2e jour de procès : les victimes racontent leurs vies brisées et leur sentiment d'abandon

Les victimes de l'accident de la démonstration du 3e RPIMa de Carcassonne ont raconté leur vie brisée par les rafales d'une arme automatique en exprimant un sentiment d'abandon, jeudi au deuxième jour du procès devant la chambre militaire du tribunal correctionnel de Montpellier.


Il y a presque cinq ans, l'ex-sergent Nicolas Vizioz, qui comparaît avec cinq autres prévenus, avait blessé 16 personnes en tirant à balles réelles lors d'une journée portes ouvertes du 3e régiment de parachutistes d'infanterie de Marine (RPIMa).

Se déplaçant difficilement, Valérie Rosala, s'avance à la barre avec des béquilles. Mais elle ne peut tenir debout et s'installe finalement sur le banc des avocats pour témoigner. En larmes, elle détaille ses blessures et celles de son fils. "Mon genou a explosé, j'ai eu une artère sectionnée. On m'a posé une prothèse qu'il faudra changer d'ici une dizaine d'années. Peut-être devra-t-on amputer.
J'ai déjà une douleur d'amputation, des douleurs permanentes", explique-t-elle.
L'émotion est trop forte, la parole s'étrangle. "Mon fils, 11 ans, a toujours une balle logée dans la région pulmonaire. Il a des douleurs intercostales. Il ne peut pas faire de sport", ajoute cette mère qui s'est sentie abandonnée par l'armée.
La vie de cette famille a été brisée par le drame. Partenaire financier du weekend de démonstration, son mari est en dépression. Sa fille a échappé aux balles mais supporte le quotidien de ses proches: "Ma vie s'est arrêtée ce 29 juin", dit Jennifer Rosala, étudiante en droit, "victime psychologique" d'un accident qui l'a obligée à prendre en charge "une famille de blessés" a constaté le reporteur de l'AFP.

Julie Gaymard et son fils ont vécu '"invraisemblable"

Blessée, comme son fils Gabriel, 2 ans et demi au moment des faits, Julie Gaymard, évoque aussi un sentiment d'abandon. "Vous, vous vivez avec, nous on est condamné à vivre avec. Les victimes, c'est nous", lance-t-elle à des prévenus qui se plaignent de leur sort.
Depuis le drame, elle vit un vrai cauchemar. Son bambin a gardé un éclat dans le poumon, non loin du coeur, que les médecins ne peuvent enlever pour l'instant. Sauf urgence: s'il occasionne des saignements.

Aussi, tous les matins, quand elle lève son enfant, c'est avec une appréhension immense qu'elle soulève les draps. Pourtant elle ne parle pas de haine: "Il n'y a pas la place, tellement il y a de chagrin".
"Mon fils m'a dit de dire à celui qui lui a tiré dessus qu'il est en colère non pas contre lui, mais contre l'état dans lequel il est", ajoute la mère, qui voit ces anciens soldats "si musclés", alors que son fils "ne le sera jamais".

Jean-Jacques Roland vient lui aussi parler au nom de son fils, Rémi, 15 ans. Et de ses deux éclats dans les membres inférieurs. "On a entendu les éloges de l'élite et du prestige. C'est invraisemblable, inimaginable", déplore-t-il.

L'audience suscite un certain agacement parmi les parties civiles. Certes, Nicolas Vizioz, qui pleure, a reconnu sa responsabilité. Mais il leur est difficile d'entendre les officiers se plaindre des sanctions infligées par leur hiérarchie.

Lorsque le chef de corps de l'époque, l'ex-colonel Frédéric Merveilleux du Vignaux - il a démissionné et travaille à l'ONU - critique l'État-major, il y a comme une incompréhension. Mais il ne se dédouane pas: "Je suis responsable car j'étais le chef de corps. Je ne sais pas comment, la justice décidera", dit-il aux victimes, avant de demander au président du tribunal: "Je ne sais pas quels sont vos moyens mais faites en sorte de les aider".

Montpellier : 2e jour du procès du 3e RPIMa - les militaires et les victimes à la barre

 

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