La découverte a été faite sur le site pyrénéen. C'est la 5e mandibule humaine de ce genre trouvée à Tautavel depuis 1969
Les chercheurs qui extraient depuis 1964 des fossiles humains préhistoriques de la grotte de Tautavel dans les Pyrénées-Orientales viennent de mettre au jour une cinquième mandibule d'homo erectus européen vivant il y a environ 450.000 ans sur ce site exceptionnellement riche en vestiges.
Le Centre européen de recherches préhistoriques de Tautavel (CERP) a annoncé vendredi cette découverte, 41 ans après celle du crâne du premier homme de Tautavel, le 22 juillet 1971, par Henry de Lumley, dans cette grotte de La Caune de l'Arago.
La nouvelle mandibule d'homo erectus européen ou homo heidelbergensis est répertoriée Arago 131 car c'est le 131e reste humain découvert dans ce site.
Elle peut être datée de 450.000 ans comme le crâne découvert en 1971, qui fut baptisé Arago XXI.
La mandibule a été mise au jour le 6 juillet à 11h30 et est encore en cours de dégagement de la couche au sein de laquelle elle a été découverte. Elle devrait être enlevée vendredi 20 juillet, précise le CERP.
La cinquième mandibule appartient à un adulte dont le sexe reste à déterminer, indiquent les chercheurs. Les précédentes ont appartenu à des hommes et des femmes, adolescents et adultes, dont une femme d'environ 45 ans, un âge avancé pour l'époque.
Ces mâchoires ont des caractéristiques anatomiques proches: une branche horizontale basse et très épaisse, des dents robustes.
Ces lointains ancêtres, il y a 20.000 générations, bien avant l'homme de Néandertal (135.000 ans), puis notre ancêtre direct Cro-Magnon, étaient des chasseurs de grands mammifères (chevaux, bisons, cerfs) parcourant un paysage de steppe d'environ 30km autour de leur caverne. Ils vivaient dans un climat assez froid et extrêmement sec.
Ils taillaient leurs outils dans la pierre et le bois, mais ne maîtrisaient pas le feu avant -400.000 ans.
L'étude de ces fossiles permet d'imaginer un homme au crâne bas, face très large et plate, dénuée des pommettes de l'homme moderne, front fuyant souligné d'un épais bourrelet au-dessus des orbites, nez très large, prognathisme (saillie de la mâchoire vers l'avant) marqué, une capacité crânienne de 1.150 centimètres cubes (1.400 centimètres cubes en moyenne chez l'homme moderne).
Outre le crâne découvert en 1971, les mandibules découvertes sur le site ont été extraites en 1969, 1970, 2001 et 2008. Selon le CERP de Tautavel, l'étude de ces mandibules doit permettre de mieux comprendre les variations au sein de ces populations et de les comparer aux rares autres vestiges anteneandertaliens, la mandibule de Mauer près d'Heidelberg (Allemagne) ou celle de la Sima de los Huesos dans la sierra d'Atapuerca, près de Burgos (Espagne).
L'exceptionnelle richesse de Tautavel est liée en partie à des bouleversements géologiques. En se remplissant sous l'effet des ruissellements et des éboulements, puis en se colmatant pour ne se rouvrir qu'entre 30.000 et 15.000 ans avant notre ère, la cavité a piégé les vestiges et la culture des hommes de -700.000 à -100.000 ans. Elle a aussi figé une chronique de la biodiversité et du climat.
La Caune de l'Arago, c'est un véritable livre qui nous raconte 600.000 années d'histoire du paysage et d'histoire de l'Homme en Languedoc-Roussillon", déclarait récemment Henry de Lumley. Ses collaborateurs estimaient alors qu'il restait encore pour un siècle de fouilles à réaliser.