Témoignages. "Je veux alerter sur les mécanismes d'emprise" : la descente aux enfers d'Emeline sous la domination d'un "prédateur" au point de se suicider

Publié le Mis à jour le Écrit par Cécile Frechinos

Depuis le suicide de sa fille, Emeline, en janvier 2024, Marie François se bat pour que celle-ci soit reconnue victime d'harcèlement moral ayant entrainé la mort. La mère de famille tarbaise espère voir l'ancien compagnon de sa fille comparaître devant une cours d'Assise. En attendant elle souhaite aussi alerter sur les mécanismes insidieux de l'emprise. Une marche blanche aura lieu samedi 1 juin à Tarbes en mémoire d'Emeline.

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 " Elle ne venait plus nous voir. Elle ne me téléphonait plus. Et pourtant nous étions si fusionnelles avant" : Voilà les paroles d'une mère qui aurait voulu comprendre plus tôt. Comprendre pour éviter le pire. En janvier 2024, Emeline Françoise, sa fille cadette, se donne la mort après deux ans relations ponctuées de violences physiques et psychologiques. " C'est seulement maintenant en dénouant le fil de notre histoire que tout s'éclaire", se désole la mère de famille des Hautes-Pyrénées. 

Un comportement inhabituel

L'isolement, les mensonges, les problèmes d'argent. Dès les prémisses de la relation entre Emeline et son nouveau compagnon, le comportement de la jeune femme est inhabituel : " Au départ c'est impossible de comprendre ce qui est train de se tramer. Seuls ceux qui ont approché de près ces mécanismes d'emprise peuvent comprendre", explique Marie François. Aujourd'hui la mère de famille veut alerter l'opinion publique pour éviter d'autres descentes fulgurantes aux enfers.

Des appels au secours 

Pour Emeline François, le début du drame se tisse à l'automne 2022. Lorsqu'elle rencontre Pierre*, elle s'éloigne rapidement de sa famille, pourtant unie et aimante. Mais régulièrement elle appelle au secours sa maman. 

Elle me disait qu'il était violent. Qu'il l'interdisait de sortir. Qu'il lui retirait son téléphone portable. Puis elle se ravisait et nous expliquait que c'était de simples disputes de couple.

Marie François, mère d'Emeline

Des violences physiques et psychologiques auxquelles va s'ajouter la consommation de drogues dures : "Il l'a rendue accro au crack. C'est l'une des drogues les plus addictives qu'il y ait. Jamais ma fille n'avait touché à ce genre de stupéfiants auparavant", souligne la maman endeuillée. 

Tentée d'échapper à son calvaire

Isolée, violentée, droguée. Émeline tente de s'échapper de son calvaire à plusieurs reprises. Et ses parents répondent alors toujours présents. Mais à chaque tentative " le prédateur" comme le nomme Marie François, rattrape sa proie : "Il trouvait toujours un moyen de la joindre, notamment sur les réseaux sociaux et lui promettait de changer" se souvient Marie François. 

En Mai 2023 Marie François envoie une lettre au procureur de la République de Tarbes : " Je lui ai expliqué que ma fille était en danger de mort". Malgré les plaintes déposées par sa fille et le lourd passé judiciaire de Pierre, l'affaire est classée sans suite, faute de preuves. 

Nous nous sommes sentis seuls au monde, ma fille, mon mari et moi.

Marie François, mère d'Emeline

Des preuves, c'est ce que collecte sans relâche Marie François depuis le suicide de sa fille. Une mission qui lui donne le courage de se lever le matin. 

Harcèlement moral ayant entraîné la mort 

"Je n'ai pas encore entamé le processus de deuil. Pour l'instant je me bats pour que ma fille soit reconnue victime d'harcèlement moral ayant entraîné la mort. Je ne lâcherai pas", affirme-t-elle déterminée. Pierre a pourtant déjà été condamné par la justice en mars dernier. Il a écopé de 6 mois de prison ferme pour violences conjugales. Une peine aménagée grâce à un bracelet électronique. 

"Les violences conjugales sont une chose. L'emprise et le harcèlement moral en sont une autre" souligne fermement la mère de famille. Et d'ajouter : " Aujourd'hui je veux dire aux victimes d'emprise de ne plus avoir peur. Elles ne sont pas seules. Elles doivent parler et la société doit les aider". 

 Pierre* : prénom d'emprunt

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