Alors qu'il salue des progrès dans l'exploitation durable des populations de poissons en France, l'organisme déplore une pression de pêche encore "très élevée" dans le bassin méditerranéen sur certaines espèces, notamment le merlu.
"Une amélioration lente", dans la lignée des années précédentes : tel est le bilan qu’a tiré, ce vendredi 12 février, l’Ifremer de la présentation de ses données annuelles sur l’état des populations de poissons en France. Les auteurs de l’étude "Comment vont les poissons ?", destinée à évaluer l’impact de la pêche sur le maintien des espèces maritimes, se veulent optimistes.
En 2020, 60 % des volumes de poissons pêchés en France sont issus de populations exploitées durablement, contre 15 % il y a 20 ans, détaille Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer. Mais la surpêche touche encore 21% des populations, et 2 % sont considérées comme "effondrées" comme le merlu en Méditerranée.
La situation en Méditerranée, jugée "préoccupante", constitue l’un des points noirs de cet état des lieux. Parmi les huit espèces considérées, un tiers du volume débarqué provient de populations touchées par la surpêche. Certes, le thon rouge suit une trajectoire encourageante et est aujourd’hui considéré comme "en reconstitution". Mais la pêcherie dite de fond - c’est-à-dire l’anguille, le rouget et surtout, le merlu -, concentre aujourd’hui les inquiétudes.
Ce poisson a des trajectoires très différentes entre la façade atlantique et la façade méditerranéenne. Sur la façade atlantique, comme pour le thon rouge, on a des plans de gestion qui ont réduit la pression de pêche et tout de suite, on a vu une amélioration des populations. L’idée, c’est de pouvoir obtenir les mêmes résultats sur le merlu de Méditerranée, où on voit que la pression de pêche reste encore très élevée et que la population a beaucoup diminué.
L’organisme public plaide donc pour une régulation accrue de la pêche, entre autres dans le golfe du Lion. "Les populations réagissent très, très vite aux changements de pression de pêche et donc peuvent se reconstituer", assure Clara Ulrich. En 2019, un plan de gestion européenne de la ressource, engageant l’Espagne, l’Italie et la France, a ainsi été adopté par la Commission européenne. Il prévoit notamment la fermeture temporaire de certaines zones pour protéger les jeunes poissons et limite la durée maximale d’une journée de pêche.
"Comment faire ?"
Mais le point saillant concerne la fréquence de sortie des chaluts. "La décision qui a été prise, ça a été de faire des quotas d’efforts de pêche, explique Alain Biseau, biologiste des pêches à l’Ifremer. On ne limite pas les captures directement, on les limite indirectement par le biais de réduction de nombre de jours de mer." D’ici 2025, l’objectif est de diminuer ce chiffre d’un tiers.
Pour en savoir + rejoignez Sandrine Vaz et Clara Ulrich en #Live ? sur Youtube pour notre conférence de presse nationale sur l'état des populations de poissons pêchées en France #CommentVontLesPoissons ? !
— Ifremer (@Ifremer_fr) February 12, 2021
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En décembre dernier, alors qu’avaient lieu les négociations pour l’année 2021, ce point alimentait la colère des professionnels de la région. Le 7, ils manifestaient à Port-la-Nouvelle (Aude), dénonçant un "plan de gestion complètement aberrant" qui mettait à mal leur rentabilité. Entre-temps, le nombre de jours de mer autorisé a été fixé à 183, précise Bernard Pérez, président du Comité régional des pêches maritimes et élevages marins, pour qui ce chiffre constitue un "compromis". "La question, c’est qu’est-ce qu’on peut faire pour accompagner, développe-t-il. On veut travailler. On veut une pêche durable et responsable, ça c’est sûr. Mais comment faire ?"
On s’aperçoit, qu’avec les efforts que nous faisons de fermer des zones de pêches, il y a un léger mieux. On espère qu’en 2025, on arrivera à suivre le RMD [Rendement Maximal Durable, NDLR]. Mais il faut un suivi, un accompagnement au niveau des marins et des armements. Quelques années en arrière, on était à 230, 240 jours, et on risque de tomber à 140 jours. Comment on fait pour y arriver tous ensemble ?
Et d’appeler à une collaboration étroite avec l’Ifremer. De son côté, l’organisme insiste : parmi les méthodes de pêche alternatives, il s'agit-là du "scénario qui produit les résultats les plus positifs, à un moindre coût économique et avec le moins d’incertitudes", souligne Sandrine Vaz, responsable de laboratoire de l’unité Marbec, à Sète. À cette condition, il serait possible d’espérer un "rebond rapide" de la population de merlus, c’est-à-dire "en l’espace de trois ans".