Ce vendredi 31 mars, la préfecture a publié un arrêté de circulation pour "permettre le ramassage du bois coupé en tout sécurité" sur la RN126. Le collectif La Voie est Libre craint que cela ne soit une excuse pour continuer d’abattre des arbres sur le tracé de l’autoroute.
"C’est des mensonges, je n’y crois pas du tout". Cette réaction, c’est celle de Thomas Digard, du collectif militant La Voie est Libre à la toute fraîche publication d’un arrêté par la préfecture du Tarn. Celui-ci "porte sur la protection des circulations sur la RN 126", pour "permettre dans les prochaines semaines le ramassage du bois coupé en toute sécurité" sur le tracé de l'A69, indique la préfecture.
Mais pour Thomas Digard, pas de doutes, un train peut en cacher un autre. "L’arrêté concerne deux zones. Sur les deux zones, il y en a une où ils sont intervenus mercredi, mais il reste des arbres à abattre. Sur l’autre zone, ils ne sont jamais intervenus pour l’instant, mais il y a des platanes à abattre" explique-t-il. Or, si la loi interdit d’abattre des arbres du 1er avril au 31 juillet pour respecter la nidification des oiseaux, après le 31 mars, comme le précise la préfecture, "la réglementation permet de couper quelques arbres isolés, de manière ponctuelle." Pour le collectif, des arbres vont tout de même continuer de tomber.
Une mobilisation massive jusqu'à présent...
Jusqu’ici, un arrêté interpréfectoral datant du 1er mars permettait au concessionnaire (Atosca), de "commencer les travaux de déboisement, notamment pour les alignements en bordure de routes" selon la préfecture, qui ajoute que ces abattages étaient faits "sous le contrôle de l’État et la présence permanente d’un écologue pour veiller aux enjeux de biodiversité."
Mais depuis le début, les opposants au projet de l’A69, qui doit relier Castres à Toulouse, dénoncent le non-respect de ces règles, et une "construction écocide". "Le fonds du projet est une aberration, qui va à l’encontre de la stratégie nationale bas carbone française, avec des impacts sur l’environnement, sur la ressource en eau" condamne Thomas Digard. Présence des riverains sur les sites visés, militants attachés aux machines de déboisement ou perchés dans les branchages menacés de coupe… depuis plusieurs semaines, la mobilisation prend une myriade de formes différentes. France Nature Environnement avait également saisi le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse pour ordonner la suspension des opérations d’abattage. La justice avait rejeté la requête.
..Qui devrait continuer après le 1er avril
Ce vendredi soir à Vendine, où une dizaine de platanes a récemment été coupée, la Voie est Libre organise "la fête des écureuils". Au programme : tournoi de foot, jeux de table, concerts mais aussi plantation d’arbres. Un "évènement festif" qui était censé célébrer la fin des coupes massives, mais qui devrait plutôt servir à mobiliser les troupes pour la suite du mouvement.
Si les militants prévoient "un aspect juridique" avec un "recours de fond " bientôt déposé par les associations, ils comptent bien continuer d’agir sur le terrain. "On va se battre avec nos armes, les mêmes que celles d’aujourd’hui, énonce Thomas Digard. Des actes de surveillance, de présence, on filme, on informe les gens, on vérifie… Il y a des naturalistes qui vont voir s’il y a des nids avant qu’ils abattent… On fait leur boulot quoi." Le collectif appelait d’ailleurs ce vendredi après-midi à une mobilisation contre une coupe ayant lieu, selon eux, dans une zone Natura 2000, sur les berges de l’Agoût.
La crainte d’une ZAD ?
Depuis quelques jours, Vendine accueille un campement dressé par les opposants au projet. "Il y a plusieurs personnes qui viennent avec des tentes, il y a de la nourriture pour ceux qui sont dans les arbres, décrit le collectif. Pour Thomas Digard, le site, "qui fonctionne avec les bonnes volontés de tout le monde", sert surtout de "point d’information" pour renseigner "les gens nouveaux qui arrivent et ont besoin de comprendre."
Alors que les opposants sont confrontés lors de leurs actions à des dispositifs de gendarmerie de plus en plus musclés, Thomas Digard dénonce des moyens disproportionnés. "La contestation est non violente, concentrée sur de la désobéissance civile, il n’y a jamais eu de casse, d’atteinte au matériel ni aux personnes. À côté de ça, on va protéger des machines qui vont détruire des arbres avec un escadron complet de gendarmerie, devant une trentaine de militants pacifistes juste soucieux de leur environnement. C’est hallucinant ce déploiement' déplore-t-il. Sollicitée sur cette question, la préfecture n'a pas encore répondu au moment de la publication de cette article.
Alors, y a-t-il un risque de transformation du site en ZAD, une zone à défendre à l'image de Sivens ? Pour l'instant le campement est placé "à proximité des fouilles archéologiques faites pour le tracé", et Thomas Digard assure que "les relations avec les gendarmes sont très bonnes." "Ils ne viennent pas, on n'a pas eu d'alerte" développe-t-il, ajoutant que ce vendredi, seul "un hélicoptère de la gendarmerie a survolé la zone pendant cinq minutes." "Le mot ZAD est tellement connoté, ça peut être un moyen pour les autorités de cataloguer les gens, souligne La Voie est Libre. Il faudrait qu’ils viennent voir qui se rassemble. Pour moi aujourd’hui, c’est un campement qui se met en place en soutien aux gens qui sont dans les arbres à Vendine."