Ancien pompier volontaire, Lucas Canuel a été très gravement blessé dans l'incendie de Gabian, en 2016. Malgré son handicap, il veut intégrer le corps des pompiers de l'Hérault et interpelle le chef de l'État et le ministre de l'Intérieur dans une vidéo.
Le 10 août 2016, les pompiers luttent contre l’incendie qui s’est déclaré aux alentours de Gabian (Hérault). Pendant l’intervention, quatre soldats du feu, qui ont fui leur camion pour échapper aux flammes, sont blessés. Le sapeur-pompier Jérémy Beier décédera des suites de ses blessures un mois plus tard.
Lucas Canuel, 28 ans aujourd’hui, a survécu. Mais il est lourdement handicapé. À l’approche de l’anniversaire du drame, il interpelle le président de la République et le ministre de l’Intérieur dans une vidéo diffusée sur Facebook. Voilà des années qu’il demande à intégrer le corps des pompiers de l’Hérault. Mais l’administration refuse. "On me reproche mon handicap", pointe-t-il, amer.
Condition physique incompatible
Pour s’engager, un pompier doit remplir certaines conditions physiques et médicales. Or Lucas Canuel a perdu ses 10 doigts dans l’incendie de Gabian. Mais il considère qu’il pourrait occuper un poste adapté au sein du SDIS, en gérant la plateforme téléphonique par exemple.
"On ne peut pas intégrer quelqu’un qui n’est pas apte physiquement. C’est les textes qui l’interdisent, pointe le lieutenant Jean-Marc Bonnafous, chargé de la communication au sein du Service Départemental d'Incendie et de Secours de l'Hérault. C’est une profession à risque, c’est pour ça qu’il y a des conditions physiques et médicales."
Les pompiers de l’Hérault ont bien proposé à Lucas Canuel un poste d’agent administratif, mais ce dernier a refusé.
Ça fait des années que je me bats contre l’État français pour être reconnu sapeur-pompier professionnel. (…) Moi j’ai servi la République, et aujourd’hui c’est la République qui se sert de ses lois pour m’exclure. Je trouve que c’est inadmissible.
Lucas Canuel, ancien pompier volontaire blessé lors d'une intervention en 2016
Lucas Canuel considère qu'il a le droit avec lui et envisage de porter l'affaire en justice. Il peut compter sur des alliés de poids. Le maire de Montpellier, Michaël Delafosse, salue "son courage admirable", et considère que "sa demande de contribuer à nos forces de sécurité en étant réintégré chez les pompiers doit être entendue".
Après son accident, Lucas Canuel a repris des études dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail. "Un pied de nez à l’accident", admet-il. Surtout une manière de poursuivre son rêve de gosse : devenir pompier. Un rêve qu’il n’a pas lâché, malgré le drame et les barrières administratives. "Certes je ne peux plus tenir la lance sur un feu, mais je peux protéger mes hommes, j’ai un Bac+3, je peux être capitaine sapeur-pompier", martèle-t-il.
Reconsidérer les pompiers volontaires
Plus largement, Lucas Canuel demande une meilleure reconnaissance du travail des pompiers volontaires, qui représentent 79% des effectifs. "Il va falloir que l’État nous considère un peu mieux s’ils veulent des pompiers demain", s’agace-t-il.
Un sapeur-pompier volontaire n’a pas les mêmes droits qu’un sapeur-pompier professionnel, pourtant le risque est le même.
Lucas Canuel, ancien pompier volontaire blessé lors d'une intervention en 2016.
S’il avait été pompier professionnel au moment du drame, l’histoire aurait été bien différente. "J’aurais pu être réintégré chez les pompiers avec des aménagements", explique Lucas Canuel. L’un de ses collègues, blessé lui aussi pendant l’intervention dramatique d’août 2016, a en effet pu poursuivre sa carrière au sein du corps des pompiers.