Des amis, des collègues, des voisins sont venus témoigner, mercredi 15 mai 2019, troisième jour du procès en appel d'Edith Scaravetti. Ils ont évoqué sa personnalité, sa vie, son couple avec Laurent Baca, la victime tuée en août 2014 à Toulouse.
Il y a d'abord celui qu'on a un peu vite appelé "l'amant" : Jean-Marie F., animateur au CLAE de l'école des enfants du couple Scaravetti-Baca.
En juin 2014, alors que son couple se délite, Edith Scaravetti fait connaissance avec le jeune homme, à l'occasion de la fête de fin d'année de l'école. Ils sympathisent et début juillet, s'échangent leurs numéros de téléphone. C'est peut-être le début d'une relation amoureuse, lui semble l'avoir souhaité, mais en aucun cas une liaison. A l'exception d'un baiser échangé sur le parking de l'école, la relation est platonique. Ils se voient trois fois seulement, dont deux en présence des enfants.
Par contre, entre le 8 et le 16 juillet 2014, alors qu'Edith s'est réfugiée chez son père avec les enfants pour fuir le domicile conjugal, elle et Jean-Marie F. s'écrivent des SMS quotidiennement. Jusqu'à 60 par jour.
Visiblement, Edith Scaravetti trouve une oreille attentive. "Avec lui, je me sentais écoutée. On parlait de tout et de rien. Je me suis sentie quelqu'un. Je me suis sentie vivante". Pour autant, est-elle amoureuse ? Non. "Je n'étais pas amoureuse. Le jour où il m'a embrassé, j'étais mal. J'étais morte à ce niveau-là. Je n'ai rien ressenti".
Lui sait qu'elle vit des moments difficiles à la maison. Il confirme qu'en juillet, soit quelques semaines avant le drame, elle voulait se séparer de Laurent Baca. Elle lui écrit un jour qu'elle est décidée, qu'elle allait "affronter Laurent, qu'elle allait partir en guerre, qu'il devrait partir".
Laurent Baca découvre cette relation, demande à sa compagne d'y mettre fin et appelle Jean-Marie F. pour lui intimer l'ordre de cesser toute correspondance avec elle. Il le menace de lui faire perdre son travail. On sait par ailleurs qu'il demandera à un ami d'aller lui "mettre la pression".
La correspondance cesse du jour au lendemain. A aucun moment, Edith Scaravetti n'évoque avec Jean-Marie F. les violences dont elle est selon elle la victime. Quand il apprend la disparition de Laurent Baca, le jeune homme se rend spontanément à la police.
"C'est pas toujours rose à la maison"
Ces violences conjugales, c'est Véronique B., amie et collègue d'Edith Scaravetti qui en parle la première avec l'accusée. Elle explique à la cour d'assises du Tarn-et-Garonne, ce mercredi 15 mai 2019, qu'elle est elle-même une ancienne femme battue et qu'elle a découvert ce qu'Edith Scaravetti tentait de cacher à tous. Des bleus, des hématomes : elle en aurait vu trois.
Elle en parle à Edith qui, malgré ses réticences, commence à raconter l'alcool, les disputes, les coups, les menaces... "Il la surveillait constamment, l'appelait souvent pour savoir où elle était, lui demandait de rentrer alors qu'elle était au travail".
Comme Jean-Marie F., Véronique B. pense qu'Edith Scaravetti voulait se séparer de son compagnon mais qu'elle avait peur "car il disait qu'il ne la laisserait jamais partir".
Interrogée sur son passé, Véronique B. évoque ses propres souffrances, notamment l'alcoolisme de son ex-mari qui une fois l'a contrainte à rester nue sur le palier de leur appartement. Détail qui fait réagir un des conseils des parties civiles. Ce "détail" ressemble étrangement aux propres déclarations de l'accusée : les confidences du témoin ont-elles pu influencer sa version des faits ?
"Il se défoulait sur Edith"
Laura M. a été la compagne du frère d'Edith Scaravetti. Elle est une des rares à avoir été témoin direct de violences. "Elle était brimée, il n'était pas gentil avec elle. Une fois, il l'a menacée avec un couteau, elle s'est réfugiée chez moi et il m'a harcelée pour que je la ramène". On est en 2008.
Le problème avec l'alcool revient, une fois encore. "Sobre, il pouvait être très agréable. Ivre, ça devenait l'enfer. Il nous insultait. Il parlait de la carabine, disait qu'il allait tous nous tuer".
D'après ce témoin, les gens s'éloignaient de plus en plus du couple. Elle exprime des remords : "On est plusieurs à avoir ce sentiment qu'on aurait dû faire quelque chose".
"Une sorte d'esclave"
Karine P., une voisine du couple, qui est absente mais dont les déclarations sont lues par le président de la cour d'assises du Tarn-et-Garonne, a connu Edith Scaravetti alors qu'elle n'avait que 18 ans. Selon elle, la jeune femme ne sortait pas de chez elle à cette époque, elle n'avait pas le droit d'ouvrir la porte si Laurent Baca n'était pas là. Elle a vu des traces de coups, entendait des cris. "Edith était une sorte d'esclave".
Tous ces témoins s'accordent à dire qu'Edith Scaravetti était une très bonne mère, qu'elle était courageuse et travailleuse mais qu'elle était aussi effacée, peu diserte, subissant une certaine "emprise" dont elle souhaitait vouloir se défaire, cet été 2014, peu avant le drame...