TEMOIGNAGE. Drame de Millas : "je suis un père fatigué", son fils Loïc est mort dans l'accident, il témoigne avant le procès en appel

À la veille du procès en appel de la tragédie de Millas, France 3 Occitanie a rencontré Fabien Bourgeonnier, le père de Loïc, l'une des six victimes. Fatigué et en colère, il dénonce une procédure inutile et douloureuse, sept ans après l’accident. Le procès débutera le 7 octobre, sans nouveaux éléments au dossier.

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Sept ans après le tragique accident de Millas qui a coûté la vie à six collégiens, dont son fils Loïc, Fabien Bourgeonnier se prépare à un second procès en appel. Fatigué et en colère, ce père de famille dénonce une procédure inutile et douloureuse, alors qu’aucun nouvel élément n’a été ajouté au dossier. Le procès, qui se tiendra du 7 au 25 octobre, ravive des blessures encore vives.

Comment vous sentez-vous à l'approche de ce second procès ?

Je suis un père fatigué, fatigué de revivre un procès qui ne sert à rien. Il y a des procès où il y a des nouvelles données, des nouvelles informations, des nouvelles preuves. C'est très dur pour les familles, très dur pour les victimes mais c'est un travail qu'il faut faire. Sur le drame de Millas, il n'y a rien. Il n'y a pas d'évolution, on n'a rien appris de plus, donc on se demande à quoi ça sert. On se demande pourquoi on fait revenir dix-sept enfants, qui pour la plupart maintenant sont majeurs, qui essaient de reprendre le cours d'une vie, qui essaient de travailler, de panser leurs plaies ou leur handicap pour certains, des maux, des traumatismes et à qui on va faire revivre ça. Donc c'est ça mon humeur.

Vous êtes en colère ?

Oui. Cette femme a pris la peine minimale. Elle n'ira jamais en prison car elle a pris en dessous de deux ans, elle porte un bracelet électronique. On lui a juste retiré son permis poids lourds. Dans cinq ans, elle pourra le récupérer. Qu'est-ce qu'elle a perdu, elle ? Moi j'ai perdu un enfant. J'ai pris perpétuité. Mon enfant et les six enfants, nos six anges ont été jugés d'un crime qu'ils n'ont jamais commis. Ils avaient entre onze et treize ans. Ils étaient écoliers. Ils rentraient de l'école. Ils allaient au sport, faire leurs activités, fêter leur anniversaire... Ils n'ont commis aucun crime et on les a jugés coupables.

Alors, pourquoi être contre ce procès en appel ?

Parce qu'on nous fait revivre un procès sous prétexte qu'un avocat de la défense ne veut pas que l'entreprise responsable de la conductrice, l'entreprise Faur, nous rembourse les frais engendrés et pour aider les assureurs. C'est ça la problématique de ce nouveau procès. 

Alors, selon vous, ce procès ne sert à rien ?

Strictement à rien. Encore une fois, si on nous donnait de nouvelles données, je suis preneur. Je l'avais déjà dit au premier procès à l'avocat de la défense, Maître Codognès, que s'il avait des informations, qu'il me les donne. Au jour d'aujourd'hui, il ne m'a rien donné.

Pour ma part, depuis trois ans, j’ai rejoint un collectif avec lequel on travaille sur la sécurisation des passages à niveaux. Trois ans que j'ai des réunions régulières avec l'Etat, la SNCF, la voirie, avec des maires, des préfets. Il y a des rapports qui sont faits. Et en l'occurrence, le passage 25 de Millas, le dernier rapport a été fait en 2022 et ce rapport dit bien qu'en dix ans il n'y a eu aucun incident et aucun accident mis à part le drame de Millas. Donc ça signifie qu'il n'y a pas eu de défaut de barrière ni quoi que ce soit. En 2024 il y a eu deux accrochages mais qui étaient dû aux usagers.

Il y a huit ans, la route départementale était très dangereuse. Cette route a été refaite, donc on a une ligne droite avec un passage à niveau qui n'est pas commode pour les bus et ça, il faut le dire. D'ailleurs, on peut se poser la question du pourquoi on a un collège entre deux passages à niveau. La défense devrait jouer là-dessus, elle devrait se battre sur çà parce que ça n'est pas normal. Après, ce passage à niveau n'est pas plus dangereux que les autres. Et quand on parle de la SNCF, elle a déjà été reconnue coupable sur d'autres drames mais là il n'y a rien. Donc ça n'est pas la peine de refaire vivre un calvaire à des enfants, et je ne parle même pas des parents, uniquement des vingt-trois enfants victimes de ce drame à qui on a manqué de respect, qu'on a traité de menteurs, qu'on a insultés, menacés... Et là on leur fait revivre tout ça ? C'est honteux.

Ce second procès peut-il tout de même servir à se dire que ce sera enfin fini ?

Non. On sera même amené à se revoir puisque l'avocat de la défense Maître Codognès nous a clairement dit qu'il irait jusqu'à la Cour européenne. Pourtant il n'y a aucun rebondissement, aucune enquête n'a été faite depuis le premier procès et le contre expert judiciaire que la défense fait venir n'est même jamais venu à Millas, il ne connaît pas Millas. Il s'est basé sur une photo. Son rapport avait été démoli par les experts à l'époque et c'est ce qui va encore se passer cette fois. Quel est le but de tout ça ? C'est sans fin.

Vous le ressentez comme de l'acharnement ?

Complètement. Et encore une fois, il n'est pas question ici de défendre la conductrice mais l'entreprise Faur et l'assureur. Mon combat il est pour les victimes, l'amélioration de la prise en charge de victimes, l'amélioration de l'annonce d'un décès, la prévention en milieu scolaire, la prévention sur les passages à niveau... Je demande juste qu'on arrête les bêtises et surtout qu'on respecte les victimes. 

Propos recueillis par Jordan Lassere et Marie Boscher.

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