La discrétion des laboratoires Pierre Fabre agace des pro autoroute Castres-Toulouse qui se sentent "lâchés". Le second groupe pharmaceutique Français communique moins mais il est toujours aussi actif sur le dossier. Il est intervenu alors que le gouvernement risquait de reculer face à la contestation.
Sans Pierre Fabre et son groupe pharmaceutique, le projet de l'A 69 serait resté dans les cartons. C'est un fait connu. Un seul exemple traduit la détermination, constante et sans faille, du chef d'entreprise tarnais, décédé le 20 juillet 2013. Peu de temps avant sa disparition, gravement malade, il prend tout de même le temps de rencontrer le président de la République de l'époque, François Hollande, pour défendre le dossier.
La rencontre se déroule en 2013 dans le Tarn, à Soual et François Hollande s'engage à réaliser le projet. Neuf ans plus tard, alors que le contrat de concession est signé, le directeur général du groupe prend position publiquement. Toujours en faveur de l'autoroute, bien sûr.
Nous soutenons avec force le projet de l'A 69
Eric Ducournau Directeur Général "Pierre Fabre" - 21 septembre 2022
Mais, depuis plusieurs mois, le groupe ne communique plus publiquement. Cette discrétion ne passe pas inaperçue parmi les défenseurs de l'autoroute.
Un discrétion qui ne passe pas inaperçue
Un décideur local a considéré que "si Fabre s'exprimait ça nous aiderait alors que nous sommes en première ligne. L'argument économique, industriel et l'emploi ça pèse alors que les opposants s'agitent".
Un autre responsable tarnais est plus cash : "ils se planquent car ce n'est plus simple à assumer".
Pour un familier du groupe, plusieurs raisons expliquent cette soudaine discrétion. "Il y a la crainte d'un boycott des produits mais aussi le risque que des activistes viennent perturber l'appareil de production".
Il est difficile de recueillir des avis à "visage découvert" quand il s'agit d'un mastodonte industriel comme Fabre. Aussi c'est encore en demandant l'anonymat qu'un proche des "labos" avance une autre explication : " en interne, c'est compliqué aussi. Tous les salariés ne sont pas sur la même ligne et certains ne sont pas favorables à l'autoroute. Nous ne sommes plus à l'époque où Pierre Fabre était vivant. Quand le patron parlait, tout le monde l'écoutait et le suivait".
C'est d'autant plus compliqué que les opposants ne désarment pas et multiplient les actions : grève de la faim, occupation d'arbre devant être abattus et même action coup de poing sur le site Pierre Fabre des Coquillous à côté de Lavaur. L'A69 est devenu un dossier chaud.
Les "labos" évitent une réculade du gouvernement.
Les témoignages convergent. Plusieurs acteurs du dossier affirment que le gouvernement a manqué de reculer sur l'A69. Fin septembre, le ministre des Transports, Clément Beaune,évoque un moratoire. Cette simple évocation déclenche littéralement un vent de panique chez les défenseurs de l'autoroute.
Comme le souligne un décideur local, "on est passé très très près d'un abandon". Selon nos informations, les laboratoires Pierre Fabre ont alors adressé un courrier au gouvernement.
"Une lettre très claire et très ferme indiquant que si c'est la fin du projet, il n'y aura plus d'investissement dans le Sud du Tarn" indique une source qui a eu le document entre les mains.
Des conseillers de l'Elysée auraient été également destinataire du fameux courrier. Cette intervention, au plus haut niveau de l'Etat, expliquerait un revirement spectaculaire. Moins d'un mois après le spectre d'un moratoire, le ministre des Transports a réaffirmé, le 16 octobre dernier, que le chantier continue et que l'Etat est "déterminé."
Contacté, le groupe Pierre Fabre refuse de répondre à nos questions, nous renvoyant à une réponse aux opposants à l'A69 publié sur son site internet. Le texte date de septembre 2022...