Crise viticole : "un beau mariage entre le muscat et la bière", quand une brasserie distille du vin pour valoriser son terroir

Lorsque la bière vient au secours du vin. Une brasserie des Pyrénées-Orientales teste un assemblage avec du muscat local. Une manière d'aider le secteur de la viticulture en pleine crise.

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La fin des vendanges est compliquée à Maury, près de Perpignan dans les Pyrénées-Orientales. Aux côtés de Sophie Batlle, vigneronne, une spécialiste de la bière, Elodie Pujol, venue acheter du muscat. "Le terroir de la vallée de l'Agly et de celui de Maury ont énormément souffert de la sécheresse. C'était donc pour moi encore plus important de mettre en lumière ces vignes et ces vins que j'adore", explique-t-elle. C'est du muscat qu'elle va mélanger avec de la bière. 

"Les vins doux naturels ont besoin d'être un peu démocratisés. C'est aussi une manière de valoriser notre muscat. Ce sont deux savoir-faire, deux amours du travail bien fait. C'est un beau mariage, une belle complicité entre le muscat et la bière", renchérit Sohie Batlle, la vigneronne.

Assemblage précurseur

Un travail d'assemblage qui se réalise à l'entrée de Céret dans l'ancienne usine de papier à cigarette Job. Elle abrite maintenant la nouvelle brasserie Cap d'Ona. On y travaille le moût de raisin pour un assemblage vin-bière précurseur.

"On fait de l'assemblage depuis 25 ans. On a commencé avec notre vin doux au Banyuls. Là on assemble la bière au muscat. On essaye de défendre les vignerons d'ici qui sont en ce moment en difficulté", ajoute Grégor Engler, créateur, brasseur et distillateur de Cap d'Ona.

À base de produits locaux

C'est même la philosophie de l'entreprise qui produit une quinzaine de bières différentes avec des productions du pays catalan. Elles vont du muscat à la pêche de vigne, en passant par la cerise, l'abricot et le seigle de Cerdagne.

On peut aussi faire du commerce équitable en sauvant nos producteurs et nos paysages.

Elodie Pujol

Présidente de la brasserie Cap d'Ona

"On peut faire du commerce équitable pour sauver des mangroves à l'autre bout du monde et c'est très bien. Mais si les gens peuvent faire aussi du commerce équitable en sauvant nos producteurs et nos paysages, ça met tout le sens à notre travail et c'est notre saison d'être", conclut Elodie Pujol.

Une démarche de proximité payante. Cap d'Ona a été élue meilleure brasserie du monde en 2024.

Multiplication des brasseries indépendantes

Depuis quelques années, les bières artisanales s'imposent sur le marché des boissons alcoolisées un peu partout en France. En Occitanie, les brasseurs indépendants se multiplient, on comptait 170 structures indépendantes dont plus de 80 dans l’ex Languedoc-Roussillon en 2020. Exemple à Sète, avec Jérôme un ancien skipper reconverti en brasseur. Il a ouvert une brasserie avec sa compagne. Leur ambition, créer une bière 100% sétoise pour accompagner les tielles et les huîtres. Une de ses bières est fabriquée avec du miel des Cévennes.

Sébastien et Jean-Olivier sont installés à Béziers. Ils veulent également créer toute une gamme de bières biterroises, avec l’envie de l’exporter au-delà des frontières.

Phénomène mondial

L’engouement pour la bière artisanale est un phénomène mondial, en France on compte 1300 sites de production dont la moitié a moins de cinq ans d'existence.

Si beaucoup de brasseurs s’installent dans la région, c’est parce qu’il y a le phénomène du « do it yourself » explique Garlonn Kergourlay, déléguée du Syndicat National des Brasseurs Indépendants.

Signe de l'engouement croissant pour la bière artisanale dans une région viticole, l'Hérault a même organisé son premier salon de la Brasserie, en juillet 2023 au Cap d'Agde.

70 % des bières consommées en France sont locales.

Écrit avec Marc Tamon.

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