Affaire Jubillar : entretien avec l'avocat d'une famille qui oscille entre espoir et désespoir

Trois mois après la disparition de Delphine Jubillar de son domicile de Cagnac-les-mines (Tarn), le mystère reste entier. Face à toutes les allégations, rumeurs, l'avocat de la famille de Delphine, Me Laurent Nakache Haarfi répond à nos questions et demande de garder la raison. Entretien.

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Depuis trois mois et la disparition de Delphine Jubillar de son domicile de Cagnac-les-Mines dans le Tarn, la parole de l'avocat de la famille de la jeune mère disparue, Maître Laurent Nakache Haarfi est rare. Entre rumeurs et allégations quotidiennes, le mystère pèse dans une affaire qui attire l'attention de toute la France. Le conseil des frères et de la soeur de la jeune mère de famille demande pourtant de garder la raison.   

France 3 Occitanie : Maître Laurent Nakache Haarfi, vous êtes aux côtés des frères et de la soeur de Delphine Aussaguel-Jubillar, dans quel état d'esprit sont-ils trois mois après sa disparition ?

Maître Laurent Nakache Haarf : ils sont entre l'espoir de la retrouver et le véritable désespoir de ne pas savoir où elle est, ce qui s'est passé et vers quoi on va se diriger. Trois mois c'est toujours long. En règle générale, on se dit qu'on va toujours finir par trouver quelque chose. Pour le temps judiciaire, en revanche, c'est excessivement court.

Souvent ce genre d'affaires se dénoue avec le temps, avec les preuves que l'on va trouver au fur et à mesure.

Il est vrai que l'on s'en rend compte en tant qu'avocat que très souvent ce que l'on découvre au tout départ d'une affaire suffira pour se faire une idée de cette dernière. Mais je pense que pour la famille, trois mois ça commence à être long.

France 3 Occitanie : cette affaire a pris une grande ampleur car c'est une maman, la disparition d'une mère sans laisser de trace suscite toujours beaucoup d'émotions ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : pour la famille et pour tout un chacun, une mère de famille qui vient juste d'avoir un jeune enfant, ne disparait pas comme ça, du jour au lendemain. Elle ne va pas essayer de "refaire sa vie" comme certains ont pu l'évoquer.

C'est pourquoi, à notre sens, il n'y a pas de mystère. Delphine n'aurait pas pu tout abandonner du jour au lendemain, en pleine nuit, en laissant ses enfants derrière elle. C'est inimaginable.

Elle préparait Noël avec sa famille. Elle avait eu sa soeur au téléphone le jour même pour préparer les cadeaux. Cette disparation soudaine ne peut pas être volontaire.

France 3 Occitanie : il y avait une séparation dans l'air ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : la séparation du couple était envisagée par les deux parties. Chaque partie avait pris contact avec un avocat pour fixer les modalités de cette rupture. La famille était informée de cette séparation.

Delphine, c'était la mère de famille parfaite. Elle s'occupait des enfants dans la journée, à la sortie de l'école. Elle travaillait de nuit pour pouvoir s'occuper d'eux à la maison. C'est pour cette raison qu'on ne peut pas comprendre cette disparation tant elle était attachée à eux. On ne peut envisager que les hypothèses les plus dramatiques.

France 3 Occitanie : si on ne part pas volontairement, il y a alors plusieurs hypothèses. Cela peut être l'enlèvement ? La mauvaise rencontre ? Mais aussi la piste criminelle avec le mari Cédric ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : la famille de Delphine ne s'est jamais prononcée sur les différentes pistes et ne souhaitent pas se prononcer. Elle ne veut incriminer personne car, à ce jour, on ne sait pas. En revanche, on espère que les gendarmes et la justice vont faire le nécessaire pour apporter la lumière sur cette disparition.

J'ai l'impression que notre justice n'a pas vraiment les moyens de ses prétentions. A Cagnac, on est sur un terrain accidenté, miné. A-t-on vraiment mené toutes les recherches nécessaires pour retrouver un corps ? A-t-on les moyens en France pour faire ce type de recherches ?

Il me paraît difficile à ce jour de commettre un crime sans laisser de traces. Je ne sais pas si nous avons les moyens humains nécessaires pour retrouver un corps.

France 3 Occitanie : et la thèse du suicide ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : pour la famille il n'a jamais été question d'un départ volontaire ou d'un suicide. Elle est mère de famille d'un jeune enfant. Elle n'avait pas de problèmes de dépression. La thése du suicide est écartée selon eux.

France 3 Occitanie : cette affaire a fait couler beaucoup d'encre. Il y a eu des témoins anonymes. Comment vivez-vous cette agitation médiatique ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : la famille de Delphine ne s'est jamais positionnée sur les réseaux sociaux ou dans les médias pour donner une vision des choses ou pour s'exprimer sur ce qui se serait passé. Je pense qu'il est important dans ce genre de dossier de garder raison car on ne connait rien. Nous n'avons aucune connaissance de ce qui s'est passé, et nous n'avons pas d'éléments pour dire ce qui se serait passé.

Il est certain que ce qui circule sur les réseaux sociaux contribue à créer une sorte de zizanie, à partir vers tout et n'importe quoi et à avoir finalement des conséquences néfastes sur l'enquête. Il est important de réussir à préserver la vie privée de la famille, des enfants, de Delphine et même de Cédric. On parle à tort et à travers dans ce dossier.

France 3 Occitanie : les réseaux sociaux se déchaînent. Maintenant on parle même de la vie privée de Delphine, de plusieurs amants, que pensez-vous de ce déballage médiatique ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : je pense que cela va à l'encontre de l'enquête. On va dépeindre la victime d'une certaine façon donc on va à l'encontre de l'enquête. On oublie en plus que derrière il y a une femme, des enfants, la famille de Delphine. Ils vivent très mal ce que l'on dit sur elle.

France 3 Occitanie : Cédric ne s'est jamais exprimé, ni la famille de Delphine, ce qui explique peut-être ce déchaînement des réseaux sociaux et des médias. C'est peut-être ce silence qui rajoute du mystère à cette dossier ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : on oublie une chose, lorsqu'une affaire est en instruction, il y a le secret judiciaire qui est obligatoire. On ne peut pas parler d'une affaire en cours d'instruction. C'est pour préserver la sérénité de l'enquête. Moi je trouve qu'à l'inverse cela parle beaucoup trop, y compris dans les médias.

On parle d'éléments que moi-même je ne connais pas.

La famille de Delphine c'est "Monsieur tout le monde", se sont des gens simples, qui ont une vie normale à qui il arrive un événement dramatique. Leur intérêt ce n'est pas de parler aux médias. Ils veulent protéger leur famille, les enfants de Delphine.

Les seules personnes avec qui ils doivent échanger se sont les enquêteurs, les gendarmes et les juges.

France 3 Occitanie : vous avez hâte d'avoir accès au dossier ?

Maître Laurent Nakache Haarfi : c'est un moment attendu pour savoir ce qui a été trouvé. Qui a dit quoi ? Quand ? Ce qui permet de recouper les informations. Surtout la famille n'a qu'un seul but : aider les juges à retrouver Delphine.

Mais je pense que dans certaines situations, il faut savoir être patient et je pense que la patience est quelque chose d'important dans ce genre de dossier. Si cela met du temps, c'est que nous n'avons pas suffisamment d'informations.

Le fait d'être partie civile va nous permettre d'intervenir dans la procédure et de pouvoir demander un certain nombre d'actes qui nous semblent nécessaires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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