Le retour sur le terrain du Toulousain Florian Fritz, semble-t-il sous la pression de son manager Guy Novès, après un K.O, vendredi, lors du barrage de Top 14 face au Racing-Métro, a choqué la communauté médicale du rugby.
Le K.OStade Ernest-Wallon, 19e minute du jeu: le centre international stadiste, lancé à pleine vitesse, est plaqué par un Racingman. Dans sa chute, il heurte le genou de François van der Merwe. Fritz est K.O et ouvert au front.
Manifestement désorienté, il a besoin du soutien des médecins pour regagner les vestiaires où il se fait recoudre. Gaël Fickou le remplace temporairement pour saignement, soit pour une durée maximale de 15 minutes.
Novès vient le chercher
Au bout de 14 minutes, Guy Novès rentre dans l'infirmerie, sous l'objectif des caméras, et demande si le joueur peut rentrer. Fritz retourne sur la pelouse quelques instants plus tard, avec 7 points de suture, avant de quitter à nouveau ses coéquipiers, définitivement cette fois, à la pause.
"J'ai eu un petit K.O. Je ne me souviens pas de tout", explique alors le joueur au micro de Canal+ à l'entame de la seconde période.
"Moi aussi j'ai joué sonné"
"S'il ne rentrait pas comme je l'ai fait rentrer, il aurait été éliminé et comme la mi-temps arrivait, j'ai demandé à ce qu'il rentre rapidement en attendant de
faire un point à la pause", s'est justifié Guy Novès à l'issue de la rencontre. "Après, on a vu qu'il était suffisamment sonné pour le sortir. Moi aussi j'ai pris
des K.O et joué sonné, mais comme vous le voyez, je suis encore là devant vous."
Les médecins sont choqués
Une version des faits dénoncée samedi par le Dr Bernard Dusfour, président de la Commission médicale de la Ligue nationale de rugby (LNR), joint par l'AFP: "Florian Fritz s'est effondré, il s'est assis sur le terrain, on rentre dans l'ataxie (perte de coordination musculaire, ndlr), s'emporte-il. Il n'y a même pas de protocole à appliquer ! Il était impératif qu'il ne re-rentre pas sur le terrain."
Le Dr Dusfour fait ici référence au protocole mis en place par l'International Rugby Board (IRB), appliqué en France depuis 2012. Objectif: déceler les commotions cérébrales secondaires à un impact, qui ne se limitent pas aux K.O les plus évidents et peuvent laisser des lésions au cerveau. Un deuxième choc après un K.O peut même avoir des conséquences dramatiques.
"Quelle pression Novès a-t-il fait peser sur le staff médical ? (...) Si la vie des joueurs ne l'intéresse pas, qu'il sache que la performance du joueur diminue
en cas de commotion", ajoute le médecin.
"Quand le pâté touche le bocal "
"On voit que les consignes ne sont pas appliquées, a renchéri le Dr Jean-Claude Peyrin, président de la Commission médicale de la Fédération française de rugby (FFR). Il y a des médecins qui auraient dû dire: +Non monsieur Novès.+ Je ne sais pas pourquoi tous ces médecins ont laissé reprendre le joueur."
"On va demander officiellement au staff médical toulousain des explications, continue-t-il. On ne peut pas laisser faire des choses comme ça."
"Ca ne regarde pas la presse. Le travail a été fait", a pour sa part réagi le médecin du Stade Toulousain, le Dr Albert Sadacca, interrogé par l'AFP.
"On ressent un certain degré de colère quand on se soucie de la santé des joueurs", a évoqué pour sa part Laurent Travini, secrétaire général du syndicat des joueurs, Provale, auprès de l'AFP. "On a bien compris que Novès ne posait pas une question.
Florian Fritz n'a pas été protégé", s'insurge l'ancien deuxième ligne montois. "Quand le pâté touche le bocal, comme on dit, ce n'est pas que du folklore, continue-t-il.
Les conséquences sont documentées. Il y a trop d'exemples qui montrent que c'est catastrophique vingt ou trente ans après."