La Croix-Rouge fête cette année ses 160 ans d’existence. Parmi ses missions ; réunir des familles séparées par la guerre ou la violence. Certains migrants ont dû quitter précipitamment leur pays, perdant toutes traces de leurs proches. Un service permet de lancer des recherches pour les identifier et les retrouver. L’an passé en Pays de la Loire, 74 dossiers ont été traités.
Dans les bureaux de la Croix rouge à Nantes, un homme arrive plein d’espoir. Il est demandeur d'asile. Depuis deux ans, il est sans nouvelle de sa femme et de ses enfants. "On va prendre votre identité et celle des personnes que vous cherchez et après les recherches seront faites dans les pays concernés", le rassure une jeune bénévole.
L’association compte parmi ses missions : celle de rassembler des proches séparées par la guerre ou la violence. C’est le cas de ce père de famille. En République démocratique du Congo, il travaillait aux champs. Un jour, sur le chemin du retour, après une dure journée de labeur, des voisins le dissuadent de rentrer chez lui. Des hommes armés, préviennent-ils s’attaquent au village.
"Tu risques de te faire assassiner"
"Ils m’ont dit, essaie de sauver ta peau, ceux que tu laisses, tu les chercheras plus tard. Si tu rentres, tu risques de te faire assassiner, parce qu’il y a des gens qui sont morts brulés", raconte le père de famille désœuvré.
On a brulé nos maisons, il y avait des attaques à l’arme blanche. On cherche à en savoir un peu plus parce que là, c’est vraiment très difficile de ne pas savoir où ils sont
Un père de familleDemandeur d'asile
"Ils ont perdu toute leur vie, si on peut au moins leur ramener la personne qu’ils aiment, c’est important", explique Essye Brossas en service civique à la Croix-Rouge.
Sur place, l'homme n'avait pas de téléphone portable, sa femme non plus. Il n’a aucune photo à présenter, ce qui complique les recherches.
"On n’a pas beaucoup d’infos sur ce village", se désolent les bénévoles qui tentent tout de même de localiser sa maison. "Parfois, on a des noms ou des structures comme un hôpital qui nous permet une géolocalisation", ajoutent-ils, "mais là ce n'est pas urbanisé du tout."
D'ici à deux mois, les acteurs de la Croix rouge iront sur place, en Afrique. "Après, c'est terrain de terrain qui ne nous concerne plus. Donc c'est important de récupérer un maximum d'informations sur ces pays où les villages parfois ne portent même pas de nom, pas d'identification des rues non plus", précise Claudine Chevallereau, bénévole à la Croix-Rouge.
"Je n'oublierai jamais"
Alors, les recherches peuvent prendre des mois, voire des années.
Alikhan se souvient du jour où il a appris que sa mère et sa sœur avaient été retrouvées en Afghanistan par la Croix rouge. C’est Alain David qui lui a annoncé. L’association organise alors un appel vidéo avec ses proches.
Quand Alikhan a vu sa maman, c'était un moment très fort pour lui et pour nous aussi
Alain DavidPrésident de la Croix-Rouge des Pays de la Loire
"J’étais trop heureux, je n’oublierai jamais cet instant, peut-être quand je serai mort ", se souvient Alikhan. "Y a le temps !", le reprend tendrement Alain David, président de la Croix-Rouge des Pays de la Loire.
Alikhan est tout sourire aujourd’hui, mais il reste traumatisé par ce qu’il a vécu dans son pays. Son père s’est fait assassiner sous ses yeux par les talibans
Je ne peux pas vider cette image de ma tête. Après ça, je suis devenu le grand frère, je dois prendre mes responsabilités
AlikhanAfghan
À 17 ans, menacé, il décide de fuir. "J’étais connu comme un militaire parce que j’ai travaillé avec mon oncle. J'étais dans les bureaux, je faisais le ménage, ils m'ont pris pour un soldat".
Le jeune Afghan espère que sa mère et sa sœur le rejoindront bientôt à Nantes, où il tente de reconstruire sa vie.
Je travaille dans trois restaurants, pour la livraison ou l'entretien, ça dépend des contrats. C'est dur, c'est fatiguant, mais la vie
AlikhanAfghan
74 dossiers traités en 2023
En 2023, la Croix-Rouge a réuni plus de 4700 familles dans le monde. 74 dossiers ont été traités en Pays de la Loire. La plupart des cas couvrent "des conflits ethniques, des guerres, des catastrophes naturelles, des situations de crise", précise Alain David, président de la Croix-Rouge des Pays de la Loire.
Certains pays sont aujourd'hui trop dangereux. "Nous n'y entrons pas pour ne pas mettre en danger nos bénévoles", ajoute-t-il. 60 millions de volontaires travaillent aux quatre coins monde pour la Croix-Rouge.
Le reportage de Siegrid de Misouard, Olivier Quentin et Christophe Person
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