"Chaque jour, j'imagine qu'on m'arrête dans la rue" : un Iranien chrétien menacé d'expulsion risque la peine de mort dans son pays

Les autorités françaises lui refusent l'asile au motif que la sincérité de sa foi ne peut être prouvée. Converti au christianisme en République islamique d'Iran, Ata Fathimaharlooei s'est réfugié dans les Pyréenées-Orientales. La préfecture vient de lui adresser une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) pour l'Iran, pays où il est désormais menacé de mort.

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"Si nous rentrons en Iran, nous serons arrêtés à l'aéroport. Les enfants seront envoyés dans des foyers et ma femme et moi irons en prison avant d'attendre notre condamnation."

Originaire de Chiraz, Ata Fathimaharlooei se tourne vers le christianisme après s'être lié d'amitié pour un Arménien, fils de pasteur évangélique. Mais son beau-père menace de le dénoncer à la police des mœurs. Dans le pays persan, l'apostasie - l'abandon de l'Islam en l'occurrence - est un crime passible de peine de mort.

L'infirmier se lance alors sur la route de l'exil aux côtés de sa femme enceinte ; leur premier enfant naîtra en Turquie. Le couple atteint la France en 2018 pour finalement trouver refuge à Perpignan et au centre chrétien du Roussillon. Mais la famille n'a depuis toujours pas trouvé l'apaisement : les autorités françaises continuent de leur refuser l'asile au motif que la sincérité de leur foi chrétienne ne peut être prouvée.

Juger de la sincérité d'une conversion

"C'est déjà rationnellement impossible", s'étonne l'avocat des Fathimaharlooei, Me Gérald Brivet Galaup, avant de poursuivre sa démonstration : "J'aimerais qu'on m'explique : comment fait-on pour juger d'un sentiment aussi intime que la foi ?"

L'avocat ne s'arrête pas là : "Il est par ailleurs très étonnant que la juridiction d'une République laïque s'arroge le droit de statuer sur la sincérité d'une conversion."

Pour défendre son client, Me Gérald Brivet Galaup dit s'être basé sur "des faits objectifs" : à Perpignan, le couple d'infirmiers iranien fréquenterait l'Église protestante assidûment, tandis que leur deuxième enfant - né sur le sol français - porte un nom chrétien.

Le deuxième volet de son argumentaire consiste à prouver qu'Ata et sa famille sont bel et bien en danger dans leur pays d'origine, soit la condition principale pour obtenir l'asile. Car une chose est sûre, selon l'avocat : "les autorités iraniennes, elles, sont convaincues de la sincérité de la foi chrétienne des Fathimaharlooei".

OQTF

"Chaque jour, j'imagine quelqu'un dans mon dos qui m'arrête dans la rue, comme dans un mauvais film", témoigne Ata Fathimaharlooei lundi 15 janvier, juste après les cours de français que lui et son épouse continuent de suivre à l'université.

Depuis 2018, l'Iranien s'est aussi engagé dans une association locale et une maison de quartier. Pour travailler légalement, il aurait néanmoins besoin de papiers. Son avocat espérait qu'il puisse rentrer dans la liste des métiers en tension de la nouvelle loi asile immigration mais une OQTF est venue contrarier leur plan.

Depuis la mi-décembre, Ata Fathimaharlooei est effectivement obligé de quitter le territoire français, sous peine d'expulsion. Et au grand étonnement de son avocat, la décision ne le concerne que lui : pas sa femme ni ses enfants.

Émettrice de l'OQTF en question, la préfecture des Pyrénées-orientales répond que ce courrier n'est que la suite logique des décisions prises successivement par l'Ofpra puis la CNDA : "des organismes indépendants seul habilités à juger des risques encourus en cas de retour dans le pays d’origine et d'octroyer à ce titre une protection internationale".

Droit à la vie

"Je veux bien admettre que les OQTF surviennent automatiquement après le refus d'une demande d'asile", réagit Me Brivet Galaup. "Mais il ne faut pas oublier que derrière ces décisions, il y a des êtres humains".

L'avocat n'a pas dit son dernier mot. L'OQTF ayant été adressée à l'ancien domicile d'Ata Fathimaharlooei, Me Brivet Galaup n'a pu formuler un recours dans les délais autorisés.

Il compte donc s'opposer au refus de son recours, pour contester, à terme, "la raison d'être de cette OQTF", qui porte d'après lui "atteinte au droit à la vie, à la liberté religieuse et à d'autres fondamentaux de la démocratie française".

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