La campagne de pêche annuelle des thoniers senneurs débute le 26 mai. Pour limiter tout risque de contamination à bord, chaque armateur a mis en place des procédures sanitaires. Les équipages pourront être testés au Covid-19 avant leur départ.
C’était une demande des armateurs de la région et de la SATHOAN ("Sardine-Thon-Anchois", la coopérative de pêche de Sète) : permettre aux équipages des 22 thoniers senneurs de Méditerranée de bénéficier d’un dépistage avant le départ.
Le 12 mai 2020, l’Etat a donné son feu vert : les marins pourront accéder aux fameux tests virologiques RT-PCR, préconisés pour établir le diagnostic de la maladie Covid-19, comme indiqué dans ce communiqué de la direction des Affaires Maritimes :
Pour accéder au dépistage, les armateurs devront fournir un document à leurs marins attestant d’une période d’embarquement en mer supérieure ou égale à sept jours. Ils devront aussi prendre en charge le coût des tests.De manière dérogatoire au "Protocole National de Déconfinement dans le cadre du Travail" publié le 5 mai 2020, la Cellule interministérielle de crise (CIC) a validé le 12 mai 2020 la possibilité pour les armateurs de procéder à des tests RT-PCR pour tous les marins qui vont embarquer pour une durée supérieure ou égale à 7 jours.
L'horizon s'éclaircit pour les thoniers
Pour les quatorze membres d’équipage du "Gérard Luc IV", le rendez-vous est pris pour lundi 18 mai dans un laboratoire d’Agde. Après les doutes et les inquiétudes liés à la crise sanitaire, l’horizon s’éclaircit pour Luc Buono l’armateur de ce thonier senneur agathois.Dès l’obtention du résultat, soit 24 à 48 heures après le test PCR, les marins seront confinés à bord du bateau. Soit quatre à cinq jours avant le départ, prévu – selon la météo – le 23 ou 24 mai.Les matelots travaillent depuis début mai avec des masques, gants et gels hydroalcooliques... Lundi, ils se font dépister ! On a convenu ensemble qu’il fallait réduire les contacts avec l’extérieur pour éviter toute contamination avant le départ.
Les observateurs également testés
Mais comme tous les ans, ils ne seront pas seuls à bord. Un observateur international chargé de vérifier le respect des procédures qui encadrent la pêche au thon rouge, devra les accompagner. Cette année, c’est un observateur Espagnol qui a été affecté sur le "Gérard Luc IV". Même si les tests seront pratiqués sur la base du volontariat, cet observateur devra se plier à l’exercice : "Il doit arriver le 18, il sera donc testé en même temps que mes marins. La première voire les deux premières nuits, tant que l’on n’aura pas le résultat... il ne montera pas à bord ! Je le loge à l’hôtel !" précise Luc Buono.C’est que pour ces bateaux de quarante mètres, la campagne n’a lieu qu’une fois dans l’année, sur une période très précise (26 mai au 1er juillet 2020). Le plus souvent, le quota est atteint en quelques jours.
Bertrand Wendling, directeur général de la Sathoan, tente lui aussi de prévenir plutôt que guérir, pour aider les 14 thoniers membres de la coopérative des pêcheurs de Sète. Il précise :
Bertrand Wendling précise aussi qu’un pool d’observateurs "remplaçants" a été constitué au cas où les premiers seraient infectés.La Sathoan a acheté 20 000 masques FFP1 et FFP2. Les observateurs qui arrivent entre le 15 et 23 mais seront confinés et testés. Chaque armement respecte les règles et les consignes des affaires maritimes et met parallèlement en place ses propres procédures.
Qu’adviendrait-il si un marin était contaminé ?
Selon Thierry Sauvage, chef du "Service de Santé des Gens de Mer" : "C’est la télémédecine qui est pratiquée dans ces cas-là entre le capitaine - qui a reçu une formation - et le centre de consultation médical maritime, une unité spécifique qui dépend du SAMU de Toulouse. Au cas où le malade présente des signes de gravité, il pourra être évacué en déroutant le bateau vers le port le plus proche ou par hélicoptère si c’est une urgence vitale."Laurent Cassius, administrateur des affaires maritimes de l’Hérault et du Gard, est catégorique : "Il n’y a qu’à observer ce qui s’est passé sur le porte avion Charles de Gaulle ! Il est probable que le bateau soit obligé de rentrer en France mais la campagne ne sera pas perdue pour autant, le thonier a jusqu’à début juillet pour repartir avec d’autres marins... Et au pire, des transferts de quotas sont toujours possibles entre les bateaux qui pratiquent des pêches conjointes."S’il y a un malade à bord, à mon sens c’est tout l’équipage qui est contaminé !
Après l’aspect sanitaire, l’aspect économique
Mais après les incertitudes liées à la crise sanitaire, une autre inquiétude se dessine. Les pêcheurs à la senne s’inquiètent du prix de vente du thon. Les japonais sont les principaux clients des mareyeurs, et avec le Coronavirus et leur confinement, leur consommation a fortement baissé. Luc Buono qui pêche essentiellement dans le secteur des Baléares est fataliste : "Nous verrons en retour de campagne." Une fois les captures réalisées, le thon est transféré dans des cages qui sont remorquées dans des fermes d’engraissement le plus souvent en Espagne. Ce sera alors l'heure de faire les comptesLuc Buono a repris l’affaire familiale en 2014. Comme pour la plupart des armateurs de la région Occitanie, il travaille avec ses proches. En l'occurence, son père, son beau-frère et son cousin. A la veille de sa septième campagne en tant qu’armateur, il se concentre sur l’essentiel : acheter les denrées alimentaires pour nourrir l’équipage à terre et en mer. Les filets, eux, sont déjà à bord, prêts à se déployer pour capturer le "Thunnus thynnus", ce thon de Méditerranée à la chair si goûteuse.
Tout est donc fin prêt... Top départ le 26 mai !