Lunel : l'arrêté contre les crachats dans la rue "pour lutter contre le Covid", une évidence ou un coup de com' ?

La ville de Lunel vient de prendre un arrêté pénalisant les crachats sur la voie publique : les contravenants devront s'acquitter d'une amende de 38 euros. Pour justifier la mesure, le maire avance l'argument sanitaire. Réelle nécessité en temps de Covid-19 ou coup de communication ? 

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Le maire de Lunel Pierre Soujol a pris un arrêté interdisant les crachats sur la voie publique. Toute infraction à cette nouvelle règle sera pénalisée à hauteur de 38 euros. 

Chez les commerçants du centre-ville, la mesure surprend et amuse. "Lunel n'est pas toujours très propre, c'est vrai : il n'est pas rare de tomber sur de la "pisse de chien" mais les crachats, ça ne me semble pas très courant", nous confie-t-on dans une auto-école, située boulevard de Strasbourg. 

Lire l'arrêté du maire de Lunel contre les crachats dans la rue

À 500 mètres de là, avenue Gambetta, même constat chez ce coiffeur : "Là où je suis situé, ce sont surtout des femmes qui passent pour aller chercher les enfants à l'école et je suppose que ce ne sont pas celles qui crachent le plus. Donc pour ma part, ce n'est pas un phénomène que je remarque".

Le propriétaire d'une boucherie sur le Cours Gabriel Péri tient lui aussi le même discours. 

Je n'ai jamais croisé des gens qui crachaient à tout va dans la rue. Et pourtant, on y fait attention car en tant que commerçant, on n'a pas envie que quelqu'un crache devant notre magasin !

Le propriétaire d'une boucherie sur le Cours Gabriel Péri à Lunel.

L'argument sanitaire avancé

Dans un communiqué de presse, la mairie souligne non seulement le caractère "dégoûtant" et "impoli" des crachats dans la rue, mais explique que ces incivilités sont encore plus problématiques en temps d'épidémie.

"On est tous en chaussures, on marche dans la rue, on croise le crachat d'un impoli et on rentre chez soi... peut-être le virus collé aux semelles", avance Pierre Soujol, qui ajoute que sa nouvelle mesure est "destinée à lutter contre la propagation du coronavirus".

J'estime qu'en cette période, il était important de rappeler cette règle sur notre ville. Je pense que les gestes barrières s'accomplissent aussi par ce type d'acte.

Pierre Soujol, maire de Lunel.

Pour le médecin lunellois Thierry Martinez, chaque petite initiative contre le Covid-19 est bonne à prendre. Mais dans ce cas précis, il doute de l'efficacité de la règle. "En ce qui concerne la propagation du virus ça ne va vraiment pas changer grand-chose." Il poursuit : 

Quand vous crachez, vous rejetez effectivement une forte quantité de particules. Ce sont souvent les personnes avec des mucosités qui crachent, mais lorsqu'elles le font, c'est généralement par terre. Or, pour que les particules se répandent, il faut qu'elles restent un minimum en suspension dans l'air.

Thierry Martinez, médecin à Lunel.

D'autres spécialistes, comme le docteur Gilles Jebrak, pneumologue à l’hôpital Bichat de Paris, sont plus mesurés. Interrogé par le site Destination Santé en mai 2020, il estime qu'"un crachat est rarement stérile", car "les voies respiratoires, en particulier les bronches, peuvent héberger des virus". Des bactéries peuvent également se transmettre par voie aérienne.

Cet arrêté est-il réellement utile ?

La question se pose ! En effet, le décret du 22 mars 1942 (article 74-8) interdit encore aujourd'hui les crachats sur la voie publique. Les contravenants s'exposent là aussi à une amende de 38 euros. À l’origine, ce texte a été émis pour lutter contre la transmission de la tuberculose.

Quelques décennies plus tôt, au début du XXème siècle, la maladie était déjà très répandue. Une affiche avait été placardée dans les écoles de l'ouest de la France pour ordonner aux élèves de "ne pas cracher" et de ne pas "essuyer les ardoises en crachant dessus ou en y portant directement la langue". 

L'histoire du crachat et de son interdiction n'est sans doute pas inconnue du maire de Lunel : cet arrêté serait-il donc un coup de com' ? 

Pour l'édile, rien de tout ça : dans son communiqué, il semble presque exaspéré de devoir faire une piqûre de rappel à ses administrés. "Le plus extraordinaire dans cette situation, c'est qu'aujourd'hui une ville comme Lunel soit dans l'obligation de prendre un arrêté pour rappeler à certains le plus élémentaire des comportements à avoir quand on vit en société : on ne crache pas dans le rue", conclut-il.

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