L’Assemblée nationale a rejeté ce mercredi 15 mars la réforme controversée de la sûreté nucléaire. Certains députés de la majorité ont rejoint la gauche pour empêcher la disparition de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Un soulagement pour les membres de Stop Golfech.
L’Assemblée nationale a rejeté mercredi en première lecture la réforme controversée de la sûreté nucléaire. Plusieurs députés de la majorité se sont alliés à la gauche pour s’opposer au "démantèlement" de l'IRSN, l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. Sa disparition avait été annoncée par le gouvernement le 8 février.
L'exécutif souhaite en effet dissoudre l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), expert technique, dans l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qui fait figure de gendarme du secteur. Mais les députés ont approuvé à main levée un amendement de Benjamin Saint-Huile, du groupe indépendant LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires). Les opposants veulent préserver une "organisation duale" qui a fait ses preuves, estiment-ils.
Décision positive
Du côté de la centrale de Golfech, les opposants se félicitent de cette nouvelle. "Plus il y a de gens qui contrôlent le nucléaire, mieux c'est, réagit Monique Guittenit de la coordination Stop Golfech. Actuellement on n'a que des nouvelles très négatives, c'est enfin quelque chose de positif. La situation du nucléaire est dramatique avec cette dernière découverte des fissures à Penly (Seine-Maritime). Tout s'ajoute. Et même si on a contesté souvent l'IRSN qu'on trouvait mou, notamment par rapport à Fukushima, on est content que les députés s'opposent à sa disparition".
"C'est une décision qui avait été prise de façon unilatérale, sans concertation et ça semble logique que l'assemblée nationale s'y oppose car elle est complètement coupée des enjeux des dossiers qui nous attendent sur la question des fissures, les enjeux thermiques ou le grand carénage", abonde André Crouzet de Stop Golfech.
Expertise indispensable
Pour lui, l'IRSN et l'ASN ne rendent pas compte des mêmes niveaux d'alerte. "On a vu que sur les fissures de Penly, Karine Herviou, la directrice générale adjointe de l'IRSN, chargée du pôle sûreté des installations et des systèmes nucléaires, parlait d'alerte au niveau 2 alors que l'ASN n'avait pas le même discours".
Un exemple emblématique qui dit à lui seul l'importance de préserver l'IRSN selon André Crouzet. "Ces problèmes de fissures ont été détectés dans les années 80 mais la durée de vie des centrales étant de 30 ans, on pensait échapper au problème. Aujourd'hui on parle d'une longévité de 40 à 50 ans. Or c'est un problème générique de construction comme pour les voitures qu'on rappelle. Mais une centrale, on ne peut pas la rappeler. On va mettre une rustine et voir si ça tient. On n'a pas de réponse technique, or la fissure fait 23 cm de profondeur sur 27. On a 80% de fissure avec un risque de rupture. L'ASN nous disait que les nouvelles technologies devaient être plus sûres. On voit à Penly que ce n'est pas le cas et c'est très inquiétant !".
Une première étape
Les opposants à la réforme de la sûreté nucléaire craignent que l'économie ne prenne le pas sur la sécurité, d'autant plus qu'EDF est surendettée. Le projet qui vise à fondre l'IRSN dans l'ASN pour accélérer les procédures dans le cadre de la relance du nucléaire inquiète donc à plus d'un titre.
ll a été largement dénoncé au plan national, notamment pas les Commissions locales d'information (CLI). Elles avaient voté une motion contre cette dissolution de l'IRSN. Parmi elles, celle de Golfech dont Jean-Paul Terenne, le président-délégué de la CLI de Golfech nous expliquait en début de semaine que "ce dispositif dual démontrait une efficacité en matière de gouvernance des risques".
Nul doute que les responsables des CLI soient à ce jour soulagés. Mais le dossier n'est pas clos. Le gouvernement peut recourir à une deuxième délibération. Les débats sur le reste du projet de loi ont été prolongés jusqu'à vendredi soir au Palais-Bourbon, avant un vote solennel le mardi 21 mars. La navette parlementaire se poursuivra ensuite, a prévenu la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher.