Le décès d'Elizabeth II est un événement planétaire. La Première ministre Elisabeth Borne a donc demandé aux maires de France de mettre les drapeaux en berne, vendredi dernier, en respect à la souveraine disparue puis lundi prochain lors de ses funérailles. Mais en Pays catalan, certains élus n'approuvent pas.
Une poignée de maires de France refusent de mettre les drapeaux en berne pour le décès de la reine d'Angleterre et du Royaume-Uni. Ils jugent la mesure "excessive" en France s'agissant d'une personnalité étrangère et surtout d'un monarque, chef de l'église anglicane. Mais la reine était aussi cheffe de l'Etat.
Dans les Pyrénées-Orientales, les voix discordantes viennent notamment des maires d'Estagel, d'Alénya, de Cabestany ou encore d'Elne.
Des maires et des polémiques !
Pour la maire de Cabestany : "On perd les réalités républicaines et le sens des priorités avec des polémiques qui n'en sont pas". Vendredi dernier, ses services municipaux ont mis en berne les drapeaux de la commune à la demande du gouvernement, par respect, même si personnellement l'élue n'y était pas favorable. Mais pour lundi prochain, Edith Pugnet se pose des questions.
Face à la polémique, je ne sais pas quoi faire pour lundi, jour des funérailles. Je vais réunir le bureau municipal dans la semaine et nous allons en parler. On avisera ensuite... Moi, je trouve que l'on en fait trop !
Edith Pugnet, maire de Cabestany.
La municipalité d'Estagel, jointe par France 3 Occitanie, a fait savoir qu'elle n'avait "aucun commentaire à faire à la presse sur ce sujet".
Du côté d'Alénya, le maire communiste met en avant sa fibre républicaine. Il a expliqué sa position à nos confrères de France bleu Roussillon. "Quand mes services m’ont demandé s’ils devaient mettre le drapeau en berne, je croyais que c’était une plaisanterie ! Ça me semblait vraiment très gros. Après, effectivement, j’ai vu la circulaire".
Sur le fronton des mairies, il y a écrit Liberté-Égalité-Fraternité : ce sont des valeurs républicaines héritées de la Révolution et j’y suis très attaché. Or il n’y a rien de plus inégalitaire que la monarchie.
Jean-André Magdalou, maire PCF d'Alénya.France bleu Roussillon, le 12 septembre 2022.
Sur les réseaux sociaux, il y a aussi les "pour" et les "contre". Tous ont des arguments !
Deuils et événements exceptionnels
La mise en berne des drapeaux en France s'est produite à de nombreuses reprises. Lors du décès de présidents de la République française, lors des attentats de 2001 aux USA et de 2015 en France, ou encore après le crash du vol Rio-Paris d'Air France en 2009.
Et pour la mort de personnalités "symboliques" comme en 2004 pour le décès de Ronald Reagan, en 2005 pour la mort du pape Jean-Paul II, en 2013 pour honorer la mémoire de Nelson Mandela et plus récemment en 2020 à la suite de l'assassinat de Samuel Paty.
Plus surprenant, en 1953 pour la mort de Staline et en 1975 pour le décès du dirigeant espagnol Franco.
Que dit la loi ?
Actuellement, la mise en berne des drapeaux n'est réglementée en France que par le seul décret du 13 septembre 1989, titre VI section 2 article 47.
Il prévoit que «lors du décès du Président de la République, les drapeaux et étendards des armées prennent le deuil ; les bâtiments de la flotte mettent leurs pavillons en berne» ou en cas de deuil national. Ceci n'est valable que pour les bâtiments militaires. Mais aucune disposition législative ou réglementaire n'en détermine les conditions.
Si les drapeaux qui pavoisent les édifices publics (mairies, écoles, administrations, etc...) sont souvent eux aussi mis en berne dans ces circonstances, ils n'y sont pas tenus par la loi.
En pratique, il appartient au Premier ministre, par l'intermédiaire du secrétaire général du Gouvernement, de donner des instructions aux ministres en vue de la mise en berne des drapeaux lors de deuils officiels. Un message est ensuite adressé à tous les préfets qui sont chargés de veiller au respect de ces instructions.
A l'inverse, le ministre de l'Intérieur dispose du pouvoir de suspendre un maire en cas de refus de procéder au pavoisement national.
En raison de l'absence de normes, la mise en berne «occasionnelle» des drapeaux français et européen suscite parfois l'incompréhension des concitoyens.
Hors des cas particuliers, un maire est donc libre de suivre ou non l'avis émis par le Premier ministre sans craindre les foudres de la justice et des sanctions. D'autant que les juges ne sont pas prompts à trancher sur cette question hautement politique et délicate.