Violettes, dorées, roses... Les huîtres prennent des couleurs ! Pour mettre au point cette innovation esthétique et gastronomique, un ostréiculteur de l'étang de Thau (Hérault) s'est associé à l'Ifremer.
Âgées de dix mois à peine, ces huîtres uniques révèlent déjà leur particularité. Leurs coquilles arborent des couleurs inhabituelles : or, rose, marbré, violet... Cette innovation est le fruit du travail de Florent Tarbouriech, ostréiculteur sur l'étang de Thau, et des chercheurs de l'Ifremer.
Sélectionner les individus naturellement colorés
L'expérimentation a commencé au début du printemps. Cette toute première génération d'huîtres colorées trouve son origine sur la côte atlantique. Les scientifiques de l'Ifremer ont arpenté le littoral à marée basse pour isoler des huîtres sauvages. Certains individus présentaient naturellement des pigmentations atypiques, dorées et violettes.
On a isolé ces individus, on les a échantillonnés et conditionnés pour la reproduction. On a réalisé des croisements biparentaux pour produire plus d’une trentaine de familles. Toutes les combinaisons ont été réalisées pour en comprendre l’hérédité et la génétique.
L'idée de développer une filière d'huîtres colorées est née en Polynésie Française où Chin-Long Ky a longtemps travaillé. Ses recherches sur les couleurs de la nacre et la perle de Tahiti lui ont permis d'identifier le potentiel coloré des huîtres creuses de l'hexagone.
Du côté du personnel, le produit séduit déjà. "Ca va apporter un contraste magnifique dans l’assiette", imagine Flory Tarbouriech, directrice développement de l'entreprise. "On pourra l'associer à une huître marron de Bouzigues, pour allier la nouveauté à la tradition, l'innovation à l'authenticité".
Une huître en or, un atout marketing
L'innovation au service du marketing, c'est la marque de fabrique de la société de Florent Tarbouriech, implantée dans plusieurs pays. L'entrepreneur a déjà mis en place une technique de marée artificielle, appelée exondation, pour donner à ses huîtres une couleur rosée. Avec ces nouvelles couleurs, l'homme d'affaires entrevoit déjà un avenir florissant. "Ce ne sont plus des huîtres à nacre, ce sont des huîtres en or massif ! Elles sont magnifiques. Et c'est la nature qui fait ça, ce n'est pas nous. On est à cheval entre la gastronomie et l'art !", s'enthousiasme-t-il dans ce reportage de Cybèle Plichart et Franck Detranchant.
Le visuel, c'est le premier rapport que l'on a avec un produit. Bien sûr, il faut que les huîtres soient avant tout bonnes, charnues, croquantes, équilibrées. Mais arriver à proposer des huîtres de couleur, c'est l'avenir !
L'innovation va-t-elle trop loin ? "En ostréiculture, il y a beaucoup de retard par rapport à ce qui se fait en agriculture", avance Jean-François Holley, directeur adjoint du Cepralmar, le Centre d'étude pour la promotion des activités lagunaires et maritimes. "Réfléchir à la sélection des huîtres et à leur génétique, c'est une démarche adaptée dans ce contexte de changement climatique".
Lancé en décembre dernier, le label "Huîtres et moules de méditerranée" devrait contribuer à asseoir la notoriété de ces coquillages. D'une taille de deux ou trois centimètres aujourd'hui, les huîtres atteindront leur calibre optimal dans deux ans environ. D'ici-là, les scientifiques auront le temps d'analyser les facultés d'adaptation de l'animal.