Ils sont naturopathes, médiums karmiques ou encore psycho-énergéticiens. Tous participent au salon du bien-être, bio et thérapies qui se tient à Labège jusqu’au dimanche 11 septembre. Alors, temple du bien-être ou foire aux charlatans ? L’organisation d'un tel salon pose question après la polémique sur Doctolib, accusé de faire la promotion de pratiques médicales non-reconnues.
Le salon du bien-être, bio et thérapies a démarré ce vendredi 09 septembre à Labège près de Toulouse. Pour la modique somme de 3 euros, le public peut rencontrer nombre de thérapeutes. Ici pas de cardiologue ni d’angiologue. On trouve plutôt des spécialistes de "l’amélioration du bien-être" comme l’indique le site internet de l’évènement.
Certains de ces spécialistes étaient référencés il y a encore peu de temps sur le site internet Doctolib. Suite à une levée de boucliers de syndicats de médecins et du Conseil de l’Ordre, le site internet spécialisé dans la prise de rendez-vous médical a fait le ménage et a suspendu plusieurs profils douteux dont des naturopathes.
Médecine complémentaire ou charlatanisme ?
Près de 10000 visiteurs sont attendus sur 3 jours. Dans les allées du salon, ils pourront tomber sur un constructeur de maison en bois, un vigneron bio ou encore un medium voyant. Au total : 180 exposants. Et 60 conférences sont organisées sur des thèmes très variés comme : "La Pensée Positive et la loi de l’attraction par les forces Énergétiques Berbères" ou encore "Gagner la lutte contre le cancer, la découverte dont la République n’a pas voulu".
Mais qui sont ces conférenciers ? Pour l’organisateur du salon, il s’agit de spécialistes pratiquant une "médecine complémentaire à la médecine traditionnelle".
Parmi eux, Luc Bodin, un ancien médecin adepte des "groupes de prières pour l’humanité et la planète". Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages dont "Soigner avec l’énergie". Selon l’auteur, "ce livre présente de façon claire et détaillée l’ensemble des techniques énergétiques existantes, depuis le chamanisme et les thérapies traditionnelles, jusqu’aux plus récentes comme les thérapies pyscho-énergétiques, l’acupression, les soins énergétiques, ho’oponopono, etc..."
Notons également la présence de Jean-Luc Picot, toulousain spécialisé en "Thérapie informationnelle et plus précisément sur l'équilibrage énergétique dans toutes ses composantes : Physique, Émotionnel, Mental et Spirituel", comme il le précise sur son site internet.
Ces conférenciers dispensent des formations et des ateliers payants tout au long de l'année.
Pour Patrice Marty, l'organisateur du salon, ces intervenants sont des gens tout a fait compétents dans leur domaine. "Je suis très vigilant sur le choix des intervenants dans ce salon. Des charlatans il y en a partout. Ce n'est pas propre à notre salon. Mais il faut rester vigilant."
Ce n'est pas tout a fait l'avis du docteur Jérôme Marty, le président de l'Union française pour une médecine libre.
Ce sont des charlatans. Je n'ai aucune indulgence vis a vis de ces gens-là.
Dr Jérôme Marty, président de l'Union française pour une médecine libre
Le président de l'Union française pour une médecine libre ne décolère pas face à la tenue d'un tel salon : "c'est une honte. On ne peut pas laisser faire n'importe quoi en matière de santé. Il faut écarter ces gens-là. Ils se font du fric sur le dos des gens. Nous récupérons des patients qui ont tenté de se faire soigner par des charlatans. C'est une catastrophe. Il est question de santé et de guérison. Autoriser ce genre de salon, ce n'est pas possible."
Dérives sectaires ?
Certains pratiquants de ces médecines dîtes "complémentaires" sont dans la ligne de mire de la Miviludes. C'est le cas de Luc Bodin, cité plus haut. Cet organisme gouvernemental observe et analyse le phénomène sectaire. Depuis peu, il travaille au côté de Doctolib, plateforme de prise de rendez-vous médicaux. La Miviludes et Doctolib travaillent ensemble pour répondre à la situation problématique des pratiques de soins non conventionnelles. Fin août le site internet a été accusé de faire la promotion des médecines alternatives. Depuis Doctolib, a annoncé la suspension de plusieurs profils douteux, et la mise en place de nouvelles règles.
Certains profils de naturopathe sont toutefois toujours sur Doctolib. C’est le cas de la Toulousaine Christine Berdoulat. Sur sa page Doctolib, il est bien précisé que "ce praticien n’est pas un professionnel de santé et exerce une profession non réglementée."
Cette naturopathe intervient en tant que conférencière au salon du bien-être.
Pour Simone Risch, présidente d’info secte Midi-Pyrénées, il convient de rester vigilant face à certains pratiquants de ces médecines alternatives. "Il faut que les pouvoirs publics contrôlent un peu plus ce genre de salon. Nous voulons des contrôles sur ces pratiques de médecine non conventionnelle. Et puis les pouvoirs publics devraient s’intéresser davantage à ceux qui s’autoproclament thérapeutes."
Des pratiques contrôlées
Ces naturopathes et autres kinésiologues ont tout à fait le droit d’accompagner des personnes en cabinet ou lors de stages payants. Des professions non réglementées, mais qui sont tout de même contrôlées par les services de l’État. Les investigations de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) menées en 2018 ont montré que plus des deux tiers des 675 praticiens contrôlés présentaient au moins un manquement : majoritairement des défauts d’information, mais aussi dans certains cas des pratiques commerciales trompeuses voire présentant des risques pour les patients.
Si la plupart des visiteurs y trouvent leur compte, d’autres sont beaucoup plus sceptiques. C’est le cas d’Antoine Daoust, fondateur de Fact & Furious, site d'actualité et de fact-checking indépendant qui lutte contre la désinformation. Pendant 3 jours il va sillonner le salon pour tenter de comprendre qui sont ces thérapeutes.
3 jours donc pour découvrir la bioénergie quantique, les mémoires akashiques, la chromobiologie sensitive… ou pas !