Que se passera-t-il au lendemain de la Présidentielle ? Nous nous projetons vers les Législatives de juin. Le FN peut gagner des duels. La France Insoumise lutte pour maintenir son électorat. Les Macronistes à l’épreuve du monde réel. Les Républicains et le PS en figurants ? Projection.
« Une campagne, deux élections ». Ce slogan des amis de Jean-Luc Mélenchon prend aux lendemains de ce 1er tour de l’élection présidentielle un accent singulier. Dans la mesure où les résultats démontrent une redistribution du vote et un éclatement d’un système ancien, l’automaticité d’une majorité offerte au président de la République peut être interrogée. Notamment en région Languedoc-Roussillon, où le Midi Rouge est une appellation désormais appartenant au passé.
La permanence du vote frontiste, sa structuration tant dans le monde rural que dans le périurbain soulignent une adhésion à ses thèses. La logique d’insécurité culturelle alimentée par une industrie en voie de disparition et la capture de la défense des services publics finissent par installer le FN comme force incontournable. Cette installation est d’autant plus aisée que le militantisme Républicain a déserté des pans entiers du territoire. Le Front National est en train de faire aux Républicains dans la région ce que le PS fit au PCF dans les années 1970 : lui voler son électorat.
Cette réussite qui bute encore sur le système électoral, un scrutin majoritaire à deux tours, pourrait bien dessiner à terme le déplacement des élites locales de droite vers le parti de Jean-Marie Le Pen. L’appartenance au FN et l’affirmation de celle-ci sur la place publique ne sont plus désormais un motif de réprobation. Au contraire, elles bénéficient d’une certaine bienveillance démontrant l’échec de tout aspect moralisant dans l’affrontement avec le Front National.
Le FN peut espérer des députés de 6 à 9
Stabilisé à des niveaux élevés, le parti de Marine Le Pen devrait aborder le premier tour des élections législatives avec force et ce d’autant plus que l’on peut considérer que la plus faible mobilisation électorale pourrait concernée davantage les électeurs de Jean-Luc Mélenchon. La question reste de savoir si nous serons proposés des duels ou des triangulaires dans la mesure où l’imposition des 12,5% pour se qualifier pour le second tour reste rédhibitoire. Les triangulaires devraient favoriser le FN…Dans le cas de certains duels, la victoire du FN est une hypothèse sérieuse : PO (1et2), Gard (1et2), Hérault (6,8 et 9), Aude (1et2).
Evidemment, la mise en avant d’une telle permanence conduit, à rebours, à minimiser les opportunités des Républicains. Confronté à une difficulté dans le renouvellement de ses cadres et à la lisibilité de sa ligne politique, le mouvement du Président Sarkozy doit rapidement inventer un leadership national pour limiter les dégâts. Sa survie politique en région dépend, paradoxalement, en partie de la gauche.
Une gauche ? Non, des gauches…
On veut dire en cela que la gauche est aujourd’hui éparpillée en plusieurs morceaux. D’un côté Emmanuel Macron –dont la pureté idéologique héritée du Sartrisme interdit à une grande partie de cet électorat de le classifier à gauche- et de l’autre Jean-Luc Mélenchon. Au milieu, dans une réalité touchant à une anémie préoccupante, le Parti Socialiste.
Emmanuel Macron a promis de renouveler le personnel politique. Soit. Mais l’irruption de nouveaux candidats si séduisants, peut-elle être, avec un capital notoriété inexistant présente des désavantages. En outre, le profil sociologique pourrait monter une diversité bien peu présente (sur-répresentation des classes moyennes supérieures) et peu susceptible d’interpeller les classes populaires. Par ailleurs, l’apprentissage du pouvoir, en cas de victoire de l’ancien ministre des Finances, appellera immanquablement des luttes intestines dans un appareil naissant dont la situation à Montpellier (entre les Saurelistes et les Macronistes de la première heure) laisse entrevoir déjà des guerres picrocholines. Le pouvoir a des règles que nul ne saurait ignorer par angélisme…
Mélenchon : des électeurs intermittents ?
Enfin, dans bien des circonscriptions, lors de ce premier tour, Jean-Luc Mélenchon a fini en Languedoc-Roussillon devant Emmanuel Macron. C’est ici la question essentielle pour les élections qui viennent. Tout d’abord la mobilisation pourrait être moindre. L’électorat populaire pourrait être plus tenté par l’abstention qui appartient à son patrimoine politique. Par ailleurs, la personnalisation de la campagne mélenchonniste pourrait être un écueil. Afin d’en limiter les effets négatifs, le candidat de la France Insoumise devra occuper encore la scène médiatique, s’emparer de la rue pour ces législatives. Son but : que ce capital électoral soit pas neige au soleil. Enfin, et ce n’est pas la moindre des difficultés, tous ces conglomérats de partis et mouvements réunis sous la bannière de la « France Insoumise » devront trouver des accords pour ne pas multiplier les candidatures sur les mêmes circonscriptions. Pas simple quand on sait que l’élection des députés offre du financement public.
Enfin, le Parti Socialiste est dans une impasse. Il lui faut trouver des accords sinon il ne restera plus aucun parlementaire. Même en 1993 où seul un député PS fut reconduit (Henri Sicre à Céret) la situation était moins désespérée.
Le Midi bouge….