En octobre 2023, un fonctionnaire de la préfecture du Tarn a été mordu par un chien. L'histoire aurait pu s'arrêter là. Mais l'animal de compagnie n'appartient pas à n'importe qui. Son maître est le préfet, Michel Vilbois. Ce dernier a "oublié" de déclarer l'incident comme l'y oblige pourtant la loi.
Avoir du mordant peut être une qualité pour un préfet de la République. Surtout dans un département, le Tarn, où existe un dossier chaud comme l'A 69. Le nouveau représentant de l'Etat, Michel Vilbois, a d’ailleurs montré les "dents" face aux opposants en tenant un discours martial.
En revanche, cela devient plus délicat lorsqu'un agent passe entre les mâchoires de l'animal de compagnie du même préfet, Reika, une femelle Akita de 3 ans et demi qui fait régner la terreur au sein de la préfecture tarnaise.
Un agent mordu à la main
Les faits remontent à octobre 2023. Un agent du service logistique est mordu par le chien de son patron. Contactée par France 3 Occitanie, la préfecture du Tarn confirme l'accident et précise qu'il a eu lieu dans la résidence privée du préfet. Une résidence qui est accolée aux bureaux occupés par les services de l'Etat.
Selon nos informations, la jeune chienne s'en est prise à la main du fonctionnaire. La blessure a occasionné trois semaines de traitement. Pratiquement trois mois après, des séquelles sont toujours présentes.
La préfecture précise auprès de notre rédaction que des mesures ont été prises pour éviter une nouvelle attaque. Les agents de l'Etat ont une nouvelle mission : accompagner le chien pour prévenir tout nouveau coup de dent sur le personnel.
Toujours selon les services préfectoraux, le dispositif est efficace. Néanmoins, il existe un vrai climat de tension et, selon plusieurs témoignages, les fonctionnaires accélèrent le pas dans la cour de la préfecture pour éviter de croiser le chien mordeur.
Un molosse qui s'en est pris à un agent mais aussi à la voiture de fonction du préfet. Une source parle d'un intérieur en lambeau. Le service de communication relativise et parle de deux petites "griffures" sur la carrosserie. Le préfet s'est engagé à réparer les dommages sur ses deniers personnels.
Un "oubli" : la déclaration obligatoire de morsure
Le préfet d'un département n'est pas seulement le patron des services déconcentrés : agriculture, police, gendarmerie, environnement, éducation... Il est également chargé du contrôle de légalité. Autrement dit, il doit veiller à l'application de la loi.
Un texte du 20 juin 2008 impose, en cas de chien mordeur, que son propriétaire fasse une déclaration de la mairie de la commune (art 7).
Cette déclaration obligatoire enclenche une procédure : une mise sous surveillance vétérinaire. L'animal mordeur doit être présenté trois fois à un vétérinaire, dans les 24 heures suivant la morsure, une seconde fois au plus tard le septième jour et enfin une ultime consultation doit intervenir le 15 ème jour.
Une évaluation comportementale doit aussi être faite et la liste des vétérinaires habilités est fixée par...arrêté préfectoral. De même, la mise sous surveillance sanitaire de l'animal mordeur doit être transmise à la Direction Départementale de Protection des Populations (DDPP). Une direction qui est placée sous l'autorité du... préfet.
Après l'incident du fonctionnaire mordu, aucune déclaration n'a été effectuée.
Des délais pour protéger la victime
Malgré tout, les services de l'Etat dans le Tarn affirment que le préfet Vilbois ignorait qu'il devait le faire. Le haut fonctionnaire s'engage à réparer cet oubli. Seul problème : les délais sont forclos.
C'est d'autant plus dommage que le timing fixé par la loi (24 heures après la morsure) est largement dépassé. C'est encore plus regrettable pour l'agent blessé. Les délais rapides pour mettre en place la surveillance sanitaire doivent permettre de protéger la victime contre les conséquences potentiellement graves d'une morsure.
Une morsure peut entraîner des lésions musculaires ou des nerfs mais aussi des infections (piroplasmose, leptospirose, salmonelles...).
Le chien n'en reste pas moins le meilleur ami de l'homme et les préfets les garants de la légalité. En cas de morsure d'un chien et de refus de déclaration obligatoire, il peut demander que l'animal soit placé dans un lieu de dépôt.