À Saint-Lys (Haute-Garonne), un centre pour réfugiés est au cœur des débats depuis de nombreux mois. Entre une opposition véhémente, et le manque d'information des services de l'État à l'origine du projet, le maire Serge Deuilhé tire la sonnette d'alarme. Il demande à être "enfin entendu".
"Ça pourrait se passer comme à Saint-Brévin…" Serge Deuilhé, maire PS de Saint-Lys en Haute-Garonne, s'inquiète d'un contexte global qui n'est pas favorable aux maires, les "premiers interlocuteurs de la population". Si la situation à Saint-Lys est encore loin de celle qu'a connu le maire de Saint-Brévin-les-Pins (Loire-Atlantique), Serge Deuilhé se retrouve seul face à ses administrés qui s'interrogent sur le projet d'un Centre de préparation au retour (CPAR).
Cette structure accueille et accompagne les personnes déboutées de leur demande d'asile. Dans une lettre ouverte au président de la République Emmanuel Macron, l'édile alerte sur le manque de coordination de l'État avec ses élus locaux.
"On ne se sent pas entendu"
"On travaille avec la préfecture depuis deux ans. La dernière réunion date du 24 mars dernier, et j'y ai eu des informations, raconte Serge Deuilhé. Cependant, d'autres informations sont arrivées entre temps sans que je ne sois au courant." Alors que le CPAR de Saint-Lys devait être ouvert en 2024, il devrait finalement être ouvert en juin.
Serge Deuilhé l'a su en conseil municipal : "ce sont des élus d'opposition qui m'ont appris que la cession était programmée fin mai et que l'arrivée des premiers résidents était prévue fin juin. En interrogeant immédiatement les services de l'État sur ces éléments, j'en ai eu la confirmation alors même que l'information ne m'était pas parvenue."
La goutte de trop pour le maire de Saint-Lys qui a décidé d'interpeller le président de la République. "Sur cette question, j'ai déjà demandé quatre fois un rendez-vous à la députée de ma circonscription, sans succès. Quand je suis allé à Paris, j'ai demandé à être reçu par le ministre de l'Intérieur et je n'ai pas eu de suites. Aujourd'hui, on ne se sent pas entendu", poursuit Serge Deuilhé.
Il réclame une meilleure collaboration entre l'État et ses collectivités locales, surtout pour des projets à l'initiative de l'État.
Un contexte tendu
Si le maire insiste, c'est que le sujet est polémique. Après l'opposition de la mairie au CPAR, l'État a revu ses plans : une vingtaine de familles devrait être accueillie au lieu d'une trentaine comme le prévoyait initialement le projet. Depuis, Serge Deuilhé travaille avec la préfecture pour la création du centre, mais l'opposition de certains habitants se fait de plus en plus fort, avec l'extrême-droite en toile de fond.
J'ai des collègues voisins qui ont reçu des lettres de menaces de mort !
Serge Deuilhé, maire PS de Saint-Lys
"Les maires sont les premiers relais de la population, on reste le premier interlocuteur. Sur ce dossier, quand on me demande, je n'ai pas l'information, donc je me sens abandonné", déplore l'élu. Si Serge Deuilhé n'a reçu "que" des insultes "sur les réseaux sociaux", il l'assure : "j'ai des collègues voisins qui ont reçu des lettres de menaces de mort !" Une situation qui rappelle celle connue il y a quelques semaines à Saint-Brévin-les-Pins où la maison du maire a été incendiée.
Des informations attendues "dans les prochaines semaines"
Pour l'heure, la situation n'est pas tout à fait comparable. À la suite de son courrier, Serge Deuilhé a été reçu "assez rapidement" par le sous-préfet de la Haute-Garonne, Jean-Luc Blondel. Ce dernier a tenu à s'expliquer sur ce "problème de communication" et assure qu'il n'y a "absolument aucune intention de dissimulation de quoi que ce soit".
"À l'origine, la signature devait se faire en septembre 2023, mais les notaires ont réussi à s'entendre sur les différents documents et ont fixé la date de la signature fin mai, justifie le sous-préfet Jean-Luc Blondel. Ensuite, en ce qui concerne les premières arrivées de migrants, contrairement à ce que peut dire l'opposition municipale, ce ne sera pas fin juin, mais plutôt d'ici plusieurs semaines."
"J'attends des informations. J'espère que ce sera dans les prochaines semaines pour communiquer avec la préfecture auprès de la population", appuie de son côté le maire de Saint-Lys, qui "attend des actes". Selon la préfecture, les choses devraient bouger rapidement. Une prochaine réunion entre les services de l'État et le maire de Saint-Lys est déjà "programmée courant juin".