À l’époque, il n'y avait ni Meetic, ni Tinder et encore moins "l'Amour est dans le pré". Seulement 15 % de la population possédait un téléphone. Pour aider les célibataires à trouver l'amour, le petit village d'Esparros (Hautes-Pyrénées) a l'idée de créer une foire des célibataires. 20 000 personnes participent à la première édition.
Dans les années 1960, le village d'Esparros compte seulement 240 habitants. Située à 15 km de Lannemezan dans la vallée des baronnies, la commune subit de plein fouet l'exode rural.
Plus de 500 habitants ont déjà quitté la bourgade pyrénéenne, notamment les jeunes filles. Ces dernières rejoignent la ville pour trouver un travail et souvent un mari.
À Esparros, les hommes sont contraints de rester sur l'exploitation familiale. Au total, 28 célibataires désespèrent de ne jamais trouver l'âme sœur. À l’époque, la commune n'avait plus connu de mariage depuis 4 ans.
"Si nous n'y prenons gare, nos villages vont mourir" alerte Philippe Balagna, le président du comité des fêtes du village, dans la presse locale.
Avec le maire, Charles Duthu, ils décident de lancer une "foire des célibataires" pour la Pentecôté de mai 1966.
L'idée insolite trouve immédiatement écho dans les médias. Un reportage TV sur la "vallée des célibataires" fait le tour de l'Europe.
Rapidement, des dizaines de lettres de célibataires de Toulouse, de Tarbes mais aussi de Belgique ou d'Espagne affluent à la petite mairie. Le facteur est débordé mais toutes les inscriptions sont traitées.
Le village passe de 240 à 20 000 habitants
Le Jour J, la première foire française des célibataires attire plus de 20 000 curieux. Chaque candidat et candidate à l'amour abordent une petite cocarde.
"J'ai l'espoir de rencontrer le bonheur que je cherche. Je vais essayer de récupérer quelques adresses pour leur écrire"
Un participant célibataire
Les regards se croissent, le bal rythme les premiers échanges, les mains s'enlacent et quelques couples se forment au fil de la journée. Malgré une intimité toute relative, la première édition est un succès selon les journalistes présents.
Ce "speed-dating" des champs va durer 50 ans
L'année suivante en 1967, Esparros rebaptise l'événement en "kermesse des célibataires". Les participants restent majoritairement des hommes mais les femmes répondent présentes. Elles sont une soixantaine lors de cette deuxième édition.
Mes impressions sont bonnes. Beaucoup de monde, beaucoup de maris peut-être.
réagit une célibataire.
"Je cherche un homme grand, brun et sportif" avoue une autre participante.
Dans les années 1970 et 1980, la kermesse perdure. Elle devient peu à peu, une grande fête où les hommes et les femmes viennent s'amuser, rire, danser et trouver éventuellement le grand amour.
Au total, une trentaine de rencontres se termine en mariage.
Au même moment, Esparros lance un jumelage avec la commune espagnole Plan. Cette dernière vient de créer sa première "fiesta de los solteros".
Malgré les applications de rencontres et Internet, le village continue dans les années 2010 à créer du lien et du partage entre célibataires. En 2016, la mairie organise les 50 ans de sa fête.
Le concept s'achève en 2018 avec une dernière édition intitulée "Solos mains dans la main".