La polémique a débuté à Montpellier avec les témoignages de femmes mettant en cause le commissariat central dans la prise en charge des victimes et des plaintes. Dimanche, une manifestation a eu lieu devant l'hôtel de police "pour réparer le système". Le ministre de l'Intérieur annonce des avancées.
Devant la montée de la contestation des femmes et des associations de soutien aux victimes de violences sexuelles, le gouvernement annonce des mesures et des expérimentations dans plusieurs départements.
L'accueil des victimes de violences conjugales peut "s'améliorer très certainement", a avoué Gérald Darmanin, interrogé sur le sujet après la manifestation, dimanche devant le commissariat de Montpellier, pour dénoncer la mauvaise prise en charge des victimes d'agressions sexuelles.
Nul doute qu'avec cette polémique née à Montpellier suite aux témoignages très forts de femmes victimes de viols, l'Hérault sera partie prenante dans cette nouvelle expérience et probablement département test.
Recueil et dépôt de plainte "chez autrui" et à domicile
Le ministère de l'Intérieur va tester un dispositif qui permettra aux forces de l'ordre de recueillir chez autrui la plainte de victimes de violences conjugales ne souhaitant pas, par "peur", se rendre dans un commissariat, a annoncé Gérald Darmanin.
Nous allons lancer avec la ministre déléguée (Marlène Schiappa, NDLR), à partir de la fin de l'année, une expérimentation qui permettra dans certains départements que les policiers et gendarmes se déplacent pour recueillir des plaintes.
"Si vous êtes une femme violentée et que vous avez choisi d'être chez votre assistante sociale, votre amie, votre maman, à la mairie et que vous avez peur du commissariat (l'accueil qu'on peut vous apporter, le regard des autres, la difficulté de rentrer dans un commissariat, ce n'est jamais évident), alors les forces de l'ordre pourront se déplacer", a-t-il poursuivi.
Une enquête interne au commissariat de Montpellier
Le ministre de l'Intérieur vient aussi de demander à la direction centrale de la sûreté publique, une enquête interne concernant le commissariat central de Montpellier.
Cette demande fait suite à la récente polémique après des témoignages de femmes victimes d'agressions sexuelles ayant voulu déposer plainte à l'Hôtel de police.
Plusieurs déclarations, dont certaines datant de plus de 10 ans, relatent des propos blessants, des questions tendancieuses et des remarques déplacées. Il y aurait des dizaines de témoignages.
"Au commissariat central de Montpellier, on demande aux victimes de viol si elles ont joui", "On explique aux victimes de viol qu'une personne qui a bu est forcément consentante", etc... est-il écrit sur Twitter.
Pire, quelques femmes expliquent qu'on a refusé de prendre leur plainte sous prétexte qu'elle n'aboutirait à rien.
Une avancée sur la forme... quid du fond ?
Pour Anna Toumazoff, spécialiste en vulgarisation des questions féministes, qui a recueilli de nombreux témoignages de femmes, notamment des plaignantes de Montpellier, joint par France 3 Occitanie, la réaction du gouvernement est positive même si elle a tardé à venir.
Sur le fond, c'est très bien, c'est une avancée marquante mais il ne faut pas que cela soit juste un effet d'annonce. Par ailleurs, il y a toujours la forme et l'attitude des policiers et gendarmes envers les victimes.
Elle réitère toutefois ses demandes auprès du gouvernement. Que le recueil de la plainte des femmes victimes soit obligatoire et non au choix du fonctionnaire, que des contrôles "d'attitude d'accueil" soient effectués dans les commissariats et gendarmeries et que la promesse d'Emmanuel Macron d'une enveloppe d'un milliard d'€ pour l'aide aux victimes de violences, une grande cause du gouvernement, soit tenue.
Toujours plus de dossiers à moyens constants ou en baisse
Pour les syndicats de policiers, il n'y a rien de neuf dans cette mesure. La police se déplace déjà, selon les cas, pour prendre les plaintes de victimes. Toutefois, si la situation peut être mieux vécue et moins douloureuse ou perturbante par les victimes, c'est une bonne chose. Reste le problème des moyens humains.
Gérald Darmanin propose à titre expérimental aux policiers et aux gendarmes de se déplacer à domicile dans certaines situations. Il faut retenir que nous nous déplaçons déjà régulièrement vers les victimes vulnérables pour recueillir des plaintes. En revanche, il serait plus opportun de donner des moyens supplémentaires aux enquêteurs et au parquet afin de travailler dans de meilleures conditions. Dans le département de l'Hérault par exemple, nous avons plus de 800 dossiers en cours dans le cadre des violences à personne.
Le syndicaliste de Montpellier ajoute : "Nous maintenons notre soutien à l'endroit de notre collègue féminine Officier de Police Judiciaire de Montpellier".
La liste des départements concernés par l'expérimentation sera déterminée "dans les prochains jours", selon le ministère de l'Intérieur.
Le dépôt de plainte à l'hôpital, mis en place dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, est déjà expérimenté et doit être prochainement étendu à l'ensemble du territoire.