Un loup gris, inconnu de la base de données nationale, vient d'être identifié près de Lavaur, dans le Tarn. Mais d'où vient-il ? Est-ce étonnant de le retrouver aux portes de Toulouse ? Une meute est-elle présente en Occitanie. Voici des éléments de réponse.
Les analyses génétiques d'un échantillon de poils, récoltés en décembre 2023 à Marzens dans le Tarn, ont permis d'identifier la présence d'un loup gris de sexe mâle. C'est le cinquième animal officiellement reconnu depuis 2016 dans ce département. Un loup d'origine italo-alpine, a précisé la préfecture, ce 30 mai 2024. Mais quel est son parcours ? Appartient-il à une meute ? Peut-il être vu en ville comme à Toulouse (Haute-Garonne) ? Nous avons soumis ces questions à Patrick Leyrissous, le vice-président de Ferus, association pour la conservation de l'ours, du loup et du lynx en France.
Un "loup disperseur"
Le profil génétique établi pour ce nouveau loup et celui d'un mâle d'origine italo-alpine. Un "pedigree" tout à fait logique, selon Patrick Leyrissoux. Après avoir "été complètement éliminé en France, le loup est revenu en 1992, en provenance d'Italie où il avait été protégé et a pu se redévelopper. Et aujourd'hui, "tous les loups qu'on a dans le sud-est de la France, dans les Alpes et dans la zone alpino-provençale, sont affiliés à ce qu'on appelle la lignée italo-alpine", nous affirme le vice-président de Ferus.
Un loup ne vit pas forcément en meute. Loin de là. "Dans une meute, le couple alpha, celui qui se reproduit, élève et nourrit en priorité les nouveau-nés, nous explique Patrick Leyrissoux. Les loups de l'année d'avant, ils peuvent quitter la meute d'eux-mêmes ou en être éjectés par les parents pour faire un peu de place car leur territoire est limité en ressources alimentaires. C'est un mode d'autorégulation des loups sur un territoire donné."
Ces loups qui s'en vont de la meute, ce sont des "disperseurs". Ils peuvent faire beaucoup de kilomètres avant de s'installer sur un territoire. C'est pour cela que, des fois, on voit des loups passer très loin de leur territoire d'origine.
Patrick Leyrissoux, vice-président de Ferus, coordinateur ours
Un loup, dans une journée, peut facilement parcourir 70 kilomètres. Alors pour ce spécialiste, sa présence aux portes de Toulouse n'a rien de bien étonnant. Le fait que son profil génétique ne soit pas jusqu'ici dans la base de données nationale complique l'estimation de son parcours. "Mais il doit venir très probablement de la zone des Alpes ou de Provence. Et a plus de chance d'être un jeune loup comme le sont les disperseurs, même si ces derniers ont un taux de mortalité plus élevé".
Un loup bientôt dans la ville ?
L'observation de ce nouveau loup a été réalisée à Marzens, près de Lavaur, dans le Tarn. À cinquante kilomètres de Toulouse. Vu les distances qu'il peut parcourir sur une journée, pourrait-il être vu dans l'agglomération toulousaine ? "Tout à fait", nous répond Patrick Leyrissoux.
"Mais en ville, un loup a un peu moins de raisons de trouver de quoi vivre. Et l'homme étant plus présent, il y a beaucoup de dangers. Il aura donc plutôt tendance à éviter une agglomération. Mais à des moments plus calmes, comme la nuit, il peut effectivement traverser une zone habitée ou s'y retrouver perdu."
Installation d'une meute ?
Un loup peut aussi décider de rester sur un territoire donné. Et "au bout de deux hivers, on aura une zone dite de présence permanente, nous précise Patrick Leyrissoux. Mais très probablement sans reproduction. Car pour cela, il faudrait qu'il y ait un autre individu femelle, ce qui n'est pas évident."
Aujourd'hui, la reproduction de loups et les meutes sont établies uniquement dans les Alpes, dans la zone alpino-provençale, dans le Jura et sur le mont Lozère. Ailleurs, on ne parle que de loups isolés. Et coloniser un nouveau territoire peut prendre beaucoup de temps.
Le territoire est très grand et avant qu'il y ait deux individus qui se rencontrent et se reproduisent, ce n'est pas évident.
Patrick Leyrissoux, vice-président de Ferus
Dans les Pyrénées-Orientales, par exemple, le loup est présent depuis 1999, mais depuis il n'y a jamais eu de meute. Ce nouveau loup identifié dans le Tarn peut décider de rester dans ce secteur. "Et si le territoire ne lui convient pas, il va repartir, on ne sait où."