Le juge des référés a rejeté la demande du Parquet visant à forcer les fournisseurs d'accès de bloquer les contenus du site de Joe le corbeau en raison du caractère antisémite de ses publications.
Le parquet de Toulouse avait tenté de convaincre le juge des référés d'ordonner la fermeture du site internet de "Joe le Corbeau", un dessinateur gravitant dans la sphère de Dieudonné et ayant fait des juifs sa principale cible. Le parquet, appuyé dans sa demande par le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et la Ligue contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), avait également assigné les principaux fournisseurs d'accès à internet en France (SFR, Orange, Bouygues, Numéricable, Free, SFR, Darty) pour les enjoindre de bloquer le site.
Le juge des référés a prononcé pour des raisons de pure forme la nullité de l'assignation introduite par le parquet contre le site croah.fr et ses versions antérieures. Ce dernier a encore la possibilité de faire appel ou de présenter une autre assignation en référé, plus précise sur ce point.
L'homme est suspecté d'avoir diffusé sur internet la photo d'un jeune homme effectuant une "quenelle" devant l'école juive de Toulouse Ohr-Torah (ex-Ozar-Hatorah) où Mohamed Merah a tué 3 enfants et un adulte le 19 mars 2012. Une information judiciaire a été ouverte à son encontre et Joe le corbeau a été mis en examen fin janvier à Toulouse pour "provocation à la haine raciale". Il est suspecté d'avoir diffusé la photo de la quenelle devant l'école Ohr-Torah mais pas d'être l'homme qui pose sur le cliché.
L'audience du 29 janvier
"Nous ne sommes plus ici dans la liberté d'expression, devant la production permanente, nauséabonde, d'écrits qui constituent une infraction", avait martelé le représentant du procureur fin janvier.
Les avocats de "Joe le Corbeau", de son vrai nom Noël Gérard, 32 ans, ont plaidé la nullité de l'assignation, expliquant que leur client ne savait pas ce qu'on lui reprochait puisque le parquet n'avait pas listé les écrits ou dessins justifiant la fermeture du site.
Les avocats des fournisseurs d'accès ont contesté avec vigueur et unanimité leur assignation. Ils ont expliqué en substance qu'il n'était pas de leur ressort d'empêcher de leur propre initiative l'accès à un site internet et qu'ils ne pouvaient le faire que sur réquisition de la justice. Ils sont tout disposés à fermer l'accès au site si le juge l'ordonne, avaient-ils dit. Ils ont aussi fait valoir que, contrairement à d'autres dossiers, l'auteur et l'éditeur du site incriminé était connu, localisé et avait été assigné, suggérant avec insistance au président qu'il fasse porter sur M. Gérard la responsabilité de fermer son site sous peine d'une astreinte pécuniaire élevée.
Intervenant pour le Crif et l'Association cultuelle israélite de Toulouse, Me Simon Cohen avait raillé la position des fournisseurs d'accès: "Dès lors que l'on se borne à fournir les tuyaux, on est dispensé de vérifier qu'ils ne véhiculent pas de poison?"