A Montpellier, des clients s'indignent d'avoir pu acheter des masques qui se sont avérés non homologués, en simple épaisseur et en polyester, lavables mais à 40°C, dans des supermarchés et chez des buralistes. Système U les a retirés. Mais les buralistes assument. Pour eux, tout est légal.
A Montpellier, la polémique enfle autour de masques non homologués mis en vente dès la semaine dernière dans au moins un surpermarché et chez une dizaine de buralistes de la ville.
Des masques faits d'une simple épaisseur de polyester, et non pas de coton, et lavables seulement à 40°C et non pas 60, à en croire le mode d'emploi lisible sur les photos mises en ligne par des clients mécontents et relayées par le journaliste Brice Ivanovic sur son compte Twitter.
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— Brice Ivanovic (@bi1192) May 3, 2020
Masques "grand public" : le risque du grand n'importe quoi ?
À Montpellier, un ami à voulu se procurer un de ces fameux masques vendus dans les bureaux de tabac à 4€. pic.twitter.com/jZjePADhb6
Pour les buralistes, "pas de tromperie sur la marchandise"
Mais pour Jérémy Pézières, président de la chambre syndicale des buralistes de l'Hérault, c'est tout-à-fait légal :
J'ai été informé le 1er mai par un buraliste qui m'a dit que certains clients avaient achetés chez des confrères des masques non homologués. J'ai appelé ces débitants et j'ai eu aussi le fournisseur, tout est clair : l'ensemble des clients sont prévenus, ces masques sont en démonstration, ils peuvent juger eux-mêmes des produits et décider s'ils veulent en acheter ou pas, mais ils savent qu'ils ne sont pas homologués, il n'y a pas d'amalgame.
Certains ont refusé de les vendre
Vendus 4 € l'unité et 15 € les 5, ces masques "peuvent intéresser certains clients, vu l'engouement", selon Jérémy Pézières. Lui a préféré ne pas en vendre :
J'ai refusé de vendre ces masques, dont j'ai reçu par mail la proposition commerciale. Je ne sais pas comment le fournisseur a eu accès à tous ces contacts. On reçoit beaucoup de propositions de ce type en ce moment, il faut faire très attention, vérifier les références SIRET et SIREN de l'entreprise, si elle s'acquitte de la TVA intracommunautaire, ce qui était d'ailleurs le cas de cette société, tout était en règle.
La tentation de satisfaire une demande exponentielle
Jérémy Pézières a choisi de passer commande à un fabricant de Picardie dont les masques sont certifiés AFNOR et filtrent 70% de particules : "le réseau des buralistes en est approvisionné depuis jeudi". Vendus 5 € l'unité, ces masques-là étaient déjà épuisés dès samedi. D'où la tentation de certains de se tourner vers d'autres produits pour satisfaire une demande exponentielle.
Car le président de la chambre syndicale des buralistes de l'Hérault est affirmatif :
Il n'y a pas de réglementation là-dessus, on peut vendre des masques non certifiés.
Système U les retire de la vente
Également achetés par le magasin Super U du quartier des Grisettes à Montpellier, ces mêmes masques non homologués, provenant du même fournisseur, ont été retirés de la vente dès l'affaire éventée, à la demande du groupe Système U :
Nous, on ne cautionne pas. Nous sommes une coopérative d'indépendants qui cotisent en échange de services et de produits, donc les patrons de chaque magasin peuvent prendre des initiatives et acheter les produits qu'ils veulent. Mais on les avait mis en garde sur les normes.
Une initiative isolée ?
L'initiative de l'enseigne montpelliéraine serait donc isolée. D'autant que Système U précise avoir livré à ses magasins des masques homologués dès la semaine dernière :
On a fourni des masques de type chirurgical autorisés à la vente depuis hier. Ils sont vendus 58 centimes l'unité et ont été livrés la semaine dernière en fonction d'une clé de répartition qui dépend de la taille du magasin. Nous en avons 10 millions. Chaque magasin en avait donc à disposition dès ce lundi matin.
Cependant, les patrons de magasin peuvent compléter cette offre en se fournissant ailleurs. L'enseigne précise qu'elle ne sait pas combien de masques non homologués ont été vendus à Montpellier, ni à quel prix.
Fournisseur local de l'Hérault
Le fournisseur, dans son bon de commande envoyé aux détaillants, spécifie bien que ses masques sont en polyester et "destinés à un usage non médical". Mais aucun taux de filtration n'est indiqué.
Doutes sur la provenance des masques
Cette entreprise de l'Hérault, spécialisée dans l'imprimerie et la publicité, et dont ce n'est donc pas le cœur de métier, ne fabrique pas elle-même les masques qu'elle vend. Ils seraient importés via l'Italie, sans que l'on sache à ce stade où ils sont confectionnés. Comme le dit Jérémy Pézières : "ce sont des opportunistes".
Quelle réglementation ?
Concernant la réglementation en vigueur, les contrôles et les éventuelles sanctions encourues, nous avons demandé un éclairage à Direction Départementale de la Protection des Populations de l'Hérault. Nous attendons sa réponse. Nous ignorons également si une enquête a été diligentée sur cette affaire.