En ce milieu du mois de juin, Valérie Pécresse multiplie les déplacements à Paris après avoir sillonné la grande couronne. Va-t-elle faire des élections régionales dans la capitale, aidée par Nathalie Kosciusko-Morizet, une campagne contre le bilan d' Anne Hidalgo et une revanche des municipales ?
Même à Paris, Valérie Pécresse visite des gares RER.
Vendredi 12 juin, en compagnie de Nathalie Kosciusko-Morizet, la candidate des "Républicains" à la région Ile-de-France était à la station Denfert-Rochereau. Elle rencontrait des riverains qui se plaignent auprès de la RATP des nuisances sonores entraînées par des rames qui utilisent quelquefois un itinéraire de délestage sous leurs fenêtres.
Une illustration presque caricaturale du débat en Ile-de-France. Des "bobos parisiens" gênés par le RER indispensable chaque jour à des centaines de milliers de voyageurs franciliens. Paris contre la banlieue. Pourtant, le vainqueur des future élections régionales devra incarner ces deux territoires. Et il ne pourra se passer de Paris.
"Paris c'est essentiel pour la victoire en Ile-de-France", déclare Pierre-Yves Bournazel, élu du 18 ème. Avec ce paradoxe qu'explique Philippe Goujon. "C'est à Paris qu'il y a les réserves de voix puisque c'est là où il y a le plus grand nombre d'électeurs. Mais en même temps, c'est la population qui est la moins sensible aux problématiques régionales", explique le maire du XV ème arrondissement.
Comment alors faire campagne à Paris ? Réponse de Valérie Pécresse. "Les Parisiens ne sont pas toujours convaincus de l'utilité de la région pour eux. Mais c'est évident que si les transports en commun fonctionnent mieux, il y aura beaucoup moins de voitures dans Paris et que donc les Parisiens y gagneront. Donc la région est importante aussi pour les Parisiens. C'est le message de ce déplacement", explique la candidate.
Quand elle se déplace dans les départements de la grande couronne, Valérie Pécresse met en avant la différence de traitement des territoires. Selon elle, la région aide plus financièrement la proche banlieue que les franges de la région. Un argument censé contrer le sentiment d'abandon des services publics en seconde couronne qui profite au Front national. C'est là ou se situe l'électorat de droite qui a reconquis l'Essonne et la Seine-et-Marne lors des départementales du mois de mars.
Mais on imagine mal Valérie Pécresse poursuivre la logique de son argument en terre parisienne et aller devant les électeurs de la capitale en leur expliquant qu'ils sont les privilégiés de la politique régionale. Elle s'en sort en personnalisant le débat. Elle fustige l'égoïsme de la maire de Paris, Anne Hidalgo, utilisant le débat sur le financement des travaux de la prolongation de la ligne 11 du métro. Voir le reportage ci-dessous. On peut y voir les candidats aux régionales avec des casques de chantier. "On ne peut pas dissocier le destin de Paris de celui de la Seine-Saint-Denis", y explique Valérie Pécresse. "On ne peut pas considérer la ville de Paris comme une vache à lait", lui répond Claude Bartolone.
Pierre-Yves Bournazel conduira la liste départementale à Paris des "Républicains" pour les régionales. Il était l'un des porte-parole de Nathalie Kosciusko-Morizet pendant la campagne pour la mairie de Paris. Brigitte Kuster, maire du 17 e arrondissement, devrait en deuxième position sur la liste. De quoi donner une tonalité très municipale à ces régionales dans la capitale. "C'est bien simple. Presque tous les conseillers de Paris veulent être sur la liste des régionales", plaisante un élu. En cas de victoire, le département de Paris enverra plus d'une vingtaine de personnes siéger rue de Babylone.
Faut-il alors considérer les régionales comme une revanche de mars 2014 ? "On n'engage pas un combat politique avec un esprit de revanche", répond tout d'abord la future tête de liste. Mais, fera-t-il campagne contre le bilan d'Anne Hidalgo ? "Bien sûr. On le voit la politique de Madame Hidalgo est de plus en plus critiquée par de nombreux parisiens qui parfois ont pu voter pour elle l'année dernière", poursuit Pierre-Yves Bournazel.
Aux régionales de 2010, la liste commune (FDG-PS-EELV) avait obtenu 58% des voix au second tour à Paris. Valérie Pécresse doit absolument réduire cet écart si elle veut remporter la région. D'ailleurs en mars 2014 lors d'un meeting de soutien à NKM, elle liait leur deux destins. "Si Paris bascule à droite, ce serait un formidable premier signal pour l'Ile-de-France", expliquait-elle. Le signal n'est pas venu. Mais la droite a réduit l'écart. On se rappelle que NKM affirmait être majoritaire en voix.
Vendredi à la permanence électorale de NKM, la députée des Yvelines renverse la chronologie de son argument. "Si la région passe à droite, ce sera très encourageant pour les municipales de 2020 à Paris", déclare Valérie Pécresse devant les militants rassemblés pour un pot de l'amitié. Une façon de mobiliser les troupes pour les élections régionales.
Quelle sera l'autonomie de la liste parisienne ? "Valérie Pécresse va laisser la fédération se gérer toute seule", croit savoir un élu régional. A voir. En tout cas, Valérie Pécresse sera à l'écoute de la spécificité de la capitale. Ainsi plusieurs élus parisiens lui ont déconseillé de commencer une campagne d'affichage à Paris, comme elle a pu le faire dans les autres départements de la région.
Il reste que c'est à Paris, faute d'enjeu régional évident, que s'exprimera le mieux le contexte national de la campagne, via la question de l'attractivité du territoire. "Je pense que ce qui se passe à Paris, c'est important pour les Parisiens, pour les Franciliens. C'est important pour l'ensemble des Français (...). Aujourd'hui, on a toute une génération qui a envie d'aller faire sa vie ailleurs car elle a le sentiment que c'est plus à Paris que cela se passe. C'est un problème pour eux et pour tous les Français, si ce sont les plus dynamiques qui ont envie de partir", explique Nathalie Kosciusko-Morizet.
Bref pour résumer d'une formule qui ne veut pas dire grand chose mais qui permet de conclure un papier avec les apparences de l'intelligence. Ce n'est pas à Paris que Valérie Pécresse va gagner l'élection régionale, mais c'est à Paris qu'elle peut les perdre.