Départementales : les enjeux dans les Pyrénées-Orientales

De 31 cantons on passe à 17. Chaque camp politique a son chef. L’hégémonie des socialistes est terminée et le FN est en embuscade. Du suspense ! Pyrénées-Orientales : le territoire de tous les possibles.


Serait-ce le moment de l’alternance politique dans les Pyrénées-Orientales ?


Le Figaro, dans son édition du jeudi 29 Janvier 2015, signalait le département comme susceptible de basculer à droite. Toutefois, si cette hypothèse peut être posée avec sérieux, il est nécessaire de prendre acte d’une incontournable réalité catalane : la prégnance du vote Front National et la tripartition de l’échiquier politique. Cette nuance est d’importance : en cas de l’élection d’élus Front National, la probabilité d’absence d’une majorité arithmétique peut se poser. Elle ouvrirait un scénario d’élection du président au 3è tour (majorité relative) et ensuite à une logique de négociations permanentes pour le vote de chaque dossier. Notons, par ailleurs, que Jean Castex, le leader UMP-UDI, au fort ancrage républicain, ne passera aucun accord avec la formation de Marine Le Pen pour accéder au perchoir.

Des Socialistes orphelins de Christian Bourquin


Oui,  les jeux sont ouverts : hors cadre d’un vote sanction national, le PS aura la partie difficile mais le découpage cantonal lui donne des ressources. Les socialistes ont passé un accord départemental avec le PCF pour éviter l’élimination que provoque la loi électorale. La qualification pour le second tour nécessite l’obtention de 12,5% des inscrits. Avec l’abstention annoncée, il sera indispensable de monter aux alentours de 28% des votants ou alors d’obtenir la seconde place. Cette logique d’union est un viatique pour la gauche. Seulement les Verts et le Parti de Gauche, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon, ont décidé de s’unir dans la moitié des cantons et de concurrencer les candidats de la gauche réformiste.
Les candidats de la majorité sortante partiront à la bataille sans logo partisan. Hermeline Malherbes et ses amis se présenteront devant les électeurs avec la bannière « Majorité départementale ».
Arrivée au perchoir au lendemain du départ de Christian Bourquin, Madame Malherbes a peu à peu affirmé son style : connaissance des dossiers et pratique du terrain. Elle a gagné en étoffe ce que ses détracteurs lui refusaient au début de sa prise de responsabilités. Pour remporter ces élections, elle doit affirmer le bilan de Christian Bourquin et dénationaliser le scrutin. Ce n’est pas là chose aisée tant l’ex président du département maniait « l’art de la guerre » avec une ruse de sioux et une autorité implacable. L’idée de maintenir un autre style de gouvernance (plus apaisée) pourrait être une des clés de la communication politique des socialistes.

La droite en ordre de bataille


Le nom de Jean Castex est primordial. Parce qu’il signifie la redéfinition d’un leadership pour la droite républicaine. Longtemps dévorée par les rivalités publiques si ce n’est clanique dans les années 1990, la droite catalane a pâti de l’absence d’un capitaine incarnant l’idée de l’alternance. Au-delà même d’un CV élogieux (ENA et Cour des Comptes), le maire de Prades a gagné cette autorité par le terrain. Plus précisément par la reconquête de sa ville dès le premier tour avec plus de 70% des voix il y a un an . Cette réélection n’est pas pour rien dans l’acceptation de cette position de leader tant cette UMP catalane compte de « vieux grognards » et de « féodaux » avec lesquels il est indispensable de composer.
La campagne de l’Union UMP/UDI est bâtie autour d’un programme de 5 points saillants. Par mi eux, la mise en place d’un plan « Marshall » pour dynamiser le tissu économique des PMI-PME anémié par la crise économique et le contrôle des aides sociales pour éviter la fraude. Le cœur du combat électoral sur les territoires se concentre sur le littoral et dans l’environnement de Perpignan. Là se gagnera ou se perdra le département.  Cependant sur ces territoires, Jean Castex a su trouver une union large même si la présence des candidats de Bruno Delmas , président du Think Thank « L’olivier » pourrait gêner, à la marge -avec l’appui du Modem de Christine Espert- le premier tour des candidats UMP-UDI.

Un littoral très à droite, à Perpignan rien n’est figé.
Sur le littoral, l’emprise de la droite devrait se trouvait confirmée, voire amplifiée notamment sur la côte Vermeille où la défaite municipale de Michel Moly à Collioure pourrait donner des idées à la droite. Le cas du canton de Saint-Laurent de la Salanque est plus problématique. Sur le papier, l’association d’Alain Got, le récent maire de Saint-Laurent, et de la fille d’Alain Ferran, le maire du Barcarès, réunit toutes les conditions de succès. Cependant, le caractère clivant de la personnalité politique des Ferran devrait être un des thèmes centraux de la campagne de José Puig, le maire de Claira, un centriste associé à la majorité départementale. Lors de sa précédente élection il avait bénéficié d’une certaine mansuétude du maire du Barcarès.
A Perpignan, 6 cantons en jeu. L. Les élus de Jean-Marc Pujol sont en première ligne. Olivier Amiel, l’adjoint à  la politique de la ville, ou encore Romain Grau, le premier adjoint.  Si le résultat des élections municipales a laissé une gauche PS-PCF exténuée (moins de 12% des suffrages recueillis par le député Cresta), les élections départementales pourraient dessiner un autre scénario. Si les cantons de Perpignan 1, 2 et 4 paraissent impossibles à gagner pour la gauche, le découpage territorial pour les autres a ajouté des villes peri-urbaines où la gauche est implantée. Ainsi, la présidente du Département se présentera aux côtés de Jean Roque, le maire de Toulouges, sur Perpignan 6 espérant une grande mobilisation de l’électorat de Toulouges. Idem sur le canton de Perpignan 5, binôme socialiste Toussainte Calabrese/Jean Louis Chambon, où l’apport de Canohès peut nuancer le vote perpignanais.

Le Front National : arbitre et compétiteur


Toutefois, sur les cantons littoraux et urbains, il est une certitude : la permanence du vote Front National. Premièrement, le vote frontiste est historiquement installé en Catalogne du Nord et sociologiquement accepté. Deuxièmement, le conteste national. La récente élection partielle du Doubs a montré non pas une augmentation du vote FN en valeurs absolues mais une très grande mobilisation de son électorat alors que les partis traditionnels sont gravement touchés par un rejet dont l’abstention est un des traits. De telle sorte qu’il est possible d’estimer la présence du FN au second tour dans plus de la moitié des cantons, y compris dans le rural où l’UMP dispose de peu d’encadrements militants (Vallespir/Albères par exemple). Certaines études commandées par des partis politiques, et se basant sur les simulations procédant des scrutins récents, postulent l’éventuelle élection de candidats FN sur 3 cantons de Perpignan. Cela signifierait que le parti de droite nationale a brisé le plafond de verre de la majorité des 50% lors d’un deuxième tour. Jadis repoussée par les politologues, cette hypothèse n’est plus incongrue. L’élection d’un conseiller général FN à Brignolles, dans le Var, démontre la banalisation d’un vote mariniste et sa porosité électorale. Elle ne concerne pas seulement l’électorat issu de la droite.

Le rural plutôt à gauche


A priori, dans les territoires ruraux, la gauche devrait moins souffrir. Parce que sociologiquement, ces territoires sont plutôt marqués de ce côté-ci de l’échiquier politique mais aussi parce que l’action d’un conseil général y est plus visible et donc le contrôle social plus grand.
Par exemple, dans les cantons de la sous-préfecture de Céret, les candidats de gauche peuvent nourrir de réels optimismes. D’ailleurs, la ministre Ségolène Neuville se présente (alors qu’à ce jour elle est la représentante d’un secteur de Perpignan) sur un canton nommé Canigou. Ce territoire embrasse toute la Montagne. Il va de la Frontière espagnole (Coustouges) jusqu’à Vernet les Bains. D’un point à l’autre il faut deux heures de voiture…
Sur la vallée de l’agly, là aussi la gauche devrait disposer de belles réserves. Elle a décidé de lancer le maire de Maury alors que Jean-Jacques Lopez, le maire de Salses le Château, a choisi de ne pas de représenter au département. Sur le secteur la vallée de la Têt (ex fief de Christian Bourquin autour de Millas), Damienne Beffara, ancienne épouse du président de la région, mènera combat avec le député Olive pour une succession qui s’avère loin d’être insurmontable.
Duel Castex/Armengol
Cette réalité du rural est aussi un défi personnel pour Jean Castex. Son canton s’appelle Pyrénées Catalanes. Il est le cœur même de la 3è circonscription des P-O où fut élue Ségolène Neuville. Quasiment tout l’arrondissement de Prades. Face à lui Georges Armengol, « le maître de la Cerdagne ». Il est l’inamovible conseiller général de Saillagouse. Peu importe l’étiquette, les électeurs lui font confiance. D’abord élu centre gauche, il passe ensuite centre droit. Pour le scrutin de Mars 2015, il aura le soutien de la majorité départementale ; socialiste donc. Bref, un profil compatible avec tous les électorats modérés.
Outre, le poids démographique de Prades, Jean Castex devrait aussi mettre en avant son image de consensus pour répondre à la concurrence de M. Armengol. Son bilan du Président de la Communauté des Communes autour de Prades, où la majorité des élus sont de gauche, lui servira à démontrer son attachement aux projets d’intérêt général. La bataille dans ce coin du département s’annonce intéressante et pertinente.

Un doyen d’âge ?


Les élections dans le département des Pyrénées-Orientales sont incertaines. Les années Bourquin caractérisées par l’insolence des triomphes de la gauche sont derrière. Le contexte national et les difficultés dans l’urbain et peri-urbain, dont le corollaire est la montée d’un vote d’adhésion au front National, rendent la tâche de la gauche ardue. Cependant, pour en éviter l’écueil, le PS a perdu son penchant hégémonique pour laisser de l’espace politique à ses autres partenaires, si précieux en ces temps de disette. La droite a une chance historique de l’emporter, et le FN peut-être de voir l’élection de quelques militants dans l’assemblée. Ici, tous les scénarios sont à envisager jusqu’à une égalité du nombre d’élus. Dans ce cas-là, le doyen d’âge l’emporte. A ce jour, les candidats les plus âgés sont Réné Olive (élu de Thuir) et Jean Vila (élu de Cabestany). Les deux sont de gauche. Un atout au cas où.
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