Alors qu’Emmanuel Macron devrait annoncer ce mardi soir un assouplissement des mesures de restriction liées à la crise sanitaire, l’épidémiologiste montpelliérain Mircea Sofonea alerte sur le risque de rebond de l’épidémie en cas de relâchement.
Comme de nombreux français, Mircea Sofonea, maître de conférences en épidémiologie et évolution des maladies infectieuses à l’université de Montpellier, sera suspendu aux annonces d’Emmanuel Macron ce soir. L’épidémiologiste craint un relâchement des mesures, alors que le chef de l’Etat cherche un équilibre périlleux entre assouplissement du confinement pour permettre la préparation des fêtes de fin d’année, et maîtrise de la crise sanitaire.
Le gouvernement envisage une « adaptation du confinement » à partir du 1er décembre. Est-ce trop tôt ?
"Si on entend par là un vrai relâchement des mesures de restriction, oui, il est trop tôt. On est actuellement dans une période qui favorise la transmission du virus : le froid, la promiscuité à l’intérieur de milieux clos, ajouté à cela le contexte des fêtes avec des réunions familiales où les gestes barrières sont souvent oubliés …Je sais que c’est difficile à entendre, mais il faudrait maintenir les restrictions durant plusieurs semaines, y compris la période de fêtes, pour voir baisser le nombre d’entrées en réanimation et ne pas prendre le risque qu’il reparte à la hausse.
Même sans relâchement des mesures en décembre nos prévisions indiquent qu'il faudrait attendre janvier 2021 pour revenir à une occupation des lits de réanimation similaire à celle de mi-octobre."
Toujours selon cette tendance, donc sans relâchement en décembre, il faudrait attendre janvier 2021 pour revenir à une occupation des lits en réanimation similaire à celle de la mi-octobre. 4/n pic.twitter.com/awPAtfKAIH
— ETE Fr (@ete_fr) November 20, 2020
Le deuxième confinement n’a-t-il pas été assez efficace ?
"Ce deuxième confinement est clairement un aveu d’échec, dans le sens où il aurait pu être évité. Dès la mi-juillet, les équipes du laboratoire MIVEGEC dont je fais partie, ont prévenu que les indicateurs laissaient présager une deuxième vague. Le gouvernement aurait dû agir plus tôt, avec des mesures localisées comme une limitation de déplacements au niveau des villes les plus touchées, ou des campagnes de dépistage massif dans ces endroits-là. Et avec ce deuxième confinement moins strict que le premier, le nombre de cas positifs diminue plus lentement. Selon nos évaluations, on sera toujours aux alentours de 10 000 cas par jour au 1er décembre."On se dirige donc vers une troisième vague ?
"On estime actuellement que seuls 10 % de la population a rencontré le virus et est donc immunisé. Le seuil d’immunité collective est de 25 % si on continue de vivre avec les gestes barrières, comme le masque et la distanciation, et de 50 à 60% si on veut vivre normalement. On n’y est donc pas du tout. Même si on sort correctement de cette deuxième vague, ce qui n’est déjà pas gagné, l’hiver et le printemps sont des saisons où le virus circule activement. Tous les ingrédients pour une troisième vague sont donc là.Si les mesures continuent d’être appliquées, l’épidémie devrait s’essouffler doucement jusqu’à l’été, et on pourra se relâcher à ce moment-là parce qu’on vivra plus à l’extérieur, mais pas avant."Si le président annonce des mesures trop laxistes ce soir, ce n’est même pas une troisième vague qui nous attend, c’est la suite de la deuxième, avec un grand pic en janvier.