La vente controversée d'un restaurant pourrait précipiter la chute d'une agglomération déjà en pleine tempête judiciaire

La vente d’un bien suscite des remous au sein de la communauté d’agglomération Gaillac-Graulhet. La collectivité est déjà secouée par la mise en examen de son président, Paul Salvador, pour corruption, prise illégale d’intérêt et favoritisme. Une opération immobilière déclenche de nouvelles interrogations et tensions.

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La communauté d’Agglomération "Gaillac-Graulhet" est dans la tourmente. Cette importante collectivité, regroupant 56 communes tarnaises, est en "sursis". Sa principale composante, à savoir la ville de Graulhet, ne cache plus son intention de quitter la structure. Selon nos informations, une expertise, évaluant les conditions d’une sortie, est en cours. Mais, au-delà d’une  éventuelle "mort programmée", la vie de la communauté est marquée par de vives tensions internes, suite à la mise en examen de son président, Paul Salvador.

C’est dans ce contexte tendu, auquel il faut ajouter de sérieux problèmes budgétaires, qu’une nouvelle affaire secoue la communauté d’Agglomération. La vente d’un bien interpelle de nombreux élus. En effet, cette vente conduit à offrir un joli "cadeau" de plusieurs dizaines de milliers d’euros à un acquéreur.

Une "bombe" à retardement juridique ?

Le 16 septembre 2024, lors d’un conseil communautaire, une délibération a acté la vente d’un bien appartenant à "Gaillac-Grauhlet". Il s’agit d’un bâtiment à usage de restaurant et d’un jardin situés sur la commune de Saint-Urcisse. Selon le texte de la délibération, deux particuliers ont proposé d’acquérir ce bien en juillet 2024.

Avant une vente, les biens appartenant au domaine public font l’objet d’une évaluation. La procédure a été respectée. Un avis – consultatif  - chiffre la valeur vénale du bâtiment et du jardin à 91 090 euros.

Selon le vice-président en charge des affaires juridiques , ce prix peut être "minoré" de 15%. Ce taux est, d'ailleurs, supérieur au taux habituellement pratiqué (10%). Autrement dit, "Gaillac-Graulhet" peut céder le bien pour 77 426 euros, mais c’est un plancher.

"Gaillac-Graulhet" est - juridiquement - libre de s'affranchir de l'évaluation domaniale et déroger au prix de 91 090 euros. Elle peut également consentir une "ristourne" supérieure au montant du prix plancher.

Rien de choquant ?

Mais cela crée un problème de sécurité juridique et présente un risque contentieux. La collectivité dispose d'une marge d'appréciation pour fixer le prix. Mais, comme le précise un juriste, "l'évaluation des Domaines sert de point d'appui aux contrôles qu'exercent le Préfet, le juge des comptes et les tribunaux administratifs sur les opérations de vente".

En s'écartant du prix déterminé par les services de l'Etat, "Gaulhet-Gaillac" s'expose donc. Le Conseil d'Etat a déjà annulé des ventes consenties à un prix très inférieur au prix fixé par les Domaines. 

À lire : Après la mise en examen de son président, une communauté d'agglomération plongée dans une situation invraisemblable

Avocat au barreau de Toulouse, spécialisé en droit public, Guillaume Brouquières relativise : " il y a très peu de jurisprudence ou l'on censure l'erreur manifeste d'appréciation. À partir du moment où il y a un motif d'intérêt général et à partir du moment où le prix de vente n'est pas très bas par exemple la moitié de l'évaluation des domaines, il n'y a rien de choquant".

Néanmoins, la règle est habituellement de "coller" à l'évaluation des Domaines avec une marge de 10 à 15%. La plupart des collectivités jouent la prudence.

"Gaillac-Gaulhet" pouvait, en toute "sérénité, vendre le bien 77 426 euros ou 91 090 euros. Mais, en accordant une "ristourne", la collectivité fait un choix qui, dans un climat de tension politique, peut soulever une vraie fausse polémique. 

Des dizaines de milliers d'euros "offerts" au vendeur 

« Gaillac-Graulhet » justifie l’octroi d’un rabais de 17 426 euros par des conditions à respecter, notamment une rénovation du bâtiment. La collectivité invoque également le fait que le bien vendu se situe dans une zone d’attractivité et bénéficie, à ce titre, d’une  "ristourne".

Ce sont des arguments. Mais, en toute hypothèse, le montage financier ne passe pas auprès de certains élus. Même en ayant juridiquement "raison", la collectivité fait une opération perçue comme financièrement contestable.

En effet, "Gaillac-Graulhet" cède un bien en "perdant" ou en "offrant" au vendeur - ce qui revient au même - 31 090 euros. Cette somme correspond aux « -15% » par rapport à l’évaluation des Domaines et au fameux « rabais » de 17 426 euros.

Plus de 30 000 euros, cela fait une belle somme alors que les caisses de la communauté d'Agglomération sont vides. Plusieurs dizaines de milliers d'euros, ce n'est pas rien. Surtout que, selon nos informations, un prêt de 170 000 euros aurait été contracté s'agissant de l'immeuble désormais vendu. 

Contacté par France 3 Occitanie, Paul Boulvrais déclare : "je vous conseille de consulter l'exposé des motifs du texte de la délibération qui motive la décision (ndlr : de vendre), notamment en ce qui concerne le delta entre l'évaluation plancher du service de l'Etat, par le dispositif légal d'aide aux entreprises". Contacté, le président de la communauté d'agglomération, Paul Salvador n'a pas répondu à notre sollicitation au moment de la publication de cet article.

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