La communauté gitane, qui vit dans le quartier de La Paillade à Montpellier, reste très inquiète malgré l'arrestation du jeune homme soupçonné d'avoir mortellement fauché le jeune Aymen, après la victoire de la France contre le Maroc, en Coupe du monde de football. Entretien avec Fernand Maraval, l'une des figures de la communauté gitane.
Après quasi deux semaines de cavale, le jeune conducteur qui avait fauché le jeune Aymen mercredi 14 décembre, le soir du match de la Coupe du monde de football entre la France et le Maroc, a été mis en examen et écroué ce mardi.
Ce jeune homme de 20 ans, originaire du quartier, avait fui par peur des représailles. Il été interpellé par les policiers de la BRI (Brigade de recherche et d'intervention), à Saint-Estève, près de Perpignan, chez des membres de sa famille.
La mort d'Aymen avait provoqué une vive émotion dans le quartier et des violences : des voitures avaient été incendiées et un appartement appartenant à la communauté gitane avait été saccagé. Fernand Maraval, une des figures de la communauté gitane, qui a multiplié les appels au calme depuis le drame, espère que les tensions vont retomber mais voit l'avenir d'un œil inquiet.
"Cette arrestation, c'est d'abord un soulagement pour la famille du défunt, qui va pouvoir avoir des réponses lors du procès. C'est un soulagement aussi pour la communauté gitane, car on nous avait accusé de cacher le jeune conducteur et nous avions peur des représailles. Maintenant, les gens vont bien voir qu'on disait la vérité. Je ne le connais pas, ce jeune, son père est maghrébin, sa mère est en partie gitane. Cela conforte ce qu’on disait : on ne le cachait pas ! D'ailleurs, quand un petit de chez nous dérape, on dit toujours qu’il faut qu’il se rende à la justice".
Un quartier sous tension
Malgré cette première évolution judiciaire autour de ce drame, ce médiateur de la communauté gitane ne cache pas son inquiétude.
"Nous sommes très inquiet pour l’avenir : il n’y a pas de mixité à la Paillade. Dans le quartier, c'est 90 % de maghrébins et 10 % de gitans. Certaines familles sont terrorisées et ne veulent plus amener les petits à l’école. Il y a 250 familles gitanes qui vivent dans ce quartier et beaucoup veulent partir désormais. Trois familles sont déjà parties sans avoir déménagé, en laissant leurs affaires dans leurs appartements. Les gens baissent les bras."
Certains ont reçu des menaces de mort sur leur téléphones portables, les premiers jours après le drame. Maintenant, on a peur qu'au moindre incident, la situation dérape et que toute la communauté en pâtisse.
Fernand Maraval, président national de l'Union française des associations tziganes
Continuer à vivre ensemble
Fernand Maraval compte demander une nouvelle réunion au préfet avec des représentants de la mairie pour étudier un projet pérenne afin de maintenir le peu de mixité qui reste encore dans le quartier de la Paillade.
"Il faut trouver une solution et éventuellement reloger les familles qui veulent partir. Nous sommes des Français de la république, nous voulons être protégés comme tout le monde. Il y a un mal-être des petits, certes, mais une communauté toute entière ne peut pas être tenue responsable pour un petit qui dérape. Cela fait 40 ans qu’on nous a abandonnés et il n’y a pas qu’à Montpellier que le problème existe" conclut Fernand Maraval.
En plus de la tension déjà palpable dans le quartier, de nombreuses rumeurs ont fusé sur les réseaux sociaux, envenimant la situation entres les deux communautés, regrette encore celui qui est aussi le représentant de l'Union française des associations tziganes.
Mais, pour le moment, les appels au calme réitérés par la famille d'Aymen, entre autres, semblent avoir permis d'éviter d'autres explosions de violence.