Depuis l'invasion de l'Ukraine par son voisin russe, les éleveurs de Seine-et-Marne s'inquiètent de la hausse du prix du blé et du maïs de fourrage, dont le pays est un gros producteur. Une raréfaction du gaz russe préoccupe de même la filière céréalière pour l'approvisionnement en engrais.
Dans son village briard de Lizines, aux portes de Provins (Seine-et-Marne), Bernard Compte vit bien loin des combats qui déchirent l'Ukraine. Pourtant, la guerre a une conséquence directe sur son exploitation : le prix de la tonne de maïs, qu'il achète pour nourrir ses vaches, a grimpé de 15% en quatre jours pour atteindre environ 300 euros.
"Personne ne peut lire dans la boule de cristal, on est dans des mouvements qui sont incontrôlables et incontrôlés," souffle l'agriculteur seine-et-marnais.
Le gaz russe, nécessaire aux céréaliers
Au sein d'un marché mondial, il n'est pas surprenant que les indicateurs boursiers jouent aux montagnes russes depuis la décision de l'invasion de l'Ukraine par Moscou. "On est passé de 285 à 340 euros la tonne de blé, avec une clôture autour de 316 euros la tonne, ce qui est un sommet historique pour le blé sur Euronext," relate Arthur Portier, consultant chez Agritel.
Cette évolution du cours du blé peut ravir un moment les céréaliers franciliens. Mais ceux-ci dépendent en partie du gaz importé de Russie. "Le prix du gaz est en train de flamber, et le prix des engrais avec. Donc ça va amener à une augmentation significative du coût de production de la tonne de blé," poursuit Arthur Portier. L'azote, venant notamment de Russie et entrant dans la composition d'engrais, est introuvable depuis deux jours.
Le sort de l'Ukraine est devenu le sujet préoccupation n°1 chez les agriculteurs franciliens. "Ce que nous craignons, c'est l'approvisionnement en gaz, en combustibles et la production de céréales, puisque ces pays ont une très grosse influence sur le marché mondial," confie Philippe Dufour, éleveur de vaches allaitantes à Échouboulains (Seine-et-Marne). Il estime que son maïs ensilage lui coûtera prochainement 20 à 30% plus cher à cause du conflit.
L'alimentation du bétail en question
L'aviculture et les élevages porcins, dont l'alimentation des bêtes représente 60% des dépenses, sont les secteurs les plus dépendant de la situation ukrainienne. "Si le coût des aliments augmente de 10 à 30%,on va arriver très vite à un coût de production supérieur au prix de vente. La marge est déjà insuffisante en temps normal pour permettre à l'agriculteur de vivre se son métier; alors là, on risque d'avoir des gens qui vont arrêter de produire car ils vont perdre de l'argent."
En 2021, la Russie est le premier exportateur de blé mondial, l'Ukraine le 7e et est aussi un important producteur de maïs (7e mondial en 2019). Ce dernier pays a exporté l'année dernière vers la France pour 75 millions d'euros de résidus d'industrie alimentaire, dont le maïs ensilage fait partie, soit 15% de ses exportations.
En visite au Salon de l'Agriculture, le président de la République Emmanuel Macron a annoncé que le gouvernement préparait "un plan de résilience" pour face aux conséquences économiques de la guerre entre l'Ukraine et la Russie qui, selon lui, est amenée à "durer".