'égalité d'accès aux contenus scolaires pour tous. Là, on en fait une question de libre-arbitre. Et toutes les familles n'auront pas les moyens de l'exercer de la même façon. Les conditions matérielles vont être déterminantes".
Pierre Priouret, secrétaire général du SNES-FSU pour l'académie de Toulouse, pense lui aussi que cette décision va renforcer les inégalités. "C'est très stigmatisant pour les élèves et c'est très inégalitaire sur le plan social" dit-il. "Les parents vont devoir choisir entre priver leurs enfants d'école ou les envoyer avec la peur du risque sanitaire. On crée de fait un tri entre les élèves : certains seront exposés à un risque et d'autres non".Soit un doute sanitaire existe dans la reprise et dans ce cas, il doit profiter à tout le monde, riches ou pauvres. Soit l'école est obligatoire pour tous, y compris pour ceux qui ont les moyens de travailler à la maison, avec une pièce dédiée et un ordinateur et les dérogations existent uniquement pour ceux qui ont des problèmes de santé. Jean-Philippe Gadier
Tous dénoncent l'absence de concertation et des annonces prématurées alors que les garanties sanitaires ne sont pas actées pour la reprise. Et alors que les réunions engagées aussi bien entre les enseignants, les personnels et les parents qu'avec les collectivités n'ont pas encore livré leurs conclusions.Les enfants les plus éloignés de l'école, ceux qui ont le plus souffert du confinement et de la continuité pédagogique, ceux qui viennent des milieux les plus défavorisés, on va les inciter plus particulièrement à être volontaires. C'est un très mauvais signal envoyé. Pierre Priouret