Séverine Rouffiac a choisi d'alerter les autorités sur le sort des étudiants de 1ère année de médecine qui font les frais de la réforme instaurée à la dernière rentrée d'après elle. Découragée, sa fille Lola pourtant très "bosseuse" s'apprête à partir étudier au Portugal. Explications.
Séverine Rouffiac se dit totalement désemparée. Sa fille Lola n'a pas été reçue lors de l'examen qui valide son premier semestre, malgré un travail d'arrache-pied et une vocation sans faille, explique-t-elle. Elle met en cause la nouvelle réforme, le PASS, instauré en 2020 et son application à la faculté de Toulouse.
Pourquoi cet appel au secours pour les étudiants de première année de médecine ?
Je suis désemparée et j'estime que cette réforme est en train de faire des ravages. Or, on décourage même les plus motivés des étudiants. J'ai ma fille Lola et ma belle-fille Marie-Sophie qui sont en première année de médecine. Toutes les deux sont en prépa en parallèle. Elles travaillent sans discontinuer du matin tôt jusqu'à des heures très tardives.
Je les ai à peine vues depuis près d'un an. Je leur porte un repas à la pause et les incite à décrocher pour s'aérer une demi-heure. En vain. Or, elles ont reçu mercredi les résultats de leur examen de début décembre. Lola est recalée pour une note en physique éliminatoire à même pas un point près alors qu'elle a obtenu de bons résultats dans toutes les autres matières. Avant, de bonnes notes pouvaient compenser une mauvaise note.
Maintenant, ils n'ont même pas le droit de redoubler... Elle pleure sans arrêt car elle ne voit pas quoi faire d'autre. C'est sa vocation depuis de longues années et elle a travaillé d'arrache-pied pour y arriver... Cette année, ils ont dû avaler en quatre mois le programme planifié sur toute l'année dernière. Ils ont travaillé comme des bêtes de somme et ils n'ont eu qu'une semaine de révision contre quatre l'année d'avant.
Pourquoi dénoncez-vous précisément l'application de cette réforme à Toulouse ?
Toulouse est la seule faculté en France où on décompte des points aux QCM (Questionnaire à choix multiple). Si vous donnez une mauvaise réponse, vous perdez un point. Par ailleurs, on a su le nombre d'élèves admis, le numerus clausus, que mercredi dernier. Partout ailleurs, les étudiants savaient dès le départ. Les filles étaient prises à Montpellier. Si elles avaient su qu'il n'y aurait que 166 places (dont 122 en médecine) pour 1200 étudiants, elles auraient choisi Montpellier ou Limoges.
On n'était pas du tout parti sur ces quotas. Même leurs profs de prépa les ont encouragées en leur disant que vu leur sérieux et leurs résultats, elles avaient toutes leurs chances. Les redoublants de l'année dernière ont pris la grande majorité des places. Or, elles n'ont pas la possibilité de redoubler du fait de la réforme. La seule option, c'est d'aller poursuivre leurs études à l'étranger. Je me renseigne pour le Portugal. On va devoir faire des sacrifices. Je suis effondrée de voir ma fille dépérir malgré tout le travail qu'elle a fourni et les bonnes notes qu'elle a obtenues.
On va devoir payer 8.000 euros de droits d'entrée et les frais à l'étranger pour que notre fille réalise son rêve le plus cher. En plus, on les a obligés à prendre une option pour faciliter leur reconversion en cas d'échec. Elle a choisi sciences. A Toulouse, "sciences" se traduit par informatique.
Elle n'aurait jamais choisi cela. Elle me dit : si j'avais su, j'aurais pris droit, je n'ai aucun goût pour l'informatique. Quand j'ai voulu m'adresser au doyen, j'ai été éconduite. On se sent méprisés. Cest un total gâchis ! Depuis le début, elles n'ont pas d'informations, tout est flou. Et pour Lola, c'est le désert. Il n'y a personne pour la soutenir. C'est "marche ou crève !".
Etudier à l'étranger, c'est la seule solution selon vous ?
Oui car elle ne se voit pas faire autre chose. Elle se sent faite pour ça. Elle essaie de se motiver toute seule pour valider le second semestre. On paie la prépa aussi pour le second semestre même si on sait qu'en France, ça ne mènera nulle part. Mais elle se dit que ça lui fera un meilleur dossier pour être acceptée au Portugal. En Belgique, ils ne prennent plus d'étudiants français, ils en sont submergés.
Tout ça est totalement injuste. La ministre parle d'égalité des chances. Il n'y en a aucune. Si on avait laissé des places aux primo-accédants, ça passait. On sait que c'est sélectif, mais là on exclut des étudiants motivés et exemplaires. On les a roulés dans la farine.
Un ami me disait qu'ils les conduisent à l'abattoir. C'est notre sentiment effectivement. C'est aussi violent que ça. C'est inadmissible et dangereux. Beaucoup craquent, dégoûtés et déprimés. On dit clairement aux autorités : laissez leur leur chance, la France a besoin de médecins !