Issu d'une famille de charcutiers finistériens, le Breton Jacques Loussouarn est depuis un à la tête d'un atelier où perdure le savoir-faire culinaire bien connu des Parisiens : le jambon de Paris. L'occasion de découvrir les secrets de cette spécialité.
"Le jambon Prince de Paris a énormément de sens pour moi. En entrant dans une boucherie-charcuterie, chacun sait quel est le Prince de Paris. On le reconnaît partout !", confie Jacques Loussouarn, montrant fièrement le fer orné d’une tour Eiffel, emblème de l'entreprise Doumbéa, une institution francilienne.
"Nous avons plus de quatre cents clients sur Paris et en Île-de-France, bon nombre de boucheries-charcuteries ainsi que de nombreux restaurants dont quelques palaces", se targue ce charcutier breton qui a repris l'an dernier cette institution nichée en plein coeur du 11ème arrondissement de Paris.
"Le jambon Prince de Paris a énormément de sens pour moi. (...) On le reconnaît partout !"
Jacques LoussouarnCharcutier producteur du "Prince de Paris"
Il faut dire que dans la rue de Charonne, mis à part les connaisseurs fort renseignés, personne ne peut se douter qu’un laboratoire produit sans relâche un "véritable" jambon de Paris. Il faut pour cela franchir une porte d'immeuble donnant sur une cour intérieure.
Si vous poussez une des portes aux vitres opaques, vous entrez dans le laboratoire aux carrelages blancs et tables en inox où les jambons sont travaillés à la main à chaque étape de l'élaboration de cette spécialité parisienne.
Une poignée d'employés s’attèlent ainsi à la fabrication du produit : près de 800 jambons transitent par la rue de Charonne chaque semaine pour suivre un processus de fabrication inchangé depuis la création de l'entreprise.
→ À lire : "Le jambon de Paris fait à Paris, ça a du sens", pour le dernier producteur de la capitale
Un marquage d'une tour Eiffel au "fer rouge"
La première étape, c'est le marquage des jambons au "fer rouge" de la marque accompagnée de son illustre tour Eiffel. "Cela brûle la couenne du cochon." Vient ensuite l'étape du de l'injection de la saumure dans la veine pour que celle-ci "remplace le sang".
"Le système sanguin dans le jambon, c’est important car cela se diffuse dans tout le jambon, atteste Jacques Loussouarn. C’est bien plus efficace qu’avec une injecteuse multi-aiguilles. Cela permet une meilleure salaison."
Quant à la saumure, elle est principalement composée d'aromates et de sel de Guérande, essentiel au goût du jambon. "Cela a toujours été le sel de Guérande pour le Prince de Paris. C'est extrêmement important. Plus sain, il est bien différent au goût que bien d'autres sels", confie-t-il, un brin passionné.
"Le système sanguin dans le jambon est important car il se diffuse sur tout le jambon. Cela permet une meilleure salaison"
Jacques LoussouarnCharcutier producteur du "Prince de Paris"
"Une fois injectés, ils sont désossés et le jarret enlevé. Ils sont ensuite mis en sel jusqu’au lendemain." Une fois le trempage terminé, ils sont mis dans une poche sous vide, avant de partir à la cuisson sur des chariots.
"Après une cuisson de dix heures, on les laisse entre quatre et cinq jours en stockage de refroidissement pour ne pas avoir une tranche qui part dans tous les sens. On laisse la viande se reposer", explique Jacques Loussouarn. Le jambon va ainsi s'imprégner durant cette pérode du bouillon préalablement injecté. "Cela donne du goût !", ajoute-t-il.
Les jambons sont de nouveau remis sous vide avant d'être expédiés à près d'une soixantaine de kilomètres de là, à Milly-la-Forêt, au cœur du Gâtinais français, au sud de l'Essonne. "Nous y faisons aussi d’autres fabrications de jambons. Toute la logistique est là-bas.”
Le dernier jambon de Paris produit dans la capitale, un déclencheur pour la reprise ? "Évidemment, oui", répond l'intéressé. "Quand j’ai su que c’était à vendre il y a un an, je ne pouvais pas louper ça. C’est quand même unique." avoue ce fils de charcutier qui après avoir produit des fraises au Maroc a opéré un retour à la tradition familiale.
"Quand j’ai su que c’était à vendre il y a un an, je ne pouvais pas louper ça. C’est quand même unique."
Jacques LoussouarnCharcutier producteur du "Prince de Paris"
Un produit emblématique des terroirs parisiens
La tradition avait jusqu'alors été perpétuée par son ancien propriétaire Yves Le Guel. Celui-ci avait ravivé en 2005 ce patrimoine culinaire ancestral, bien connu des gastronomes.
L'Île-de-France compte trois autres producteurs du célèbre et authentique jambon de Paris, bien que l’appellation soit déposée par de grandes industries agroalimentaires bien connues, au détriment des “véritables” producteurs artisanaux, autrefois déploré par Yves Le Guel. Aujourd'hui, le "Prince de Paris" se contente du label Fabriqué à Paris de la Ville de Paris, ainsi que du label régional Produit en Île-de-France - Terres de Saveurs. Selon l'association des charcutiers de Paris et du Grand Paris, une dizaines de maisons parisiennes continue de fabriquer le jambon de Paris.