Fermeture de la centrale de Cordemais. Entre sentiment de trahison et projet de centrale nucléaire

Après l'annonce de l'abandon du projet Ecocombust qui devait permettre de poursuivre une activité industrielle sur le site de la centrale électrique de Cordemais, les réactions se multiplient. Le Président du Conseil Départemental parle de "trahison". Quant à la présidente de la Région, elle rappelle son soutien à l'implantation d'une "petite" centrale nucléaire.

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Dans un communiqué publié sur son site, EDF confirme qu'on se dirige désormais vers la fermeture de la centrale électrique à charbon de Cordemais, en Loire-Atlantique. Le projet "Ecocombust", qui consistait à substituer des déchets de bois (pellets) au charbon, n'a finalement pas été retenu.

Les conditions technico-économiques pas réunies

"Après analyse, les conditions technico-économiques pour réaliser ce projet n'étant pas réunies, EDF ne pourra pas substituer complètement des pellets au charbon. EDF salue tous les efforts réalisés par les équipes ayant travaillé sur ce projet. Dans ces conditions, EDF envisage d'arrêter la production électrique de la centrale thermique de Cordemais en 2027", peut-on lire dans ce communiqué.

Concernant les salariés (350 personnes travaillent actuellement sur le site), EDF s'engage à les accompagner dans leur projet de professionnel jusqu'en 2029.

Lire aussi : La centrale de Cordemais en Loire-Atlantique fermerait en 2027, le projet Ecocombust abandonné

Pour autant, il n'est pas question, dans ce communiqué, de fermeture du site, mais d'arrêt de la production électrique. EDF évoque une reconversion des lieux en "usine de préfabrication des tuyauteries du Circuit Secondaire Principal destinées aux EPR2".

Il s'agit de tuyaux conduisant la vapeur d'eau produite par le réacteur nucléaire vers la turbine, qui, elle-même, entraine un alternateur producteur d'électricité.

Cette usine de préfabrication de Framatome, filiale d'EDF, pourrait employer une centaine de personnes au début puis jusqu'à 200 au pic de son activité.

"Une trahison"

Le président du Conseil Départemental de Loire-Atlantique, Michel Ménard, qui continue de soutenir le projet "Ecocombust" s'étonne de cette décision alors que, dit-il : "tous les voyants étaient au vert".

"Il s’agit d’une trahison de l’engagement du président de la République qui avait personnellement confirmé son soutien au projet en septembre 2023" déclare Michel Ménard.

Ce n'est pas une grande surprise. Depuis quelques années, EDF émet beaucoup de doutes sur la rentabilité de ce projet.

Christelle Morançais

Présidente de la région Pays de la Loire

"Ce que je regrette avant tout, c'est que ça ait mis autant de temps, huit ans, pour prendre cette décision et on a vraiment l'impression que les salariés, l'ensemble des collectivités et des élus ont été un peu baladés par le gouvernement", estime Christelle Morançais, la présidente de la région Pays de la Loire.

L'idée d'implanter en Loire-Atlantique un SMR (small modular reactor), une "petite" centrale nucléaire, idée que soutient Christelle Morançais, est ressortie à l'occasion de l'abandon du projet Ecocombust. 

"J'ai demandé, il y a maintenant plus de 3 ans, au gouvernement et à EDF d'étudier des scénarios industriels complémentaires, rappelle Christelle Morançais sur le réseau social X. J'ai même proposé que, parmi d'autres hypothèses, l'implantation d'une petite centrale nucléaire soit examinée."

Pour le moment, si la Chine et la Russie expérimentent des prototypes, ces centrales nucléaires capables de produire de 10 à 300 mégawatts (contre 4 réacteurs de 900 MW pour la centrale de Chinon par exemple), n'existent pas en France. Le premier prototype français ne devrait voir le jour qu'en... 2035.

Lire aussi : Nucléaire : que sont les SMR, ces "mini réacteurs" dans lesquels la France veut à son tour investir ?

"C'est aujourd'hui une solution qui n'est pas mature. Il y a Naval Group, il y a EDF qui travaillent sur des solutions au niveau national, a précisé Christelle Morançais, je sais qu'il y a d'autres pays aussi qui travaillent sur cette solution. Maintenant, c'est une solution, on va dire, sur du moyen-long terme. En attendant, là, il y avait Ecocombust, il y a l'enjeu de Framatome, ça peut être aussi l'hydrogène".

Franck Louvrier, le maire LR de La Baule, et vice-président de la Région, a fait savoir également qu'il soutenait cette idée de "petite centrale nucléaire".

Des conséquences sur les finances des communes

L'annonce de l'arrêt total de l'activité de production électrique à Cordemais va également impacter les finances des collectivités locales sur lesquelles sont implantés la centrale électrique et les pylônes d'ERDF.

Une manne financière qui représente un quart du budget de la commune de Cordemais et qui avait permis jusqu'à maintenant de réduire les impôts locaux.

Pressentant un avenir sombre pour la centrale, la commune de Cordemais, 3900 habitants, a déjà voté une augmentation de plus de 24 % de sa taxe foncière pour cette année 2024.

"C'est la CGT qui m'a appelé sur l'heure du repas hier midi pour m'annoncer la fermeture, s'indigne le maire de Cordemais qui aurait préféré être prévenu par une voie plus officielle. Daniel Guillé ne cache pas sa déception.

"Ce projet (Ecocombust) a été soutenu par les collectivités territoriales", dit-il, en soulignant qu'il y a eu beaucoup d'investissements financiers et humains dans ce sens. Dont le soutien du Président Emmanuel Macron. "C'est quelque chose de grave pour le territoire et qui va sans doute être mal vécu" prévient l'élu.

Quant aux conséquences économiques pour sa commune, Daniel Guillé attend de connaître les modalités de compensation, s'il y en a. Une usine de tuyauterie serait la bienvenue bien sûr, mais elle ne générera pas les mêmes rentrées fiscales pour la commune et l'intercommunalité.

Préavis de grève

Du côté des salariés de la centrale thermique, un préavis de grève doit être déposé par la CGT, la CFE-CGC et FO. Le préavis est censé couvrir les salariés pour toute action de grève pendant la période hivernale. 

Les syndicats demandent à leur direction de venir s'expliquer.

"On attend de la cohérence politique, juste ça ! Ça nous ferait un peu de bien, dit amèrement Fabien Deschamps, délégué CGT à Cordemais. Emmanuel Macron a annoncé le 24 septembre 2023 qu'on ne fermerait pas les dernières centrales à charbon, mais qu'on les transformerait pour la biomasse et Agnès Pannier-Runacher qui revient aux affaires à la transition énergétique, s'était déjà positionnée en 2023 en validant notre projet. On voudrait qu'ils réaffirment leur position. EDF ne peut pas être seul décisionnaire de cette situation."

Des emplois avant tout pour Framatome

Pour Sébastien Bellomo, son collègue de la CGT : "On est en train de perdre tout le côté social dans notre belle entreprise qu'était EDF."

Pour le syndicaliste, la transformation en usine de fabrication de tuyaux privilégierait d'abord des employés de Framatome avant de servir à la reconversion des salariés de la centrale.

Quant au projet de centrale nucléaire, même petite, Sébastien Bellomo ne se prononce pas, mais il rappelle entre les lignes l'opposition qui s'était levée dans les années 70 contre le projet d'une telle implantation, près de Paimboeuf. "On est en capacité d'avoir une ZAD très rapidement et que le projet s'étouffe", glisse-t-il.

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