Toulouse : La justice examine si le néologisme "souchien" est une injure raciale
Une militante antiraciste comparaît mercredi devant la justice à Toulouse pour avoir employé le néologisme "souchiens" désignant, selon elle, les Français de souche, mais interprété comme l'injure "sous-chiens" par une organisation d'extrême droite qui la poursuit.
Le néologisme "souchien", utilisé par une militante antiraciste à la télévision pour désigner les Français de souche, était mercredi au coeur d'un procès intenté à Toulouse par une organisation d'extrême droite qui l'avait interprété comme l'injure "sous-chiens".
Le jugement a été mis en délibéré au 25 janvier 2012, et la prévenue risque 6
mois de prison et 150 euros d'amende.
"Mais comment entendre ce tiret ?" s'est interrogé en demandant la relaxe Me Henri Braun, avocat de la porte-parole du Parti des indigènes de la République (PIR), Houria Bouteldja, qui avait prononcé "souchiens" lors d'un débat télévisé sur France 3, en 2007.
Parlant des "quartiers populaires qui seraient en déficit de connaissances, de conscience politique", elle avait estimé que "c'est le reste de la société qu'il faut éduquer (sur la colonisation et l'esclavage, ndlr), ceux qu'on appelle nous les souchiens parce qu'il faut bien leur donner un nom, les Blancs".
Avant l'ouverture du procès, une centaine de manifestants s'étaient rassemblés en deux groupes, séparés par la police, l'un en faveur de Houria Bouteldja, l'autre, le "Bloc identitaire", pour l'association Agrif (Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne), partie civile.
"Souchien, je le revendique comme un néologisme, a déclaré la prévenue à la barre, affirmant que ce terme n'avait pour elle "aucune connotation raciale" et en rappelant que "personne n'avait réagi pendant l'émission". "Le registre du racisme n'est pas le mien, je n'ai aucun intérêt à insulter les Français" et "je ne parlais pas de chiens", a-t-elle fait ajouté.
"Elle ment car elle n'a cessé de critiquer les Français à longueur de discours et d'articles", a lancé de son côté le président de l'Agrif, Bernard Antony, ancien député européen du Front national. "Elle s'est attaqué aux Blancs, il est interdit de qualifier les Blancs de sous-chiens", a-t-il martelé.
Le terme employé par Houria Bouteldja, pour Me Pierre-Marie Bonneau, avocat de l'Agrif, constituait "une injure aggravée, raciale". "Il était destiné à être compris comme une insulte, (...) pour faire un clin d'oeil à ceux qui comprenaient", a-t-il estimé.
Le ministère public s'est pour sa part refusé à se prononcer, soulignant que l'homophonie des termes "souchiens" et "sous-chiens" créait une "ambiguïté".
Me Braun a par ailleurs fait apparaître que le président du Parti radical Jean-Louis Borloo avait utilisé la même expression "souchiens" dans une émission de télévision six semaines avant Houria Bouteldja, sans soulever de tempête. "Ce tiret, on ne l'entend pas avec Jean-Louis Borloo ?" s'est-il-étonné.
L'audience a connu un incident de procédure car trois témoins avaient assisté par erreur au début des débats avant d'être entendus, alors que c'est interdit aux témoins. Après une suspension de séance, le tribunal a décidé de les entendre "à titre de renseignement".