Une enquête a été ouverte par le parquet de Cahors après le décès d'un homme de 70 ans à son domicile de Concots, dans le Lot. La famille de ce dernier reproche au SAMU du Lot d'avoir tardé à intervenir. Elle a porté plainte pour non-assistance à personne en danger.
C'est le scandale suscité par l'affaire Naomi qui a décidé Annie Orget à témoigner. L'histoire de cette jeune femme décédée à Strasbourg après que le SAMU n'ait pas pris son appel au sérieux lui rappelle tristement la sienne. Annie Orget a perdu son mari, Jacques, 70 ans, le 1er avril dernier. Malgré plusieurs appels de sa part aux services du 15 du Lot, ce dernier est décédé à son domicile de Concots.
Avec sa fille, Muriel, elle a porté plainte pour non-assistance à personne en danger. Une enquête a été ouverte par le procureur de la république de Cahors.
Un homme suivi pour une maladie respiratoire
Jacques Orget, 70 ans, souffrait d'emphysème. Il était sous assistance respiratoire. Le 30 mars dernier, selon sa famille, il ne se sentait pas bien et il est resté alité toute la journée. En début de soirée, sa femme Annie vérifie son taux d'oxygène dans le sang avec un oxymètre et s'alarme de le découvrir "très bas, à moins de 70". Elle appelle le 15 entre 19h30 et 19h45.Au téléphone, "le médecin est resté un petit moment avec moi" dit elle, "il m'a fait augmenter le taux d'oxygène de la machine. Il m'a dit qu'il me rappellerait une heure plus tard pour prendre des nouvelles".
Le service d'urgence ne rappelle pas. La taux d'oxygène de son mari reste bas. Annie finit par rappeler le 15 vers 21h00. "Le médecin m'a dit que mon oxymètre ne devait pas marcher. Il m'a dit de le tester sur moi. Sur moi, il fonctionnait alors il m'a dit qu'il m'envoyait un médecin de garde de Villefranche-de-Rouergue. Il a mis du temps à venir, ce n'est pas tout près... En voyant mon mari, il a appelé les urgences, qui ont envoyé deux infirmiers d'une ambulance privée. Mon mari n'était plus transportable. Ils ont appelé le SAMU mais il était trop tard".
L"équipe du SAMU finit par intervenir, un peu avant minuit. Et essaie de réanimer Jacques Orget pendant près de 40 minutes avant de constater son décès le 1er avril 2018 à 00h20.
Beaucoup de questions et de colère
"C'est la première fois de ma vie que j'appelle le 15 et ils ne sont pas venus". Un peu plus d'un mois après le décès de son mari, Annie Orget ne comprend toujours pas pourquoi le SAMU n'est pas venu plus vite, ce soir-là, ni ce qu'elle aurait pu faire de plus pour les convaincre de venir. "On n'est pas des gens qui font déplacer les gens pour rien", insiste-t-elle, "c'est la première fois que je me retrouvais face un tel problème. J'ai fait comme il fallait, j'ai appelé le 15, j'ai été une bonne élève. Et je me reproche aujourd'hui de ne pas avoir été plus insistante au téléphone..."
Des questions et une incompréhension que partage sa fille, Muriel Orget. "Je trouve inadmissible qu'un monsieur de 70 ans, qui va mal et qui ne bouge plus de son lit, soit traité comme ça" dit-elle. "Entre le premier appel de ma mère et l'arrivée du SAMU, mon père a eu le temps de mourir trois fois. Et ma mère se sent responsable. Elle a fait confiance, elle a appelé quand il fallait, pour une vraie urgence et elle se sent coupable aujourd'hui de ne peut-être pas avoir fait tout ce qu'il fallait pour aider son mari."
Une plainte pour non-assistance à personne en danger
"On a beaucoup de colère de savoir qu'ils ne sont pas venus. Je sais qu'ils reçoivent beaucoup d'appels mais on ne peut pas jouer comme ça avec la vie des gens" dit encore Muriel Orget. Avec sa mère, elle est allée porter plainte à la gendarmerie de Saint-Géry, le 6 avril dernier. Une plainte pour non-assistance à personne en danger. Le procureur de la république de Cahors a depuis ouvert une enquête.
"Procédure respectée" selon le SAMU du Lot
Dans le Lot, les appels d'urgence arrivent dans un centre de réception et de régulation. La nuit et les week-end, ce sont des médecins libéraux qui assurent la permanence et qui demandent l'intervention du SAMU, en cas d'urgence. Pour le docteur Debreux, directeur du SAMU du Lot, l'appel d'Annie Orget "a été bien régulé, conformément à la règle." Pour lui, "il n'y a eu aucun souci. Les questions ont été posées, les signes de gravité ont été recherchés. Il n'y avait aucun critère de gravité à l'appel initial".
Voyez le reportage d'Eric Marlot et Jean-Pierre Jauze :