Il enjambe fièrement l’estuaire de la Loire, offre une vue imprenable sur les chantiers de l’atlantique. Il est le seul franchissement du fleuve entre Nantes et l’océan et permet à 11 millions de véhicules de relier Saint Nazaire et Saint Brévin. Revivez l'histoire de sa construction ce lundi à 23 h
Le pont de Saint Nazaire prolonge la route bleue qui relie la Bretagne à la Vendée. Inauguré il y a un demi-siècle, il est encore aujourd’hui le plus long pont haubanné du monde et le plus long de France. A l'origine, il n'y a pas de désigner, d'architecte à l'esquisse levée, comme pour le pont de l'île de Ré, non. Il n'y a que des ingénieurs et des ouvriers qui ont du affronter les éléments, la géographie de l'estuaire et la necessaire continuité d'un trafic maritime qui rythme le quotidien de l'un des plus grands ports de France. Ses haubans qui soutiennent les deux pylones centraux lui donne une beauté et une perspective rarement atteintes pour ce type de construction.
La valse du béton et de l'acier
Ce gigantesque chantier, engagé en mars 72, a exigé un travail colossal pour 200 ouvriers. Sans relâche et n'obéissant qu'à une seule règle, ne jamais s'arrêter, les bâtisseurs vont écrire une aventure sans exemple. Une aventure qui ira aux limites des connaissances sur la résistance des matériaux et qui changera à tout jamais les sciences de l'ingénieur. Les travaux sont confiés à deux entreprises symbolisant le génie et le savoir-faire Français : la Compagnie Française d’Entreprises Métalliques (CFEM) pour les constructions en métal et la Société Générale d’Entreprises (SGE) pour les ouvrages en béton.
Il aura fallu 3 ans et des milliers d’heures d’études pour conceptualiser et finaliser le pont de Saint-Nazaire. Au total, ce sont 80.000 m3 de béton et 17.000 tonnes d'acier qui ont été utilisés pour construire ce titan.
Première étape : la réalisation des fondations, c'est-à-dire les piles principales que l’on retrouve tous les 50
mètres, sur toute la largeur de l’estuaire. Pour les installer, il s'agit d'ancrer dans le sous-sol rocheux, à des profondeurs de 15 à 50 mètres, 258 pieux en béton tubés, eux mêmes mesurant chacun entre 1,5m et 1,8m de diamètre. Une fois les piles terminées, elles mesurent entre 3 et 57 mètres de hauteur. Sur les remblais d’accès au chantier, 208 poutres en béton de 190 tonnes sont préfabriquées.
En moyenne, les ouvriers fabriquent 3 à 4 poutres par semaine. Pour chaque coulée de béton et chaque temps de séchage, les ingénieurs doivent prendre en compte la température extérieure. Dans l’estuaire, la météo est capricieuse. Pour les ouvriers, les conditions de travail sont rudes. Même s’ils sont habitués aux chantiers à
hauts risques, comme la construction de la Tour Montparnasse, les vents et les eaux de l'estuaire de la Loire peuvent être particulièrement violents.
Une fois terminées, les poutres sont acheminées à leur place définitive. Pour cela, on utilise des fardiers pour les transporter et un lanceur métallique pour les poser. Un engin unique de 147 mètres de long.
Cette cathédrale de béton et d'acier qui trône à 130 mètres sur la Loire est aussi un trésor de minutie lorsqu'on pénètre dans ses entrailles
Des innovations techniques pour filmer ce géant de béton et d'acier
Les réalisateurs Hugo Hernandez et Thierry Fessard se sont rencontrés sur le tournage de "C'est pas sorcier" et depuis travaillent en binôme avec un interêt particulier pour les constructions hors normes. Ils ont signé des documentaires sur le tunnel Lyon Turin ou encore sur la base aérienne à vocation nucléaire d'Istres. Généralement, ils travaillent ensemble le synopsis, le découpage et participent au montage des films. La rédaction des commentaires revient à Hugo, les prises de vues à Thierry. Pour lui un objectif , attiser la curiosité, vulgariser le domaine de la science et des techniques.
Pour ce film, le duo s'est appuyé sur les archives de l'INA (institut national de l'Audiovisuel) mais surtout sur le film "Un pas de géant" réalisé à l'époque des travaux par Renée Guérin . Un documentaire commandé par les constructeurs aujourd'hui agrégés à la Holding Vinci. Ce témoignage technique suit l'évolution de la construction au plus près des ouvriers et des ingénieurs et fourmille de documents rares sur les conditions de travail et de réalisation de l'ouvrage.
Pour comprendre la complexité du chantier, le documentaire de Hugo et Thierry donne la parole à des témoins comme Philippe Griaud responsable du service ouvrage d'art du département de Loire Atlantique jusqu'en 2016 qui a étudié des tonnes de plans et documents de construction et su transmettre ses connaissances à ses successeurs Pierre Quentin ou Thibaut Pannetier chef du service d'ouvrage d'art. Ce sont eux qui nous guident dans les entrailles de ce pont géant.
Au-delà du sujet lui-même, les réalisateurs ont choisi de proposer des prises de vue surprenantes comme un contraste avec des prises de vue plus traditionnelles avec l'aide d'outils encore assez atypiques
C’est le cas des images réalisées par des drônes dit FPV (First Person View), issus des courses de drones. Ils sont très maniables, rapides et permettent typiquement de slalomer entre les piles du pont tout en cassant le “niveau” de l’image, comme si nous étions embarqués.
Autre exemple, les caméras à 360° qui filment simultanément dans toutes les directions. Fixées au bout d’une perche et associées à des mouvements bien choisis, elles permettent de créer des plans insolites et souvent spectaculaires. Au point de se demander comment la caméra est arrivée jusqu’ici lors du visionnage. C’est le cas par exemple tout en haut des pylônes du pont, où elles donnent une impression de plongée entre les haubans, à 130 mètres au-dessus de l’eau.
Un pont sous surveillance
Un tel projet s'inscrit dans le temps qui hélas fait son oeuvre. Le vent, la pluie, la mer usent l'ouvrage, grignotent ses fondations, fragilisent les cables des hautbans. Inspection des géomètres, interventions des techniciens, consolidation des pièces de béton abimées, le pont nécessite une surveillance et un entretien de tous les jours.
Parallélement à ce tournage sur le pont et comme si les deux etait indissociables, le duo de réalisateur s'est immergé dans la vie du chantier de l'Atlantique. Un documentaire en cours de finition qui sera diffusé prochainement sur un chaîne de la TNT. En attendant, si vous voulez tout savoir sur la construction du pont de Saint Nazaire sur les innovations technologiques mises en oeuvre pour son fonctionnement, suivre les rénovations nécessaires à sa survie, alors plongez sur le Pont de Saint-Nazaire, le pont le plus long de France.
Ce documentaire inédit de 52 minutes réalisé par Hugo Hernandez et Thierry Fessard est à voir sur France 3 Pays de la Loire ce 1er novembre en deuxième partie de soirée. Rediffusion mardi 2 novembre à 9.45. Disponible en rattrapage sur France.tv jusqu'au 1er décembre
Une coproduction France Télévisions et Factual Factory
Chiffres clés
3 ans de travaux 54 piles de béton armé
17.000 tonnes d’acier
80.000 m3 de béton hautes de 61m maximum
72 haubans pour maintenir 2 pylônes culminant à 68m au-dessus du tablier
9 km de câbles pour les haubans
Le pont peut résister à des vents de plus 120km/h
30.000 véhicules par jour 11 millions par an
1600 points lumineux pour une gestion dynamique des voies
4 basculements des voies chaque jour