La plus grande décharge de pneus en France, fermée il y a neuf ans à Lachapelle-Auzac dans le Lot, ne se vide qu'au compte-gouttes en raison de la complexité du dispositif d'élimination des pneus usagés et de l'imbroglio créé en 2005 par la liquidation de l'entreprise qui la gérait.

La plus grande décharge de pneus en France, fermée il y a neuf ans à Lachapelle-Auzac dans le Lot, ne se vide qu'au compte-gouttes en raison de la complexité du dispositif d'élimination des pneus usagés et de l'imbroglio créé en 2005 par la liquidation de l'entreprise qui la gérait.

"Il reste encore 13.000 tonnes sur 25.000", indique le maire de cette commune d'à peine 800 habitants, Ernest Maury (SE), qui a hérité du dossier après son élection en 2008. Des chiffres "très sous-estimés", selon l'association Recyvalor, chargée de supprimer les vieilles décharges.


A cinq kilomètres du village, perdu au milieu du causse lotois, des collines de pneus forment des mélanomes sur le vert de l'herbe et le blanc des cailloux d'un terrain de onze hectares qui accueillait le site de récupération de Jean-Claude Le Goff.

Pot de terre contre pot de fer : la fermeture de la décharge


Cet homme de 71 ans s'est retrouvé à la retraite forcée à 62 ans après 38 ans dans la récupération des pneus, faute d'avoir obtenu en 2004 le nouvel agrément devenu nécessaire à sa société, LGP, quand les pouvoirs publics ont rendu obligatoire l'élimination ou le recyclage des stocks de pneus usagés. Sa candidature a été repoussée par l'éco-organisme Aliapur, qui venait d'être créé par les fabricants de pneumatiques pour organiser la collecte et le traitement des pneus. "Aliapur a estimé qu'il n'était pas le mieux-disant financièrement et techniquement", explique le directeur opérationnel de la société, Stéphane Petitrenaud. "Quand on a vu son stock de 25.000 tonnes, on a douté de sa capacité a éliminer les pneus à venir", dit-il.

Contraint à la liquidation début 2005, Jean-Claude Le Goff a dû licencier les 18 salariés qui collectaient les pneus partout en France et les retraitaient en partie, pour le rechapage ou les travaux publics (routes, voies ferrées). Il ne décolère pas contre les fabricants, qui tiennent les rênes d'Aliapur. "Les gros voulaient contrôler la filière de bout en bout. J'étais le pot de terre contre le pot de fer", dit cet homme qui en a encore les larmes aux yeux.

Le directeur d'Aliapur s'en défend en assurant que "la majorité des 35 collecteurs sélectionnés sont des PME".

Le maire ne "tranche pas entre les deux sons de cloche", mais estime qu'on ne peut reprocher la persistance de cette montagne de pneus au patron déchu, qui "n'a pas manqué à ses obligations". Les nouveaux textes ne réglaient pas en effet le problème des "stocks historiques" accumulés avant 2004.

Aujourd'hui, un vide juridique


Face au vide juridique, les pouvoirs publics, les fabricants de pneus, les distributeurs, les constructeurs automobiles et l'association écologiste Robin des Bois ont uni leurs forces en 2008 dans Recyvalor. Objectif: faire disparaître en huit ans 60.000 tonnes de stocks abandonnés sur 61 sites, dont Lachapelle-Auzac est le plus important.

Fin 2012, Recyvalor estimait être "exactement à mi-chemin", avec plus de 30.000 tonnes brûlées dans des cimenteries ou intégrées dans des revêtements de sol. Mais à Lachapelle-Auzac, Recyvalor n'a commencé à intervenir qu'en 2012, pour seulement 2.000 tonnes. Le maire explique ce début d'intervention tardif : "Avant de s'occuper des stocks orphelins, déposés par on ne sait plus qui, nous étions obligés par la loi de faire évacuer les pneus dont nous connaissions le dernier détenteur", garagiste, distributeur ou fabricant. Le fabricant de pneus Michelin ne s'était pas fait prier et avait repris 6.800 tonnes dès 2008. Mais sur 120 détenteurs recensés par les liquidateurs de LGP, beaucoup ont traîné les pieds pendant des années, malgré les mises en demeure. "Ils ont perdu car la loi leur imposait de vérifier que leurs pneus avaient bien été détruits", dit le maire.

Recyvalor, prenant enfin la main, devrait évacuer 2.000 tonnes supplémentaires en mai-juin et vise 4.000 tonnes sur 2013. Le maire mise sur cette accélération "pour en finir en trois ou quatre ans", mais M. Petitrenaud, qui siège au conseil d'administration de Recyvalor, est sceptique, sachant que l'association n'a pas les moyens de faire traiter plus de 8.000 tonnes par an pour toute la France. "Il faudra envisager de prolonger la vie de Recyvalor au-delà de 2016", estime-t-il.

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