La société de travail intérimaire BTT, qui fournit de la main d'oeuvre aux principales entreprises régionales du bâtiment, est accusée par la CGT de loger ses salariés portugais et roumains dans des conditions indécentes. Le patron de l'entreprise dément. L'Inspection du travail a été saisie.
Le syndicat CGT de la construction a saisi l'Inspection du travail pour qu'elle intervienne sur des "conditions d'hébergement indécentes" imposées selon elle "à de nombreux intérimaires portugais sur le département" de la Haute-Garonne.Selon la CGT, Christophe Pontens, le patron de la société d'intérim BTT, fournisseur de main-d'oeuvre aux principales entreprises régionales du bâtiment, loge à une quarantaine de kilomètres au nord de Toulouse, au Burgaud, "35 ouvriers avec un seul sanitaire et une douche vétuste". Ils y vivraient "au contact des rats", dénonce le syndicat, dans la "promiscuité des pièces", empêchant "un véritable repos après de dures journées de travail".
Pour cet hébergement, "sans aucun bail ou contrat de location", 100 euros sont prélevés à chaque intérimaire par mois sur sa fiche de paie.
Le patron de BTT se défend pour sa part d'être un marchand de sommeil. Christophe Pontens évoque une "campagne de dénigrement". Il ne conteste pas loger, "pour 100 euros mensuels tout compris, eau, chauffage et électricité", ses salariés intérimaires portugais et roumains. "Chaque salarié, jure-t-il, dispose d'un bail". Et si il les loge dans deux maisons acquises au Burgaud, ce serait "pour leur rendre service", parce-qu'"aucun bailleur n'accepte de louer à des intérimaires étrangers". Bref, une sorte de philanthropie qui lui coûterait "plus en remboursement de prêt" que les quelques 3500 euros mensuels récupérés pour les 35 salariés hébergés dans ses deux maisons.
Christophe Pontens raconte également qu'un contrôle de l'Inspection du travail effectué le soir du 19 octobre ne se serait traduit "que" par la mise en évidence de "moisissures autour de menuiseries" dépourvues de "circuit d'aération". Des travaux sont, selon lui, en cours pour y remédier. Dans l'une des deux maisons, le patron logeur reconnaît bien aussi "17 personnes pour 8 chambres", avec "un seul sanitaire", "3 douches", et "quelques problèmes de branchements électriques non conformes" dûs à "un défaut de surveillance de notre part". Et puis, il y avait aussi cette chambre où "les draps n'avaient pas été changés depuis 6 mois". Mais Christophe Pontens n'est pas non plus chargé, explique-t-il, "d'aller border les intérimaires tous les soirs". Enfin, de rat, le patron de BTT n'en a jamais vu dans ses maisons, même si "on est à la campagne" et qu'une de ces bestioles "peut toujours traverser un champ. Selon Laurent Joly, le secrétaire du syndicat CGT 31 de la construction, les intérimaires auraient pourtant bien dû "fabriquer des coffrages pour empêcher les rats de pénétrer dans la cuisine".
Les deux maisons du Burgaud, remplies de travailleurs intérimaires, si elles ne sont pas insalubres seraient pour le moins dans un état de vétusté et de propreté tel qu'à la suite d'une réunion avec l'Inspection du travail, "un gardien de résidence", selon Christophe Pontens, a été recruté "pour entretenir les parties communes".
Curieux de vérifier l'état de ces "résidences", trois journalistes invités sur place par des locataires intérimaires se sont faits sans ménagement refouler mercredi soir du site par, selon leur témoignage, des "gros bras" dépêchés sur place.
Sollicitée par France 3, l'Inspection du travail n'a pas souhaité communiquer sur le sujet. De l'établissement d'un procès verbal et de son éventuelle transmission au parquet dépendront la suite judiciaire qui peut être donnée à cette affaire.
Le syndicat CGT estime pour sa part que "ces pratiques dégradantes ne relèvent pas de la seule responsabilité du dirigeant de BTT". Le syndicat met en avant la loi Savary, promulguée en juillet 2014, qui établit une responsabilité légale pour l'hébergement de leurs sous traitants des donneurs d'ordre. Parmi lesquel figurent les principales entreprises régionales du Bâtiment intervenant sur les plus gros chantiers du département de la Haute-Garonne. Souvent dans le cadre de marchés publics drapés dans des chartes éthiques et sociales.