La teinture au pastel, qui a fait la renommée et la richesse du triangle Albi-Toulouse-Lavaur, est désormais inscrite au patrimoine culturel immatériel français. Une reconnaissance qui devrait accompagner la filière qui le fait revivre aujourd'hui.
On l'appelait le pays de cocagne : cocagne étant la "coque". Cette boule de feuilles écrasées et compactées à la main par les cultivateurs de la plante appelée le pastel, était fabriquée entre le XVème et le XVIIème siècle dans le Lauragais et l'Albigeois, soit dans un triangle entre Albi, Toulouse et Carcassonne.
Des dynasties pastellières
Le pastel, qui contient un principe colorant bleu, a fait la fortune des entrepreneurs du midi toulousain, des créanciers citadins fortunés qui ont fondé de véritables dynasties pastellières. La ville rose en porte encore les traces dans les hôtels particuliers qu'elle recèle. On dit aussi que c'est la présence du pastel qui a permis au bleu des voûtes de la cathédrale Sainte-Cécile d'Albi de garder son éclat.
Les coques produites dans le pays de cocagne sont acheminées à Toulouse, dans le quartier du Bazacle notamment et de là, partent par bateaux à Bordeaux puis dans tout le nord de l'Europe ou encore en Espagne via Bayonne et Orthez.
La concurrence venue des Indes
Mais le pastel connaît un revers majeur, un coup fatal porté par les guerres de religion et les importations. L'indigo lui fait concurrence, venu d'Inde via l'Amérique, il possède des propriétés tinctoriales plus puissantes que le pastel. Il est en outre moins cher et moins long à travailler et n'aura donc aucune peine à remplacer ce dernier.
Mais le pastel n'a pas pour autant complètement disparu d'Occitanie. Ce savoir-faire emblématique de notre région, lié à l'artisanat traditionnel, continue de vivre grâce à une transmission de génération en génération. Ainsi la filière du pastel compte aujourd'hui 20 entreprises “ennoblisseurs textile au Pastel”, près de 30 “ennoblisseurs textile teinture naturelle” (dont le pastel), ainsi qu'une communauté de maîtres teinturiers, artisans d’art et créateurs-designers.
Des chercheurs et scientifiques travaillent actuellement à une amélioration des procédés d’extraction et de teinture.
Une filière vivante et reconnue
C'est forte de cette résurgence que la chambre des métiers et de l'artisanat d'Occitanie, avec le soutien de la région, a porté ce projet et qu'une candidature a été officiellement déposée au début du mois de juin dernier. Le comité du patrimoine ethnologique et immatériel du Ministère de la Culture, réuni le 29 juin 2021, y a répondu favorablement, les “savoir-faire liés à la teinture au pastel, en pays de Cocagne” sont donc désormais inscrits à l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel français.
Concrètement, les acteurs de la filière vont pouvoir optimiser leurs productions en bénéficiant du logo "Patrimoine culturel immatériel de la France".
Pour en savoir plus sur l'histoire du pastel dans le midi-toulousain, deux jolies visites sont à faire : la première au Museum du Pastel à Labège, la seconde au château de Magrin dans le Tarn, au coeur du pays de Cocagne.