Ce n’est pas un pot de fleurs, c’est une oyas et c’est magique. Son système d’arrosage autonome et écologique, permet d’irriguer lentement vos fruits et légumes du potager ainsi que vos fleurs et plantes d’intérieur. Cette poterie aux propriétés particulières a été mise au point par une entreprise de Saint-Jean-de-Fos au nord-ouest de Montpellier.
Pour comprendre comment fonctionne cette jarre en terre cuite 100% naturelle et biodégradable, le mieux c’est de suivre les conseils de Jean Aribaud, sacré meilleur jardinier amateur de France en 2019. Cet adepte des oyas en a mis partout dans son jardin : autour des légumes du potager, des fleurs dans les massifs ou encore près des arbres fruitiers.
Une diffusion lente et autonome
On enterre l'oyas dans le sol jusqu’au col puis on la remplit d’eau. Ensuite, grâce à la microporosité de la céramique, l’eau va se diffuser très lentement et la plante va venir se nourrir en fonction de ses besoins. Selon la température, cela peut tenir une semaine avant de remettre de l’eau.
Il suffit de remplir le pot et Jeannot n'a plus qu'à aller se reposer.
Jean Aribaud jardinier
A Riols dans l’Hérault, les poteries d'arrosage de Jean sont soigneusement alignées prêtes à être enterrées avant l'arrivée des premières chaleurs. Oyas en main, il montre à Delphine comment les placer dans son jardin.
Moins d'eau et plus de fruits
Quand on regarde d'un peu plus près la terre, on voit les racines qui se sont enroulées autour de l’oyas. Avec ce système les plantes ou les arbres concentrent toute leur énergie à produire. Ils donnent jusqu’à 30% de plus de fruits qu’avec un arrosage traditionnel. Cela permet d’économiser l’eau et d’avoir des fruits et légumes très concentrés en goût. Ecoutez ce qu’en dit Jean : « J’ai fait des essais l’an dernier sur des plants de tomates. On a utilisé 1010 litres d’eau pour les plants irrigués avec les oyas et 1890 litres avec le système traditionnel. C’est une économie conséquente. Pour un citronnier j’ai mis autour 2 oyas d’1 litre et demi qui suffisent à irriguer ce citronnier. En plus, les fruits sont beaucoup plus goûteux que les produits envahis d’eau que l’on trouve dans le commerce. »
Des oyas fabriquées dans l'Hérault
L'idée est venue de deux Héraultais Bastien et Frédéric qui voulaient créer une entreprise dans le domaine de l’écologie. Ils ont eu le déclic en regardant un reportage sur les oyas qui sont très utilisées au Maroc. Ils se sont associés avec une potière, Isabelle Duisit et ont crée leur entreprise Oyas® en 2014 à Saint-Jean-de-Fos, un village médiéval de tradition potière à 35 kms au nord-ouest de Montpellier.
Percer le mystère de l'oyas
Mais l'idée de faire des oyas ne suffit pas. Il leur a fallu d’abord retrouver les caractéristiques de fabrication, de composition et de façonnage. Ce système d'irrigation existe depuis des millénaires en Chine, en Inde ou en Amérique latine, mais son savoir-faire n’était pas très documenté.
Après 4 ans de recherche et développement avec le CNRS, l’institut européen des membranes et Sup Agro, ils sont parvenus à optimiser les caractéristiques naturelles de porosité et de perméabilité en jouant sur les paramètres de chimie des argiles, de façonnage et de courbes de cuisson.
Former des artisans potiers
Ensuite Bastien et Frédéric ont cherché de la main d’œuvre car les oyas sont entièrement fabriquées et tournées à la main. Mais en 2014, les artisans potiers ne couraient plus les rues du village comme l'explique Isabelle Duisit co-fondatrice d'Oyas® Environnement : « le métier avait perdu de son utilité et celui de tourneur en particulier était en voie de disparition. Il a donc fallu que l’entreprise recrute et surtout forme les gens. Il faut savoir qu’il faut au moins 5 ans pour devenir potier. Cela a été compliqué et reste encore un défi aujourd’hui. »
L'humain au service de l'environnement
Aujourd’hui l'entreprise fabrique 200 000 pièces par an et a deux autres unités de production à Toulouse et à Fraize dans les Vosges. Son objectif n’est pas de vendre un maximum de poteries d'arrosage même s’il faut bien sûr faire vivre les salariés et rentabiliser les investissements. La base du projet, c’est l’environnement et réussir à démontrer qu’avec un autre type d’entreprise de l’économie sociale et solidaire on peut remporter des marchés. Car l'une des priorités de l'entreprise c'est aussi de mettre l'humain au cœur de la fabrication en respectant la parité homme/femme, 4 jours de travail par semaine, des décisions collectives et l'absence de cadre intermédiaire.
A travers ce simple objet utile qu'est l'oyas, ses créateurs prouvent aujourd'hui qu'une autre vision du monde est possible.