Toulouse : rapport alarmant sur le fonctionnement du service néonatologie de l'hôpital Purpan

INFO FRANCE 3. Dans un rapport accablant, la société indépendante Socio-Scop fait des recommandations d’urgence pour le service néonatologie de l’hôpital Purpan à Toulouse en crise depuis plusieurs mois.
 

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C’est un rapport exhaustif de 252 pages élaboré par la société indépendante Socio-Scop à la demande du CHSCT de l’hôpital.
Pour rappel, durant l’été 2018 le service néonatologie de Purpan a traversé une crise sans précédent avec la décision de fermer des lits entraînant une réorganisation du service au pied levé et le transfert de bébés prématurés vers d’autres hôpitaux de la région dont celui de Montpellier.
 

"Pleurs et propos suicidaires, turn-over important, absentéisme élevé et en augmentation, stress et épuisement physique et psychologique" ont amené le CHSCT à déclencher une alerte le 18 octobre 2018 pour "l’existence d’un risque grave". La société Socio-scop a été mandatée pour élaborer le diagnostic.
 

Des salariés au bout du rouleau

Sans surprise, ce rapport révèle que "le diagnostic des indicateurs de santé et de santé au travail des agentes est particulièrement alarmant".
Ainsi l’absentéisme et les accidents du travail sont "élevés et en augmentation".
Les trois quarts du personnel considèrent que "le travail dégrade leur santé", un tiers affirme que leur santé est altérée, et plus de la moitié des personnes cumulent en même temps des symptômes physiologiques, cognitifs et émotionnels de dégradation de la santé. Plus grave, "78% réalisent parfois des actions contraires à leurs actions consciences professionnelles".  "85% disent subir des remarques de leurs proches sur leur indisponibilité à cause du travail".

Le cabinet conseille "urgemment" de prendre des mesures de prévention. Elles doivent concerner l’organisation du service, sa gestion, la dimension des effectifs, l'évaluation de la charge de travail, la charge physique et l'environnement de travail.
 

L’hôpital hors la loi

C’est l'un des points clés de ce rapport. "Le diagnostic a identifié un non-respect des normes d’effectifs d’IDE (infirmière diplômée d’Etat) requis sur la longue durée".
Exemple avec l’unité de réanimation : elle a été réalisée avec "71.7 ETP permanents pour 83.3 visés".
Fin 2019 les effectifs sont de 79 ETP.
Or, le service néonatologie est réglementé. La surveillance des nouveaux nés est normée ainsi : 1 effectif pour 2 bébés en réanimation, 1 pour 3 en soins intensifs et 1 pour 6 en soins standards. "Ce dimensionnement au plus juste n’est que rarement respecté. Le service ne parvient pas à couvrir les besoins règlementaires prescrits par la norme".
 

Conséquence : le glissement des bébés

Des nouveaux nés en réanimation sont installés dans le service de soins intensifs, ceux de soins intensifs, en soins standards.
La surveillance n’est pas continue selon le rapport. "Les patients sont accueillis dans des conditions inférieures à leurs critères d’hospitalisation". Pire, "les effectifs ne s’adaptent pas à l’état réel de l’enfant mais en fonction du lit (qui lui est stable)".
Le diagnostic est clair : "le service de néonatologie réalise une activité en réanimation équivalente à 12 lits alors que les effectifs sont dimensionnés pour 4 lits".  Conséquence ? Il existe d’avantage de nouveaux nés en soins critiques que de lits. 
 

 

La mutualisation à deux vitesses des services

Le rapport pointe une pratique étonnante : pour élaborer les factures, les unités de soins standards et de soins intensifs sont dissociées administrativement 1104 et 1106. En revanche "lorsqu’il s’agit de la gestion des équipes, les deux unités sont regroupées dans la seule unité 1106". Pour rappel, la norme prévoit un surveillant pour 3 bébés en soins intensifs et 1 pour 6 en soins standards. Une pratique donc "incohérente" selon le rapport, qui a des conséquences : "ce manque de sectorisation favorise les glissements de nouveaux nés de soins critiques sur des équipements de niveaux inférieurs". "Dans la pratique, la frontière entre les deux unités tend à s’effacer." 

Le sous équipement de l’hôpital Purpan

Le rapport démontre aussi que l’ex région Midi-Pyrénées est deux fois moins équipée que les régions limitrophes. Le sous équipement est global en réanimation néonatale. Par exemple : 14 lits de réanimation néonatale sont installés quand l’activité atteint 22 lits. Et les "recommandations en équipements précisées dans le projet médical portent à 32 lits le nombre nécessaire". Ce sous équipement est constaté depuis 2016 selon le rapport. Dans le même temps, les séjours en soins standards augmentent en Occitanie et ceux en soins intensifs augmentent aussi en particulier en Haute-Garonne.
 

Une forte augmentation du nombre de décès au service néonatologie

Le diagnostic parle de "données objectivantes". Le nombre de décès a augmenté au cours des deux dernières années. Ainsi en 2016, "on répertorie 2 décès dans le service néonatologie (uniquement à l’UNM), mais 7 en 2017 et 10 en 2018.
"Le taux de mortalité dans le service est en constante augmentation". Selon le rapport, ces chiffres confirment le sentiment du personnel "qui a le sentiment que les patients sont davantage en danger".
 

 

La spécificité de l’ex région Midi-Pyrénées et de Toulouse

Alors que le rapport démontre que le taux de prématurité de l’ex région Midi-Pyrénées est le 2ème plus élevé des ex-régions et que le nombre d’hospitalisation en néonatologie est en augmentation globale en Occitanie,  "l’ex région Midi-Pyrénées présente un des taux d’équipement en réanimation néonatale les plus faibles de France".

Purpan est le seul hôpital de niveau 3 à pouvoir par exemple accueillir des prématurés en réanimation quand il existe 3 hôpitaux de même niveaux pour l’ancienne région Languedoc Roussillon (Montpellier, Nîmes et Perpignan).
 

La direction de l'hôpital attend la réunion du CHSCT pour commenter le rapport

Contactée par France 3 Occitanie, la direction de l'hôpital précise que ce rapport doit être discuté lors d'une réunion du CHSCT le 5 février prochain et qu'elle ne peut pas faire de commentaires avant cette date. "On respecte les instances et les règles de fonctionnement. Il y a des obligations de discrétion et de secret professionnel", indique le directeur de la communication du CHU.
Il y aura le 5 février une discussion contradictoire. La direction n'est pas d'accord notamment sur le mode de calcul des effectifs requis.
"On sait que c'est un secteur qui a été en difficulté et qu'il faut accompagner", précise Dominique Soulié. "Une nouvelle gouvernance se met en place sur ce secteur. L'objectif est de l'accompagner et de le redynamiser pour en faire un leader en néonatologie."
 
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