Vendredi, les 53 salariés de l'entreprise de transport de colis FG Express à Lunel, dans l'Hérault, ont appris par mail leur licenciement et le dépôt de bilan de leur entreprise. Un cas symptomatique de la situation dans les sociétés sous-traitantes du secteur de la messagerie aux particuliers.
C'est par un mail que Hassine Abdelkader, Mohamed Yaqoubi et les 51 autres salariés de FG Express ont appris vendredi leur licenciement et le dépôt de leur entreprise, un sous-traitant de Chronopost, dans la livraison express. Ils n'ont pas été payés depuis fin décembre.
Hassine Abdelkader, 34 ans, travaillait pour FG Express depuis deux ans. "Ce sont eux qui sont venus me chercher. J'ai beaucoup donné. Je suis déçu, cette histoire me ronge. J'ai envie qu'ils comprennent ce qu'ils sont en train de nous faire vivre. On a nos enfants, nos familles..." .
70 à 80 heures certaines semaines
Il pointe des conditions de travail désastreuses : "C'est de la folie, plus on est performant, plus on va nous demander. Ca ne s'arrête jamais. Si on n'est pas content, on va voir ailleurs. On fait énormément d'heures, 70-80 au lieu de 35 heures, du lundi au samedi. Selon le transporteur, ce sont des colis très lourds, j'ai eu plusieurs fois le dos bloqué. C'est impossible que je fasse ça toute ma vie."
Si le travail est fait et rapidement, aucun problème. La donne change lorsque la charge devient trop importante. "Je ne peux plus travailler chez des donneurs d'ordre parce qu'ils ne veulent plus de moi.", poursuit M. Abdelkader. Sans oublier qu'ils sont constamment tracés, avec des puces installées sur les camions. Il pense à une possible réorientation. Mais avant tout veut récupérer le salaire qui lui est dû.
"Les donneurs d'ordre sont les premiers responsables"
Mohamed Iacoubi est désormais un ex-salarié de la société FG Express depuis trois ans et a travaillé pendant 6 ans pour donneur d'ordre Chronopost via des sous-traitants.e les professionnels. Le militant CGT depuis 2015 dénonce le rôle des entreprises donneuses d'ordre comme Chronopost, DPD, TNT, UPS. "Ce qu'on vit chez FG Express, ça se passe dans les autres entreprises sous-traitantes. On engraisse les actionnaires et le sous-traitant tire les salaires vers le bas. Tout est lié, les donneurs d'ordre sont les premiers responsables. J'ai fait une pétition il y a un an pour dénoncer des manques sur les salaires et des retards de paiement, le patron de Chronopost n'a pas bougé le doigt et a voulu me licencier."
Guillaume Griveau, secrétaire général du syndicat départemental de la CGT FAPT (Activités postale et télécommunication) de l'Hérault, va même jusqu'à faire référence à Germinal d'Emile Zola, publié en 1885. "Les donneurs d'ordre sont organisés de la même manière : 5 % de leurs transporteurs sont leurs employés, 90 à 95 % sont des sous-traitants avec contrats tirés vers le bas et des conditions de rémunération qui dépendent du volume de courrier distribué. Les marges que se font les donneurs d'ordre conditionnent les conditions de travail des salariés." Ces entreprises sous-traitantes, souvent de petites structures, n'ont pas de représentation salariale.
"Créer un rapport de forces"
La CGT invite les salariés du secteur de la messagerie vendredi à 16 heures à la maison des syndicats de Montpellier. Objectif : construire une alternative "pour inverser les tendances et créer un rapport de forces pour avoir des conditions de travail décentes" pour Guillaume Griveau.
Jointe par téléphone, Chronopost dit faire appel à des sous-traitants lors de fortes variations d'activités sur une période ou un territoire. Pour la CGT au contraire, le recours aux sous traitants est structurel et non ponctuel. Dans le secteur de Montpellier, 30 à 40 entreprises sous-traitantes emploient près de 400 chauffeurs.